Intervention de Gilbert Rebeyrolle

Mission commune d'information sur l'organisation territoriale du système scolaire et sur l'évaluation des expérimentations locales en matière d'éducation — Réunion du 26 avril 2011 : 1ère réunion
Table ronde avec les représentants des milieux socio-économiques

Gilbert Rebeyrolle, président de la Chambre régionale des métiers et de l'artisanat du Limousin, Assemblée permanente des Chambres de métiers et de l'artisanat (APCMA) :

En ce qui me concerne, je suis artisan boulanger au sein d'une petite entreprise de 9 salariés, à Limoges. Celle-ci, en quarante ans, a formé 42 apprentis.

Les entreprises artisanales et, par conséquent, les Chambres de métiers et d'artisanat sont hautement concernées par la réforme de la voie professionnelle. Selon cette loi, il n'est plus nécessaire de posséder un diplôme de niveau 5 pour accéder au niveau 4. En outre, la formation menant au baccalauréat professionnel dure désormais trois ans, à l'instar du baccalauréat généraliste.

Cette réforme relève d'une décision du ministère de l'éducation nationale dont nous comprenons les enjeux et que nous respectons. Cependant, nous sommes attentifs au fait qu'il n'y aurait plus besoin du niveau 5, l'entrée dans l'emploi s'effectuant au niveau 4. Or le niveau 5 correspond à un besoin pour l'artisanat, qu'il s'agisse du secteur du bâtiment ou de la boulangerie. Pour nous, le véritable enjeu consiste à amener les jeunes à une véritable qualification de niveau 5, qui reste un niveau pertinent d'entrée dans l'emploi. Il s'agit d'accompagner les jeunes dans une montée en compétences et en qualifications, lorsqu'ils sont prêts et lorsqu'ils le souhaitent.

Les entreprises se montrent avant tout demandeuses de jeunes qualifiés et motivés. Aujourd'hui, de nombreuses organisations professionnelles s'adressent à l'Assemblée permanente des Chambres de métiers afin qu'elle crée des brevets techniques des métiers, toujours au niveau 4, mais plus fortement centrés que le baccalauréat professionnel sur la situation de travail elle-même. La formation en trois ans permet d'établir un parallélisme entre la voie professionnelle et la voie générale.

La seconde de détermination est suivie par une première et une terminale, plus centrées sur un métier et une spécialité. Cette organisation a été conçue pour la formation en lycée professionnel. Cependant, force est de constater, après deux ans de mise en oeuvre, qu'elle ne fonctionne pas dans le secteur de l'apprentissage.

En effet, les employeurs se montrent réticents à signer des contrats de trois ans avec des jeunes qui sortent du collège et qui ne connaissent pas le métier. Ils préfèrent conclure des contrats de deux ans avec des jeunes qui préparent le certificat d'aptitude professionnelle (CAP), quitte à signer un second contrat pour la préparation d'un brevet de technicien professionnel (BT) ou d'un baccalauréat professionnel (Bac Pro). Les centres de formation d'apprentis (CFA) ont été contraints par les régions de modifier leur offre de formations. Ils ont remplacé les sections préparant au brevet d'études professionnelles (BEP), voire les sections menant au brevet d'aptitude professionnelle (BAP), par des sections de baccalauréat professionnel. Or faute d'employeurs, ces sections n'ont pas été remplies et des apprentis ont été perdus en cours de route. Une note du ministère de l'éducation nationale explique très bien que la perte d'élèves en BEP n'a pas été compensée par les effectifs en baccalauréat professionnel.

S'il n'est pas possible de revenir sur la réforme de la voie professionnelle, nous demandons à tout le moins que ses effets sur l'apprentissage soient analysés et que des mesures correctives soient envisagées. Nous proposons que la durée de la formation puisse être modulée entre deux et quatre ans. Nous souhaitons que deux contrats consécutifs puissent être signés. Nous sommes également favorables à la généralisation des dispositifs d'initiation aux métiers par alternance (DIMA) dans les CFA, afin qu'ils puissent jouer, dans la mesure du possible, un rôle de sas, à l'instar de la classe de seconde dans l'enseignement professionnel.

L'Assemblée permanente des Chambres de métiers et de l'artisanat a décidé, en juin 2009, d'organiser son offre de service de formations par la mise en place d'une université des métiers et de l'artisanat au niveau des régions. Aujourd'hui, 10 universités ont été créées. Nous avons donc formalisé des relations de partenariat avec des établissements de l'enseignement supérieur, afin de mettre en place des concours de formation qui répondent à la fois aux besoins des entreprises et aux objectifs de l'enseignement supérieur. La coopération est donc possible.

Pour que le monde socio-économique puisse contribuer efficacement à une rénovation du système éducatif, il faut que celui-ci traite le monde socio-économique à parité, qu'il accepte de lui ouvrir ses portes, qu'il reconnaisse ses besoins et accepte de les traiter. Il doit manifester la volonté de le considérer comme un véritable partenaire.

Malheureusement, à l'heure actuelle, ce n'est pas toujours le cas. Un véritable dialogue s'est instauré dans des instances comme la Commission nationale de la certification professionnelle (CNCP) et au sein du Conseil national de la formation professionnelle tout au long de la vie (CNFPTLV). Néanmoins, sur le terrain, l'intensité de la coopération dépend trop souvent de la volonté des inspecteurs d'académie. Il n'est pas normal, par exemple, que nous ne soyons pas systématiquement associés à la mise en place des parcours de découverte des métiers et des formations par l'éducation nationale.

Nous avons exprimé des propositions auprès du ministre de l'éducation nationale pour que les Chambres des métiers et de l'artisanat participent à l'orientation des élèves, afin que nous puissions expérimenter ensemble des parcours hybrides. Nous n'avons pas été entendus. Nous proposons donc que soient créées des instances locales de concertation, composées de représentants du monde socio-économique et du système éducatif, pour favoriser la codécision en matière d'orientation et d'organisation de l'accueil des élèves dans les entreprises.

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