Intervention de Louis Gallois

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 9 avril 2008 : 1ère réunion
Industrie de défense — Audition de M. Louis Gallois président-directeur général d'eads

Louis Gallois, président-directeur général d'EADS :

En réponse à ces interventions, M. Louis Gallois a apporté les précisions suivantes :

- s'agissant de l'A400M, les cinq motoristes qui en sont en charge paraissent désormais avoir repris le contrôle des difficultés rencontrées sur le développement du moteur ; il en est de même pour les problèmes propres à EADS. La livraison de moteurs en état de vol est programmée en vue d'un premier vol de l'A400M avant la fin de l'été ; le retard sur le programme est toujours évalué entre 6 mois et un an. Les étapes clés sont : les essais en vol, l'intégration des systèmes militaires à l'avion, puis la qualification et la certification par les différents pays parties au programme, qui n'ont pas tous les mêmes impératifs calendaires ;

- la baisse du dollar est particulièrement pénalisante pour Airbus, dont les coûts sont en euros alors que ceux de son concurrent - Boeing - sont en dollars ; l'actuelle parité euro/dollar a pour effet de laminer les marges des industries exportatrices, ce qui ne permettra pas de maintenir leur capacité de recherche et d'innovation ; elle constitue une puissante incitation à délocaliser la production et la sous-traitance dans des pays à bas coûts ou situés en zone dollar ;

- le système intérimaire de drones Male (SIDM) est déployé à Mont-de-Marsan depuis l'automne dernier et a achevé ses vols de qualification sur cette base ; l'entrainement des personnels de l'armée de l'air a commencé. Le programme de drones de surveillance « Advanced UAV » fait actuellement l'objet d'un programme d'évaluation et de réduction des risques ; en l'attente de l'aboutissement de ce dernier, prévu à l'horizon 2015, les armées souhaitent couvrir leurs besoins en matière de surveillance, par une solution intermédiaire. SIDM demeurant la solution nominale dans le cas d'un calendrier court pour AUAV. En cas de retard, les armées pourraient être tentées par d'autres solutions intérimaires. Dans cette hypothèse, EADS serait ouvert à une coopération avec Dassault Aviation sur une solution qui devrait naturellement s'appuyer sur l'expérience et les investissements réalisés pour SIDM. Il n'y a pas de concurrence directe entre les activités actuelles de Dassault, orientées vers les drones de combat avec le programme Neuron, auquel participe EADS par sa filiale espagnole, et celles d'EADS dans le cadre du programme « Advanced UAV » ;

- en ce qui concerne les programmes d'armement, M. Gallois rappelle à nouveau que la DGA ne peut se réduire à une simple centrale d'achats ; elle doit intégrer la perspective industrielle, la recherche et le soutien à l'exportation ;

- les programmes menés en coopération comportent un fort risque de course excessive à la technologie, par accumulation des spécifications émises par chaque état-major ; aussi bien la coopération doit-elle être orientée et conduite par des organes forts, tels que l'Agence européenne de défense et l'OCCAR ;

- l'obtention du contrat des avions ravitailleurs pour l'armée de l'air américaine par Northrop Grumman associé à EADS, après le contrat gagné par Eurocopter pour le Light Utility Helicopter et les avions CASA pour les Coast Guards, constitue effectivement un tournant stratégique pour EADS, car il est difficile de s'imposer comme acteur industriel majeur dans le domaine de la défense sans être présent sur le marché américain des équipements militaires, qui représente plus de la moitié du marché mondial de l'armement ; il faut rappeler que la réalisation de ce contrat créera des emplois des deux côtés de l'Atlantique. Mais pour être reconnu sur le marché américain de la défense il faut être présent industriellement dans ce pays, Northrop Grumman a reçu du département américain de la défense notification du contrat, puis de son gel, compte tenu du recours introduit par Boeing devant le General Accounting Office, équivalent américain de la Cour des comptes. Ce recours ne porte que sur la régularité de la procédure ; il y a lieu de rester confiant sur son issue, compte tenu des précautions prises par les autorités américaines pour cette mise en concurrence qui faisait suite à une précédente annulation du même ordre ;

- il est important que les nouveaux pays membres de l'Union européenne prennent conscience de leur intérêt à participer à l'effort européen dans le domaine de la défense ;

- la procédure conduite par l'AMF est engagée depuis déjà deux ans. Jusqu'à présent, elle n'a pas été contradictoire ; elle va le devenir dès lors que la Commission des sanctions de l'AMF a été saisie. M. Gallois a déploré des fuites renouvelées qui déstabilisent l'entreprise EADS. EADS souhaite que la procédure se déroule dans le plein respect de la présomption d'innocence ;

- Astrium et Thales Alenia Space sont concurrents mais peuvent aussi coopérer sur des programmes spatiaux ; la coexistence de deux acteurs industriels en Europe n'est pas nécessairement synonyme d'une concurrence négative ; il y a des arguments pour et contre, à juger au niveau de la concurrence mondiale. L'Agence spatiale européenne souhaite, quant à elle, éviter une situation de monopole en Europe ;

- le progrès technologique ne doit pas être considéré comme un risque pour le développement et le financement des programmes d'armement ; il importe en revanche d'éviter l'addition inutile de technologies, en ajustant au mieux les spécifications aux besoins et en renforçant l'évaluation et la réduction des risques technologiques ;

- la densification du tissu industriel des petites et moyennes entreprises est nécessaire dans le domaine de la défense ; ces entreprises ont bien entendu pleinement vocation à profiter d'un renforcement de l'effort de recherche ; EADS est disposée à travailler davantage avec les PME qui ont elles-mêmes intérêt à travailler en réseau, comme leur en donnent l'occasion les pôles de compétitivité qui se sont mis en place dans les régions ces dernières années. Il ne faut toutefois pas oublier que la pérennité des PME est indissociable de celle de leurs donneurs d'ordre industriels.

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