Puis la commission a procédé à l'examen du rapport spécial de M. Michel Charasse, rapporteur spécial, sur la mission « Aide publique au développement » et les comptes de concours financiers « Prêts à des Etats étrangers » et « Accords monétaires internationaux ».
a tout d'abord indiqué que la situation de l'aide publique au développement (APD) de la France était aujourd'hui bien différente de celle dont il avait pu rendre compte l'année précédente. L'APD française, telle qu'elle était notifiée au Comité d'aide au développement (CAD) de l'OCDE, avait en effet suivi une progression régulière entre 2002 et 2006, mais ne respecterait pas les objectifs fixés en 2002 par le Président de la République, avec une part prévisionnelle du revenu national brut (RNB) de 0,43 % en 2007 et de 0,45 % en 2008, loin de l'objectif de 0,50 %. Il a considéré que le respect des objectifs de 0,7 % du RNB, reporté de 2012 à 2015, devenait difficile, et que cette inflexion de l'APD française s'inscrivait dans une tendance internationale, caractérisée par une diminution de l'APD des Etats membres de l'OCDE en 2006, pour la première fois depuis dix ans.
Il a ajouté que selon les prévisions établies pour 2008, les annulations et refinancements de dettes représentaient le quart de l'APD de la France, et l'aide multilatérale, 31 %. Cette aide consistait notamment en des contributions au Fonds européen de développement (FED) au Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme et à de multiples banques et fonds de développement. Il a estimé qu'une part importante de l'APD ne se traduisait pas par des actions sur le terrain et paraissait donc artificielle.
a rappelé que les normes de notification de l'aide au CAD étaient distinctes de l'impact sur le budget de l'Etat. Ainsi les crédits de paiement de la mission « Aide publique au développement » représenteraient en 2008 la moitié des crédits des 15 programmes concourant à l'APD et 35 % de l'effort global d'APD au sens du CAD. Il a ajouté que le document de politique transversale améliorait la lisibilité de l'aide, mais que l'ensemble demeurait complexe, et que certaines explications étaient insuffisantes, voire quasi inexistantes, en particulier sur la comptabilisation de l'écolage et de l'aide aux réfugiés.
Il a jugé que certaines dépenses ne relevaient guère de l'APD, telles que celles relatives à la francophonie multilatérale ou aux contributions à trois fonds de sécurité nucléaire, et que d'autres dotations pourraient être transférées entre programmes budgétaires ou mieux mises en valeur. Il a mentionné, à cet égard, la dépense fiscale correspondant aux dons faits aux ONG humanitaires, qui n'était pas prise en compte dans la mission « Aide publique au développement », la recherche pour le développement et l'indemnisation de l'Agence française de développement au titre de ses dons pour l'aide-projet.
Il a précisé que l'aide française recourait de façon croissante aux opérateurs publics, tels que l'AFD, CulturesFrance, CampusFrance, ou les groupements d'intérêt public « Assistance pour le développement des technologies économiques et financières » (ADETEF) et France coopération internationale (FCI). Il a considéré que l'AFD devrait être considérée comme un opérateur au sens de la LOLF, ainsi que l'avaient recommandé le Comité interministériel d'audit des programmes et la Cour des comptes. Il a ajouté que l'indispensable réforme des opérateurs se poursuivait, notamment au sein de CulturesFrance, mais que la négociation des conventions d'objectifs et de moyens s'étirait dans le temps. Il a estimé que ce recours accru aux opérateurs plaidait en faveur d'un recentrage de la direction générale de la coopération internationale et du développement (DGCID) sur sa vocation.
a constaté qu'un réel effort de pilotage et de coordination de l'aide avait été accompli depuis 2 ans, mais que les documents-cadres de partenariat n'étaient pas exempts d'ambiguïtés, ainsi qu'il l'avait relevé dans le rapport d'information faisant suite à ses contrôles budgétaires en Afrique australe et en Asie du sud-est. Il a ajouté que l'impact concret de la LOLF sur la gestion des services de coopération et d'action culturelle (SCAC) progressait trop lentement, mais a pleinement approuvé la mise en place, début 2008, d'un logiciel unique de programmation et de suivi des crédits, en remplacement des quatre applications informatiques actuelles.
Il a également jugé nécessaire de poursuivre les fusions de centres culturels et d'alliances françaises dans les grandes villes, voire, à terme, de les regrouper avec certains SCAC de faible effectif. Il s'est toutefois interrogé sur les raisons de la création d'un centre culturel à Abuja, capitale du Nigeria, après qu'eut été supprimé celui de Lagos, ville la plus importante de ce pays.
