Ensuite, la commission a procédé à l'examen du rapport pour avis de M. Ambroise Dupont sur le texte de la commission des finances pour le projet de loi n° 29 (2009-2010), adopté par l'Assemblée nationale, relatif à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne.
a rappelé que le droit des paris, des courses et des jeux s'insérait dans un cadre législatif stable fondé sur la restriction de l'offre afin de préserver la sécurité et la santé publiques. Plusieurs dérogations successives ont été cependant apportées au régime de prohibition organisé par la loi du 21 mai 1836 et réitéré par la loi du 12 juillet 1983. La loi de finances pour 1933 a autorisé la mise en place d'une loterie nationale, et la loi de finances pour 1985 les paris sportifs. La Française des jeux, société anonyme contrôlée par l'Etat, en détient toutefois le monopole.
Il a souligné que parallèlement, la loi du 2 juin 1891 réglementait les courses de chevaux et confiait l'organisation des paris, restreints à la seule forme mutuelle, aux sociétés mères du trot et du galop agréées par le ministre de l'agriculture. Les sociétés de courses ont constitué un groupement d'intérêt économique, le Pari mutuel urbain (PMU), dont l'intégralité du résultat leur est reversée afin de financer la filière équine.
Cette organisation juridique, pensée pour les points de vente physiques de la Française des jeux, du Pari mutuel urbain et des hippodromes (jeux dits en dur), est fragilisée par la prolifération de sites de paris en ligne illégaux mais de fait très aisément accessibles, les clients français s'y pressant déjà pour des mises annuelles estimées à deux milliards d'euros.
a indiqué que des fraudes aux moyens de paiement, des opérations de blanchiment de capitaux et le développement de comportements addictifs étaient avérés. L'adaptation du cadre législatif, pour tenir compte des nouvelles modalités de jeu offertes par Internet, est dictée par le souci de préserver l'ordre public et social. À bien des égards, le projet de loi tente de refermer un marché de facto ouvert et soumis à la concurrence la plus sauvage.
a attiré l'attention sur le fait que le droit communautaire n'imposait aucune reconnaissance mutuelle des opérateurs légalement installés dans un pays de l'Union, au nom du principe de la libre prestation de services. Cependant, les mesures de régulation devaient être justifiées par des motifs d'intérêt général, proportionnées et exemptes de tout caractère discriminatoire.
a estimé que le projet de loi reposait sur une idée simple et pragmatique : organiser une offre de jeux en ligne légale, nettement délimitée et bien contrôlée afin d'assécher l'offre illégale.
Le nouveau marché des paris hippiques et sportifs et du poker en ligne sera contrôlé par une autorité administrative indépendante, dénommée Autorité de régulation des jeux en ligne (ARJEL). Elle aura la charge d'agréer les opérateurs sur la base d'un cahier des charges précis tendant à assurer la transparence des transactions financières et à prévenir le jeu excessif. De plus, elle pourra sanctionner les manquements des opérateurs agréés à leur cahier des charges et solliciter du juge des référés la fermeture de l'accès aux sites d'opérateurs illégaux.
a indiqué que la fiscalité sur les jeux était remaniée dans le souci de concilier le maintien des recettes de l'Etat et l'efficacité économique, les prélèvements devant rester suffisamment attractifs et compétitifs pour inciter les plus gros opérateurs à légaliser leur offre. Des retours sur recettes sont prévus à destination notamment du Centre des monuments nationaux et du Centre national pour le développement du sport. La redevance en faveur de la filière équine, assise sur les paris hippiques en ligne, trouve également une consécration législative.
a souligné que le texte, clarifié et enrichi par la commission des finances, lui apparaissait réaliste et équilibré.
Sa propre réflexion s'est articulée autour de quatre axes :
- assurer la pérennité de la filière équine, qui représente près de 90 000 emplois répartis sur l'ensemble du territoire français. Il lui a semblé important de différencier la fiscalité sur le pari hippique et sur le pari sportif en réduisant la taxation des paris hippiques, qui doivent rester concurrentiels par rapport aux paris sportifs. L'écart entre ces deux prélèvements, lié à l'importance de la redevance en faveur de la filière équine, se répercute en effet sur les taux de retour au joueur, ce qui risque d'inciter les adeptes du pari hippique à s'orienter vers le pari sportif et d'assécher par contrecoup les ressources de la filière équine ;
- accroître les ressources destinées à la lutte contre le dopage par un relèvement des prélèvements sur les paris sportifs ;
- renforcer l'indépendance et les pouvoirs de l'autorité de régulation. L'octroi de la personnalité morale lui permettrait, sur le modèle de l'Autorité des marchés financiers, de gagner une pleine capacité juridique et d'asseoir sa crédibilité vis-à-vis des opérateurs. Afin de lutter contre l'offre illégale, il est proposé de lui conférer le pouvoir d'ordonner directement le blocage des sites, sans l'intermédiaire du juge des référés ;
- prévoir une période transitoire, dans l'hypothèse qui ne peut être écartée, que l'ensemble du dispositif ne soit pas opérationnel avant le début de la coupe du monde de football en juin 2010. En effet, les opérateurs ne passeront pas à côté de cet événement, qu'ils soient agréés ou pas. Tout retard dans l'application de la loi favoriserait donc l'offre illégale au détriment de l'offre légale présente et future. Les positions acquises sur le marché à l'issue de la coupe du monde détermineront pour longtemps la structure concurrentielle du marché des paris en ligne. C'est pourquoi il semble utile de retenir un régime d'autorisation provisoire, le temps du traitement de la demande d'agrément par l'ARJEL, au profit des opérateurs légalement installés dans un pays de l'Union et respectant par avance le cahier des charges prévu par le projet de loi.
Un débat s'est ensuite engagé.