Je voudrais dire à Thierry Repentin qu'effectivement le programme 177 est sous-budgétisé de manière chronique depuis vingt ans. Le principe de sincérité budgétaire n'est pas respecté ici puisque, chaque année, le Gouvernement prend des décrets d'avance et ajuste les crédits du programme en loi de finances rectificative. Quelque 200 millions d'euros ont ainsi été reportés en cours d'exercice en 2010. Il faut que la loi de finances soit la plus sincère possible. La loi de finances initiale pour 2011 a augmenté les crédits de 8 % mais ces crédits étaient en diminution de 3 % par rapport à l'enveloppe consommée en 2010. Pour 2012 le Premier ministre a récemment pris l'engagement devant le monde associatif d'augmenter de 75 millions l'enveloppe prévue par la loi de finances initiale dès la prochaine loi de finances rectificative pour 2012, qui sera examinée très prochainement par le Parlement. En conséquence, en 2012 on aura, pour la première fois, une enveloppe budgétaire sincère dès le début d'année, qui permettra aux associations d'avoir une visibilité financière réelle.
Vous dites que les aides à la pierre baissent tandis que les niches fiscales augmentent. C'est vrai facialement mais vous oubliez que les aides fiscales sont des aides dites « par génération » : les dépenses se cumulent chaque année. Ainsi, le dispositif de Robien, bien que supprimé, continue d'être alimenté sur le budget de l'Etat. De même, la suppression de la tranche 10 du « PTZ + » représenterait une économie de 58 millions d'euros, mais seulement dans cinq ans. Dernier exemple : si l'on supprimait demain le dispositif « Scellier », qui dure neuf ans, on ne récupèrerait pas dès l'année prochaine un milliard d'euros dans les caisses de l'État mais seulement 110 millions d'euros en moyenne par an.
Certains proposent la suppression des tranches 10 et 9 du « PTZ + ». Je peux comprendre l'argumentaire pour la tranche 10. Mais pas pour la tranche 9, car le plafond de ressources est inférieur au plafond exigé pour l'accès aux logements HLM.
Un décret a récemment encadré le loyer en « Scellier ». Tous les plafonds ont été fixés en dessous du marché pour éviter d'augmenter les prix sur les autres locations.
Le Gouvernement a récemment trouvé un accord avec la Caisse des dépôts et consignations (CDC) pour l'éco-prêt aux organismes HLM. Nous souhaitons en effet respecter les objectifs de la loi du 5 août 2009 dite Grenelle I visant à rénover 800 000 logements d'ici 2020.
Je voudrais rappeler à Alain Fouché que la loi « SRU » a posé l'obligation pour les collectivités territoriales de produire 200 000 logements en dix ans. Ces objectifs ont été atteints : 300 000 logements on été construits. On est donc très largement au-delà de l'obligation légale. Les deux-tiers des collectivités territoriales jouent pleinement le jeu. Le bilan de la loi « SRU » est donc positif. Il ne faut pas juger cette loi uniquement à l'aune des résultats des mauvais élèves. Cependant, à titre personnel, je suis favorable à une hausse des pénalités pour les « très mauvais élèves ».
J'en viens à la taxe sur les organismes HLM. Le Gouvernement souhaite taxer les organismes en fonction de leur potentiel financier. Je voudrais rappeler à cette occasion à Marie-Noëlle Lienemann que le Gouvernement a souhaité dégager 245 millions de ressources nouvelles en activant deux leviers : d'une part la « taxe HLM » pour 175 millions d'euros, d'autre part, la hausse de la cotisation à la Caisse de garantie du logement locatif social (CGLLS) pour 70 millions d'euros. Il est vrai que sur la première partie les offices payent les deux tiers de la taxe et les sociétés anonymes seulement un tiers. Mais globalement, cette enveloppe de 275 millions d'euros sera supportée à 60 % par les sociétés anonymes et 40 % par les offices HLM, ce qui correspond exactement à leurs poids respectifs en termes de production de logements.
S'agissant du financement de la construction, on constate aujourd'hui que le nombre de logements sociaux financés augmente alors que, parallèlement, les aides à la pierre diminuent, ainsi que, en 2011, la participation des collectivités territoriales, alors qu'elle était en forte hausse depuis quelques années. Ceci montre la nécessité de penser un nouveau modèle économique, fondé sur les investissements en fonds propres des bailleurs, que j'ai eu l'occasion d'évoquer lors du dernier congrès de l'Union sociale pour l'habitat (USH).
Pour ce qui concerne le décalage entre les chiffres et la réalité, les standards statistiques sont aujourd'hui fondés, s'agissant du logement social, sur les logements financés, alors qu'on parle, pour le logement privé, de mises en chantier, ce qui reflète mieux la réalité. Il faudrait réfléchir aux évolutions envisageables sur ce sujet. Cela étant, les chiffres sont éloquents. Entre 1978 et 2004, 50 000 logements sociaux étaient financés en moyenne par an (avec un creux à 38 000 en 2001). Depuis 2004, la moyenne est à 100 000, avec des pics à 120 000 en 2009 et 130 000 en 2010. Les prêts locatifs sociaux (PLS) ont été créés par la loi relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU) de 2000 : ne nous reprochez pas, aujourd'hui, leur utilisation ! En outre, en 2001, on comptait 5 009 prêts locatifs aidé d'intégration (PLAI), contre 26 836 en 2010, soit une multiplication par cinq.
Actuellement, 40 % du coût du « PTZ + » porte sur les trois premières tranches : l'effort est donc concentré sur les plus modestes et sur l'accession sociale à la propriété. S'agissant de la TVA à 5,5 %, des discussions sont en cours et je n'ai pas d'éléments à vous communiquer.
J'en viens à la hausse des loyers. Ils ont certes cru de 50 % ces dix dernières années, mais sur les cinq dernières, ils ont augmenté moins rapidement que l'inflation. Le vrai problème vient du décalage grandissant entre la hausse des prix de l'immobilier (deux fois plus rapide que celle des loyers) et celle des loyers. Ainsi, à Paris, les loyers ont augmenté de 2 % l'an dernier, mais les prix de 20 %. Ceci pose un problème d'arbitrage pour les investisseurs privés, puisque la rentabilité locative est plus faible que la rentabilité à la vente. Dans les années 1980-1990, les institutionnels se sont retirés du marché locatif car leur rentabilité locative était à 3,5 % dans le logement et à 5,5 % dans l'immobilier d'entreprise. Il faut penser à cette réalité avant de bloquer les loyers !
La Fondation Abbé Pierre évoque le chiffre de 3,5 millions de mal logés et de 10 millions de personnes « en fragilité de logement ». Une action énergique est menée, en lien avec les services des préfectures, pour aider en priorité les familles à se loger et éviter les drames du type de celui évoqué par Roland Courteau.
Il y a certes 2 millions de logements vacants, mais plutôt situés dans les territoires non tendus : nous comptons par exemple 10 % de vacance à Châlons-en-Champagne. Il n'est pas certain qu'il y ait beaucoup de logements vacants en Île-de-France. Je rappelle que les réquisitions lancées en 2000-2001 ont abouti, sur 100 000 logements identifiés, à moins de 100 réquisitions, du fait, notamment, du mauvais état des logements concernés.
La question des loyers ne doit pas occulter la difficulté principale, qui est l'explosion des coûts du foncier dans les zones tendues et, consécutivement, des coûts de production du logement. C'est un enjeu majeur pour les prochaines années : il faudra remettre du foncier public et non public à disposition pour le logement.