Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 28 octobre 2008 à 10h00
Questions orales — Responsabilités dans la disparition d'un militant tchadien des droits de l'homme

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Je souhaite interroger M. le ministre des affaires étrangères sur les conditions de la disparition, le 3 février 2008 à N’Djamena, d’Ibni Oumar Mahamat Saleh, militant des droits de l’homme, responsable politique très important du Tchad, ancien recteur, ancien ministre et docteur en mathématiques de l’université d’Orléans.

Sa disparition a suscité beaucoup d’émotion dans la communauté mathématique mondiale ; de nombreuses personnes se mobilisent sur cette question, en particulier au Sénat, où cinquante sénateurs et sénatrices, appartenant à tous les groupes politiques, ont apporté leur soutien à la cause de ce militant et homme politique.

Comme vous le savez, un rapport officiel a récemment évoqué son décès possible. II s’agit du rapport de la commission d’enquête sur les événements survenus en République du Tchad du 28 janvier au 8 février et leurs conséquences, rendu public le 3 septembre 2008.

Ce rapport indique que ce militant « étant la seule victime à ne pas être réapparue, il est en effet permis de penser qu’il serait désormais décédé : soit en succombant aux mauvais traitements qu’il aurait subis – coups, tortures, manque de soins et de médicaments, etc. –, soit en ayant été assassiné, s’agissant en l’occurrence d’un “assassinat politique” ».

Les investigations concernant la disparition de M. Ibni Oumar Mahamat Saleh ont été menées, au sein de cette commission, par un groupe restreint composé de cinq personnes, dont quatre experts internationaux, qui ont auditionné plus de quarante témoins. Le rapport établit la responsabilité de l’État tchadien dans les termes suivants : « ces disparitions sont survenues au moment où l’armée gouvernementale avait repris le contrôle de la situation dans la ville de N’Djamena. Par conséquent, d’une part ces actes sont imputables à l’État tchadien et [...] il en est de même d’autre part des arrestations et détentions arbitraires et d’enlèvements des personnalités politiques dont il est question dans le rapport ».

Ce rapport estime aussi que « la “preuve parfaite” du sort » de M. Ibni Oumar Mahamat Saleh « sera vraisemblablement impossible à trouver sans une volonté des plus hautes autorités de l’État. L’implication d’un service étatique, en l’occurrence l’armée nationale tchadienne, étant parfaitement démontrée, seule cette volonté de l’État tchadien serait susceptible de permettre la manifestation de la vérité, l’identification des auteurs et leur traduction devant la justice ».

Par ailleurs, les observateurs de l’Organisation internationale de la francophonie, l’OIF, et de l’Union européenne ont considéré, quant à eux, dans une déclaration publique, que « la manifestation de la vérité n’a pu être faite sur certaines affaires, en particulier sur le cas emblématique de la disparition » de cet opposant politique.

Ils « le regrettent et réaffirment leur attachement profond à ce que toute la lumière soit faite sur ces faits graves, estimant que les travaux de la commission d’enquête ne doivent constituer qu’une première étape de cette recherche de la vérité et de la justice ».

J’ajoute un élément nouveau, apparu depuis le dépôt du texte de la présente question. Le 20 septembre 2008, un arrêté a été pris par le gouvernement tchadien. Cet arrêté met en place un sous-comité technique auprès du comité de suivi du rapport d’enquête sur les événements survenus en République du Tchad du 28 janvier au 8 février 2008 et sur leurs conséquences.

J’ai ici la composition de ce sous-comité technique.

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