Intervention de André Dulait

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 9 avril 2008 : 1ère réunion
Défense — Emplois réservés - examen du rapport

Photo de André DulaitAndré Dulait, rapporteur :

a tout d'abord rappelé que les emplois réservés désignaient un mode d'accès à la fonction publique, dérogatoire à la règle du concours, ouvert par ordre de priorité aux invalides de guerre et à leurs ayants droit, aux militaires réformés, ainsi qu'aux militaires et aux anciens militaires. Leur nombre est déterminé par l'application d'un pourcentage sur les flux de recrutement dans des corps et cadres d'emplois énumérés par une liste limitative. Les candidats doivent passer un examen professionnel correspondant au corps souhaité. Ils choisissent alors deux départements d'affectation. Après examen des vacances de postes prévisibles, le ministre chargé des anciens combattants prend un arrêté répartissant le nombre de postes par département. En fonction des résultats de l'examen, pondérés notamment par l'ancienneté, les candidats sont inscrits sur une liste de classement à concurrence du nombre de postes fixé par l'arrêté de répartition ; ils y demeurent jusqu'à l'obtention d'un emploi. Les candidats qui n'ont pu être classés conservent le bénéfice de leur examen pendant deux ans. Au fur et à mesure des vacances de poste, les personnes figurant sur la liste de classement sont affectées dans l'ordre de la liste sans que l'administration d'accueil ne puisse se prononcer sur le profil de la personne qu'elle recrute.

a indiqué que les blessés en campagne de guerre et les personnes prioritaires n'avaient représenté qu'une trentaine de dossiers au cours des quinze dernières années. Compte tenu de ce faible volume, ces personnes font l'objet d'un traitement personnalisé et ne rencontrent pas de difficulté particulière. Il a en revanche observé que le dispositif peinait à offrir un véritable débouché pour les militaires en reconversion et souffrait d'une désaffection partagée tant des candidats que des administrations. Il a souligné qu'en conséquence le dispositif était largement sous-utilisé : sur les 3 544 postes théoriquement disponibles, 2 922 avaient été rendus aux administrations en 2005. En 2006, le nombre des reclassements s'est établi à un niveau historiquement bas avec 381 personnes effectivement nommées. Il a rappelé que le dispositif dit « loi 70-2 » qui permet à des militaires d'accéder à la catégorie A par la voie du détachement, traditionnellement plus sélectif, avait permis, pour la même année, de reclasser 250 personnes.

a souligné qu'à l'examen de ces chiffres une réforme s'imposait clairement pour trois raisons principales : l'ancienneté du dispositif, qui, conçu après la première guerre mondiale, n'a jamais été véritablement réformé, l'importance prise par la question de la reconversion, ainsi que l'ampleur annoncée des suppressions de postes qui rend indispensable de mobiliser l'ensemble des instruments de reconversion.

a souligné que le projet de loi consistait d'abord en une actualisation. Il élargit le champ des bénéficiaires prioritaires pour l'étendre à toute personne atteinte dans son intégrité physique, alors qu'elle se trouvait au service de la collectivité, qu'il s'agisse de professionnels, d'élus, ou encore de personnes que la jurisprudence désigne comme des collaborateurs occasionnels du service public.

L'accès est ouvert aux militaires servant à titre étranger. Le champ des ayants droit est également élargi et ne concerne plus seulement les veuves, mais aussi les concubins, partenaires de PACS, et personnes ayant à charge l'enfant d'une personne blessée ou décédée en service.

Le texte élargit le champ des emplois réservés en substituant à une liste limitative un principe général d'ouverture de tous les corps et cadres d'emploi de catégorie B et C. Il ouvre l'accès à la fonction publique territoriale et à la fonction publique hospitalière. Enfin, le projet de loi assouplit les conditions de fonctionnement du dispositif en matière de choix d'affectation, de limite d'âge ou de délai. Le délai de quatre ans minimum de service pour l'accès des militaires sera en revanche maintenu par voie réglementaire.

