Intervention de Bernard Falck

Mission commune d'information sur l'organisation territoriale du système scolaire et sur l'évaluation des expérimentations locales en matière d'éducation — Réunion du 26 avril 2011 : 1ère réunion
Table ronde avec les représentants des milieux socio-économiques

Bernard Falck, directeur de l'éducation et de la formation, Mouvement des entreprises de France (MEDEF) :

En premier lieu, je souligne combien j'apprécie d'être invité à donner mon point de vue sur un sujet aussi important que l'éducation. Je remercie tout particulièrement Claude Thélot pour l'élan qu'il a suscité autour du débat national sur l'avenir de l'école.

Bien sûr, il convient de penser globalement tout en agissant localement, et de favoriser les partenariats entre l'éducation nationale et l'ensemble des entreprises, quelle que soit leur taille et le secteur d'activité auquel elles appartiennent. Nous sommes attachés à ce que l'emploi soit considéré de manière globale, ceci à tous les niveaux de formation, car il faut assurer un continuum.

En effet, il me semble impossible d'aborder le sujet du système scolaire sans examiner avec attention son positionnement dans une continuité, depuis l'école primaire jusqu'à l'enseignement supérieur, en y incluant notamment l'enseignement général, l'enseignement technologique et l'enseignement professionnel. Les entreprises doivent s'appliquer, plus largement encore, à mieux faire connaître leurs métiers. Une meilleure information doit être dispensée, en lien avec le système éducatif, sur les formations menant à ces métiers. Bien évidemment, les parents d'élèves ont un rôle essentiel à jouer dans ce domaine. Dès 2007, une convention de coopération a été conclue avec l'ensemble des associations de parents d'élèves.

L'alternance ne se borne pas uniquement à un contrat d'apprentissage ou à un contrat de professionnalisation. Il s'agit également d'une modalité pédagogique à laquelle nous sommes particulièrement attachés entre un lieu de formation et une entreprise. Celle-ci permet, sur la base d'une pédagogie partagée, d'offrir aux jeunes non seulement des connaissances théoriques, mais aussi la capacité à mettre immédiatement en oeuvre leurs acquis.

Les fortes ambitions destinées à développer l'alternance ne peuvent se réaliser qu'en partenariat étroit avec le système éducatif, notamment avec l'éducation nationale et les universités.

Il faut, bien sûr, favoriser les échanges entre les enseignants de même spécialité, mais aussi les échanges pluridisciplinaires. La « découverte professionnelle trois heures » et la diffusion des mini-entreprises au sein des collèges et des lycées permettent d'impliquer des enseignants relevant de spécialités diverses. Le travail en équipe doit être favorisé, à image de la vie en entreprise et dans la société.

Il convient, notamment de favoriser les échanges entre les enseignants de la voie générale et de la voie technologique et professionnelle. Lors des forums que le MEDEF organise chaque année dans les régions, les rencontres entre les enseignants du secondaire et ceux de l'enseignement supérieur s'avèrent manifestement fertiles. En outre, ces échanges entre enseignants doivent être favorisés au plan européen et international. Certes, il faut se garder d'introduire en France des modèles ne pouvant pas être transposés en l'état, mais il faut s'inspirer d'un certain nombre d'expériences. D'ailleurs, les enseignants s'y montrent extrêmement ouverts.

Aujourd'hui, nous nous situons dans un moment historique. Entre le système scolaire et le monde des entreprises, de nombreuses rapprochements ont été mis en oeuvre, qu'il s'agisse de la « découverte professionnelle de trois heures » et de la « semaine école-entreprise » ou encore des mini-entreprises. Dans ce domaine, les statistiques sont impressionnantes et les progrès évidents. Il s'agit maintenant de trouver un nouvel élan.

Au fil des interventions, des mots-clés reviennent souvent. Les thématiques de l'insertion professionnelle, de l'employabilité et de l'orientation s'expriment plus fortement qu'il y a quinze ou vingt ans. De même, les préoccupations autour de la mobilité et de l'évolution professionnelle, de l'illettrisme et des « décrocheurs » sont envisagées avec une acuité croissante. Ensemble, nous devons relever ces formidables enjeux.

