Intervention de Bruno Le Maire

Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire — Réunion du 2 novembre 2011 : 2ème réunion
Loi de finances pour 2012 — Audition de M. Bruno Le maire ministre de l'agriculture de l'alimentation de la pêche de la ruralité et de l'aménagement du territoire

Bruno Le Maire, ministre :

Monsieur le Président, je partage entièrement votre position sur l'alimentation de la planète. Demain, au G20 de Cannes, je défendrai notre plan d'action agricole. Nous devons nous battre pour augmenter la production agricole : celle-ci progresse seulement de 1,5 % tandis que la consommation augmente de 5 % par an. Dans ce contexte, il est urgent de défendre notre production nationale.

Renée Nicoux, la baisse des charges est bien une mesure structurelle. C'est vrai aussi bien pour le travail saisonnier que pour le travail permanent. Outre la reconduction du plan pour le travail occasionnel, la loi de finances prévoit, pour le travail permanent, 210 millions pour diminuer le coût de l'heure de 1 euro. Cette mesure ne touche que les emplois affiliés à la MSA, donc pas l'agro-alimentaire. En fait, tout dépend effectivement du statut des entreprises, s'il est coopératif ou non. L'objectif est de retrouver des marges de compétitivité, mais sans verser dans le dumping social à la manière de l'Allemagne. A chacun de faire un pas : ce serait une bonne chose que nos discussions avec l'Allemagne sur le salaire minimum aboutissent.

S'agissant de la sécheresse, nous avons déjà déboursé 100 millions du Fonds national de garantie des risques agricoles le 15 septembre dernier, en puisant en grande partie dans la réserve de précaution de mon ministère. Le reste sera versé début 2012. Ensuite, les agriculteurs ont reçu un soutien direct avec les 3,7 milliards d'euros au titre des aides de la PAC versés de manière anticipée le 17 octobre.

Nous avons diminué les crédits alloués à la prise en charge des primes d'assurance - de 100 millions d'euros à 75 millions - pour tenir compte des développements du marché. Nous espérions un meilleur taux de couverture ; nous pouvons y parvenir avec les enveloppes prévues.

Voici la répartition des 60 millions d'euros prévus pour le soutien aux filières : 45 millions pour la mise aux normes des bâtiments d'élevage et le secteur laitier, 15 millions pour les plans de performance énergétique et la réorientation professionnelle.

Enfin, oui, nous défendrons le statut des coopératives.

Gérard César, je défends depuis trois ans la réassurance publique. En revanche, les derniers développements dans la zone euro nous compliquent la tâche, l'État se portant déjà garant de la dette grecque. Reste qu'il faut avancer sur ce dossier : c'est la seule solution si nous voulons des outils assurantiels pour l'élevage.

Aucune modification n'est prévue pour le régime des DPA et des DPI. Pour les premières, ce serait prématuré. Ma conviction est que, pour les secondes, des modifications sont envisageables à l'avenir sans léser les agriculteurs.

Le maintien des droits de plantation est un sujet essentiel pour la France. J'ai bon espoir que nous aurons gain de cause. Après tout, j'ai déjà réussi à renverser des majorités européennes sur les questions agricoles depuis trois ans... Hélas, la France avait voté la suppression de ces droits en 2008, ce qui ne nous facilite pas la tâche aujourd'hui.

Enfin, sur la PAC, ma priorité absolue a été de préserver son budget à l'euro près. Nous partions de loin : en octobre 2009, la Commission proposait de le réduire de 30 à 40 %. Nous avons bien travaillé le budget 2014-2020, entre autres avec l'Allemagne. Mais l'on ne saurait jamais être trop vigilant, surtout dans le contexte actuel...

En ce qui concerne la convergence des aides au sein de l'Europe, qui vont de 110 euros en Hongrie à plus de 350 euros en France, je suis favorable à des avancées. En revanche, il n'est pas question de fixer une aide unique par hectare. Un euro n'a pas la même valeur dans une exploitation en Hongrie et en France ! Ensuite, nous devons négocier un délai raisonnable. Achever la convergence des niveaux d'aide à l'intérieur de chaque Etat membre en 2015 est trop court.

Je suis totalement opposé à la libéralisation des marchés agricoles : ce serait une folie ! Je me bats pour la régulation avec des outils très concrets. J'ai obtenu gain de cause sur le principe ; il faut maintenant obtenir de la Commission européenne des modalités concrètes. Oui au « verdissement » de la PAC, mais avec les agriculteurs, non contre eux. « Vous êtes mauvais, vous faites mal et vous allez payer » est un discours parfaitement inutile. Il faut inventer un système simple, incitatif, rémunérateur et revoir le dispositif actuel qui prévoit des pénalités mal perçues.

Odette Herviaux, la réduction des crédits du programme « Sécurité et qualité sanitaire de l'alimentation » correspond à la fin du dispositif sur les farines animales, et la mise en oeuvre des États généraux du sanitaire qui permet de réorienter certaines activités des vétérinaires vers les éleveurs, notamment pour les gestes simples. S'agissant des foyers de contamination, la situation est, pour l'instant, sous contrôle ; la seule inquiétude concerne la tuberculose bovine. Il n'y pas de baisse des crédits pour le marquage : la traçabilité est primordiale pour l'exportation.

J'ai obtenu 20 millions d'euros dans le cadre du Grand emprunt pour la construction de bateaux de pêche moins consommateurs d'énergie, mais également plus sûrs pour les pêcheurs. Toute personne ayant passé deux journées sur un bateau de pêche sait que ce n'est pas l'endroit le plus rassurant de la planète... En ce qui concerne la réforme de la Politique commune de la pêche (PCP), faire fi de l'avis des scientifiques et fixer la réalisation des objectifs d'atteinte du rendement maximum durable en 2015, soit deux ans plus tôt que prévu par la Conférence de Nagoya par pure idéologie revient à désespérer les pêcheurs et tuer certaines pêcheries ! La France s'est opposée vigoureusement aux premières conclusions de la commissaire européenne ; les seuls pays qui sont pour sont ceux qui n'ont pas d'activité de pêche ...

Henri Tandonnet, le plan pour les fruits et légumes correspond à 15 millions d'euros de mesures nouvelles et à 10 millions de redéploiement de crédits. Il comprend donc des mesures à la fois conjoncturelles et structurelles. Je me félicite de l'existence du plan contre la sharka : on y travaillait depuis cinq ans lorsque je suis arrivé au ministère. Mettre tout le monde d'accord n'a pas été une mince affaire. Concernant l'indemnisation pour l'arrachage, l'arrêté du 1er septembre 2011 fixe la clé de répartition suivante : 65 % pour l'État, 35 % pour les professionnels. Son niveau semble suffisant : les manifestations ont complètement cessé depuis cet accord, preuve que le dispositif répond aux attentes.

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