Intervention de Brigitte Gonthier-Maurin

Réunion du 28 octobre 2008 à 10h00
Questions orales — Délocalisation des personnels de la statistique publique

Photo de Brigitte Gonthier-MaurinBrigitte Gonthier-Maurin :

Le 2 septembre dernier, le Président de la République a annoncé à une délégation d’élus de Moselle, inquiets des conséquences économiques et sociales des fermetures de casernes, la délocalisation d’un millier d’emplois publics pour créer un pôle statistique à Metz.

Cette décision, prise sans concertation et annoncée par voie de presse, inquiète fortement les personnels et les élus. Dans mon département, les Hauts-de-Seine, les agents de l’Institut national de la statistique et des études économiques, l’INSEE, à Malakoff et du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, le MEEDAT, à La Défense sont concernés.

Quinze jours plus tard, le Premier ministre a adressé une lettre de mission au directeur général de l’INSEE et au vice-président du Conseil national de l’information statistique, qui doivent lui proposer, avant le 30 novembre prochain, les contours, les effectifs et l’organisation d’un pôle de la statistique, avec un chiffre imposé : délocaliser mille cinq cents emplois publics d’ici à la fin de l’année 2011.

L’objectif notamment fixé à cette réforme est de « préserver la qualité du service statistique public ». Ma crainte, comme celle des personnels, est que cette démarche n’aboutisse au contraire à l’affaiblir, en déstructurant son organisation actuelle.

De quoi parlons-nous ? La statistique publique française compte un peu plus de 8 000 agents, dont les deux tiers se trouvent en région. Elle est donc déjà largement déconcentrée.

Ce n’est pas le choix de Metz qui pose problème. S’il s’agissait d’y créer une nouvelle implantation locale, en recrutant des agents, pour répondre aux sollicitations grandissantes des élus locaux du fait de la décentralisation, les personnels et leurs organisations s’en féliciteraient.

Mais le transfert, décidé dans la précipitation, d’une partie non négligeable des agents, un sur trois pour la région parisienne, fait courir le risque de désorganiser la statistique publique.

Comment ? Vous le savez – de nombreux exemples l’ont montré –, une majorité des agents concernés par une délocalisation choisissent souvent de ne pas partir. Cette proportion atteint parfois jusqu’à 80 %.

Il vous faudrait alors puiser dans le vivier des directions régionales, dans un contexte de départs en retraite – il devrait y en avoir 3 000 d’ici à 2015 – et de non-remplacement d’un départ sur deux, comme l’exige la révision générale des politiques publiques, la RGPP. L’effet sur les implantations locales risque d’être fatal, ce qui aura des conséquences sur toute la chaîne du métier et sur sa spécificité.

Pourtant, le travail de l’INSEE est reconnu internationalement. Il répond notamment à un principe fondamental dans une démocratie : l’indépendance. Ses règles de publication garantissent que les chiffres ne sont pas cachés, même quand ils dérangent.

De ce point de vue, une telle délocalisation est ressentie comme une sanction par les agents.

Je m’interroge donc fortement sur cette décision, qui d’ailleurs rencontre l’opposition des agents à tous les niveaux de la hiérarchie, comme en témoignent leur récent mouvement de grève, la pétition lancée et les interpellations d’élus en région.

Combien cette délocalisation coûtera-t-elle ? Et pour quels bénéfices ? Pourrez-vous garantir aujourd'hui que les missions du système statistique public seront toujours assurées ?

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