a ensuite rappelé que le projet de loi marquait l'aboutissement d'un long processus, les premières concertations ayant été engagées en 2003. Il a souligné qu'entre son premier dépôt à l'Assemblée nationale, en 2006, et son examen par le Sénat, des évolutions très importantes étaient intervenues, tant pour ce qui concerne les militaires que pour la fonction publique. La réflexion et la concertation interministérielles se sont poursuivies et la réforme proposée par le Gouvernement devrait être modifiée de façon substantielle par voie d'amendements. Il est ainsi envisagé une réforme beaucoup plus large des modes d'accès avec la suppression de l'examen professionnel et des listes de classement au profit d'un mécanisme qui emprunte à la fois à la reconnaissance des acquis de l'expérience professionnelle et aux procédures de nomination de la fonction publique territoriale. Le dispositif de reconversion des armées fournirait à chaque candidat un passeport professionnel permettant aux administrations d'apprécier son profil. Les candidats seraient ensuite inscrits par ordre alphabétique sur une liste régionale ou nationale. Les administrations ne seraient plus obligées de recruter dans l'ordre de la liste et le candidat ne serait plus tenu d'accepter la proposition qui lui est faite. Seule la caducité des listes lui serait opposable : deux ans sur une liste régionale, suivis d'un an sur une liste nationale, soit trois ans au maximum.

a souligné que l'incitation des administrations à recruter était renforcée par l'article L-407 proposé par le projet de loi qui prévoit qu'elles ne peuvent remettre directement au concours les postes non pourvus, mais qu'elles doivent les proposer à d'autres publics prioritaires, notamment aux personnes handicapées.

Il a considéré que ces modifications étaient positives et qu'elles allaient davantage dans le sens des intérêts partagés entre les administrations et les candidats.

Il a indiqué qu'il proposerait pour l'essentiel d'apporter trois modifications à ce texte. Il a estimé que, dans l'équilibre du nouveau dispositif, les militaires réformés devaient rejoindre la catégorie des personnes prioritaires et ne plus faire l'objet d'une catégorie spécifique. En second lieu, il a proposé d'exclure du dispositif les militaires radiés des cadres ou ayant fait l'objet d'une résiliation de contrat pour motif disciplinaire. Enfin, il a considéré qu'après le dépôt des amendements annoncés par le Gouvernement, rien ne justifierait désormais, dans le nouveau dispositif, tel qu'il sera proposé au Sénat, de restreindre l'accès par la voie des emplois réservés aux seules catégories B et C. Il a précisé que le projet de loi relatif à la mobilité et aux parcours professionnels, soumis à l'examen du Sénat, prévoyait quant à lui l'accès des fonctionnaires à tous les corps militaires par la voie du détachement.

Il a considéré qu'à terme, il serait logique de rapprocher le dispositif des emplois réservés de celui dit de la loi 70-2 au profit d'un mécanisme unique de mobilité des militaires vers la fonction publique. Il faudrait alors réserver un mécanisme spécifique aux personnes prioritaires qui relèvent fondamentalement d'une autre logique, celle de la solidarité nationale.

a indiqué que le projet de loi comportait par ailleurs cinq articles n'ayant pas trait au dispositif des emplois réservés.

Il a noté que le plus substantiel était l'article 6, qui permet de recruter directement en catégorie B dans le corps des secrétaires administratifs du ministère de la défense, sans concours et sans passer par les emplois réservés, les conjoints des personnels civils et militaires de la défense, dont le décès est en relation avec l'exercice de leur fonction. Cette possibilité existe actuellement pour la catégorie C. M. André Dulait, rapporteur, a considéré que cette disposition était très dérogatoire, si on considérait le caractère extrêmement sélectif de ce type de concours, mais qu'elle permettait à la défense de réagir très vite face à des situations dramatiques.

Il a indiqué que deux articles étaient relatifs au contentieux de droits accessoires au droit des pensions militaires d'invalidité. Il a précisé qu'il proposait deux amendements pour transférer aux juridictions des pensions le contentieux de l'appareillage pour tenir compte d'une jurisprudence récente du Conseil d'Etat.

Il a estimé, en conclusion, que le projet de loi représentait un pari sur la rénovation d'un dispositif qui nécessiterait la mobilisation de tous les acteurs dans un contexte de maîtrise de l'emploi public. Il a toutefois souligné que le non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux n'impliquait pas l'arrêt de tout recrutement.

Il a également considéré qu'il était nécessaire de modifier l'intitulé du dispositif au profit d'une appellation plus attractive et qui fasse moins penser aux candidats qu'un emploi leur est « réservé » dans une administration, mais qu'ils entament une nouvelle carrière après avoir servi une première fois l'Etat au sein des armées.

Il a recommandé l'adoption du projet de loi assorti des amendements proposés.

Un débat a suivi l'examen du rapport.

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