Abordant plus spécifiquement la mission « Aide publique au développement », il a rappelé qu'elle comportait désormais trois programmes, avec la création du programme « Codéveloppement » géré par le ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. La mission était dotée de 3,1 milliards d'euros de crédits de paiement, en léger recul par rapport à la dotation pour 2007.
Le nouveau plafond d'emploi de la mission, intégralement imputé sur le programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement », comportait 2.873 équivalents temps plein travaillés, correspondant à la suppression de 110 ETPT en application du contrat de modernisation du ministère des affaires étrangères et européennes (MAEE).
Il a ensuite formulé les principales observations suivantes sur le programme 110 « Aide économique et financière au développement » :
- les deux tiers des crédits étaient affectés aux contributions à de multiples institutions et fonds multilatéraux ;
- la justification au premier euro du programme avait été enrichie, mais comportait encore de réelles imprécisions et lacunes, en particulier sur les modalités de rémunération de l'AFD et de bonification de ses prêts à l'outre-mer, et sur le financement de la Facilité financière internationale en faveur de la vaccination (IFFIm) ;
- la France était aujourd'hui très visible au sommet des grandes institutions économiques internationales, telles que le Fonds monétaire international (FMI), la Banque européenne de reconstruction et de développement, l'Organisation mondiale du commerce et la Banque centrale européenne, mais demeurait insuffisamment représentée dans l'encadrement de la Banque mondiale et du FMI ;
- les estimations à moyen terme, sur la période 2008-2010, de couverture des engagements sur le programme 110 laissaient prévoir une couverture insuffisante, qui ne pourrait être résorbée que par une hausse substantielle des crédits de paiement et une diminution des nouvelles autorisations d'engagement.
Puis, sur le programme 209 « Solidarité à l'égard des pays en développement », M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a formulé les observations suivantes :
- la justification au premier euro était complète ; les actions du programme avaient été reformatées et permettaient désormais d'identifier de manière beaucoup plus lisible les grands axes du programme ;
- un nouvel indicateur de la performance du FED avait été très opportunément intégré. Il pouvait néanmoins être amélioré et complété par un indicateur analogue sur le Fonds mondial de lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme ;
- l'aide multilatérale était prépondérante dans le programme avec 56 % des crédits de paiement, mais l'aide-projet n'apparaissait pas pour autant « sacrifiée », puisque les crédits de paiement s'inscrivaient en hausse de 9,4 %. L'AFD était désormais le principal opérateur de cette forme d'aide depuis l'achèvement des transferts à son profit de projets du Fonds de solidarité prioritaire ;
- le prélèvement sur le résultat de l'AFD pour compenser la pénurie budgétaire se pérennisait et s'amplifiait, puisqu'il devait atteindre 246 millions d'euros en 2008. A cet égard, M. Michel Charasse, rapporteur spécial, et M. Jean Arthuis, président, ont déclaré partager les interrogations du Comité interministériel d'audit des programmes (CIAP) sur la conformité de cette pratique aux principes budgétaires, dans la mesure où elle s'apparentait à une contraction de recettes et dépenses. Cette procédure contribuait également à la débudgétisation intégrale des contrats de désendettement-développement, dont les prévisions de décaissements, régulièrement supérieures à l'exécution, étaient fixées à 185 millions d'euros en 2008 ;
- enfin l'amélioration des décaissements du FED restait largement liée au recours à l'aide budgétaire et à des fonds multilatéraux. M. Michel Charasse, rapporteur spécial, a estimé qu'elle pourrait donner lieu - si aucun accord politique n'intervenait - à une importante sous-budgétisation de la contribution française en 2008, qu'il évaluait, au minimum, à 60 millions d'euros. Il a ajouté qu'un effort de sincérité budgétaire avait, en revanche, été accompli sur les dotations au Fonds français pour l'environnement mondial et à l'aide budgétaire post-conflit et de sortie de crise.
Il a également considéré que la création du nouveau programme 301 « Codéveloppement » était conforme à ses voeux et opportune, car elle traduisait, malgré le volume modique de ses crédits, une priorité du gouvernement. Il a formulé quelques remarques sur les indicateurs de performance, et recommandé plus particulièrement la création d'un nouvel indicateur, complémentaire de l'évaluation de la dépense fiscale et dédié aux résultats du compte et du livret d'épargne pour le codéveloppement.