La réforme du baccalauréat devait permettre à une fraction plus importante d'une classe d'âge d'obtenir ce diplôme et de poursuivre des études. A ce sujet, les avis sont contrastés, selon les secteurs d'activité, les entreprises et les métiers. Sur un plan macro-économique, les sociétés les plus avancées, dans le monde, sont celles qui ont le plus fortement misé sur l'éducation et la recherche.

Il ne s'agit en aucun cas de mener chaque jeune, de façon artificielle, au plus haut niveau de formation. Notre responsabilité collective consiste plutôt à faire en sorte que chaque jeune soit formé au niveau qui lui permettra une insertion professionnelle. A cet égard, le MEDEF s'est montré très favorable à une réforme en profondeur de l'enseignement secondaire, autour du baccalauréat général, du baccalauréat professionnel mais aussi du baccalauréat technologique. En cette année 2011, nous ne possédons pas de recul suffisant pour effectuer finement une analyse fine.

Au-delà de la réforme de ces voies, d'autres éléments jouent un rôle important. En classe de seconde, dorénavant, tout élève devra suivre un enseignement d'exploration, soit en sciences économiques et sociales, soit sur les principes fondamentaux de l'économie et de la gestion. Au fur et à mesure, des jeunes plus nombreux en retireront une meilleure sensibilisation à l'économie et au monde de l'entreprise.

S'agissant de la voie professionnelle, nous ne pouvons que souscrire à la volonté de conférer au baccalauréat ses lettres de noblesse. Nous avons donc soutenu la réforme du baccalauréat, tout en l'assortissant d'un certain nombre de réserves, notamment relatives à l'apprentissage.

Force est de constater que les entreprises s'engagent difficilement dans la signature d'un contrat d'apprentissage sur trois ans. Dans le cadre de l'établissement de la carte de formations, un travail de fond permettrait de cerner des ajustements permettant une meilleure complémentarité entre la voie scolaire et l'apprentissage.

En conclusion, il convient de saisir concrètement les opportunités engendrées par la loi du 24 novembre 2009 relative à l'orientation et à la formation. Ainsi, le service public de l'orientation offre l'occasion, pour le système éducatif et le monde des entreprises, de travailler ensemble autour d'un objectif partagé.

Longtemps, les partenaires sociaux se sont penchés de façon exclusive sur les questions liées à la formation professionnelle continue. Cependant, au-delà de ses finalités vis-à-vis des salariés, des demandeurs d'emploi et des publics en difficulté, la formation professionnelle continue s'avère étroitement liée à la qualité de la formation initiale. Dès leur accord, les partenaires sociaux ont souhaité approfondir cette problématique. La jeunesse constitue, bien sûr, un enjeu considérable dans les négociations en cours. D'ores et déjà, les partenaires sociaux se sont penchés sur la question de l'accompagnement des jeunes vers l'emploi, et notamment celui des « décrocheurs ».

Enfin, un autre élément, à ce stade, passe quasiment inaperçu. Dans les semaines à venir, un Plan régional de développement des formations (PRDF) sera signé dans chaque région. Au cours des derniers mois, cette perspective a fourni l'occasion d'échanges extrêmement denses entre l'ensemble des acteurs, qu'il s'agisse de l'État, des conseils régionaux, des partenaires sociaux et des organisations économiques. Il conviendra de porter une grande attention à l'aboutissement de ces différents contrats. Une évaluation sera nécessaire pour construire un diagnostic partagé permettant d'améliorer ce dispositif. En tout cas, il s'agit d'une occasion unique d'approfondir le partenariat entre les différents acteurs.

Globalement, un consensus se dégage sur la nécessité de développer les formations en alternance. Des potentialités considérables s'ouvrent pour favoriser l'entrée dans l'emploi. De notre point de vue, le baccalauréat professionnel est conçu prioritairement pour favoriser l'insertion professionnelle dans les entreprises même si la poursuite des études n'est pas exclue, dans certains cas. En revanche, un débat soutenu est nécessaire au sujet de l'articulation entre l'éducation nationale (voie générale, voie technologique ou voie professionnelle) et l'enseignement supérieur. Nous intégrons à ce débat les BTS, les DUT, les licences professionnelles et la nouvelle licence.

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