Intervention de Gérard Bailly

Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire — Réunion du 2 novembre 2011 : 2ème réunion
Loi de finances pour 2012 — Audition de M. Bruno Le maire ministre de l'agriculture de l'alimentation de la pêche de la ruralité et de l'aménagement du territoire

Photo de Gérard BaillyGérard Bailly :

Nous abordons la période budgétaire dans un contexte certes marqué par une amélioration dans certains secteurs, tels que le lait, les céréales ou la viticulture, mais la situation reste difficile, en particulier dans le domaine de la viande où l'on est encore loin des 60 à 70 centimes supplémentaires par kilo qui avaient été espérés.

Je ne puis qu'être d'accord avec la priorité que vous donnez à l'installation des jeunes agriculteurs. J'aimerais à ce titre connaître le nombre estimé d'installations en 2011 et le nombre de contrats prévus pour 2012. Je tiens à préciser que, venant de vivre l'installation de mon petit-fils auprès de mes deux fils, j'ai été frappé par le véritable parcours du combattant qu'il faut parcourir. Ainsi, on exige du candidat qu'il dispose de terrain et ce alors même que le domaine sur lequel il s'installe est tout à fait à même de nourrir le nombre de ménages prévu. Est-ce normal ? Je vous passe les tracasseries administratives qui vont de l'obtention de l'agrément, l'adhésion au Groupement agricole d'exploitation en commun (GAEC) et l'octroi de la dotation jeunes agriculteurs (DJA). Pour y arriver, il a fallu appeler la direction départementale des territoires (DDT) quasiment chaque jour pendant deux ans ! Si l'on veut favoriser les installations, n'y a-t-il pas beaucoup de choses à simplifier ? Je me demande s'il existe une seule autre profession dans laquelle l'installation exige autant de formalités et de tracasseries administratives. J'ai appris que MM. Éric Doligé et Jean-Luc Warsmann s'apprêtaient à présenter toue une série de propositions pour simplifier ces procédures et ces contraintes. Je les attends avec le plus grand intérêt.

Par ailleurs, je souhaiterais rappeler l'importance des bâtiments d'élevage, plus particulièrement dans les zones de montagne ; ils constituent un véritable progrès social pour les éleveurs et ne sont pas sans effet sur le bien-être animal dont il est de plus en plus question. Je vous demande, Monsieur le ministre, de veiller avec la plus grande attention à ce que les enveloppes prévues en la matière soient à la hauteur des attentes.

Toujours à propos de l'élevage en montagne et de son maintien, je tenais à vous remercier d'avoir inscrit 248 millions d'euros de crédits au titre des ICHN.

Concernant les questions sanitaires, pourriez-vous nous dire s'il existe encore des stocks de farines animales ? En outre, concernant l'encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), je me demande si les précautions qui sont prises et qui consistent non seulement à faire le test de la maladie mais aussi à procéder à l'élimination de tout matériau à risque spécifié (MRS) ne sont pas, dans une certaine mesure, excessives. Il semble que l'on ait seulement constaté un test positif à l'ESB en 2009 sur des millions de bêtes tuées et pourtant est maintenue l'élimination systématique des MRS est maintenue, ce qui représente une perte de revenus non négligeable. Faut-il continuer à prendre toutes ces mesures, alors que les pays voisins y ont renoncé.

J'ajouterais une autre question en matière d'alimentation. Je partage bien les propos de notre président sur la première mission qui est la nôtre en tant qu'agriculteurs et qui consiste à nourrir l'humanité. On annonce le chiffre de 7 milliards d'être humains aujourd'hui et de 9 milliards en 2050 mais se pose la question des rendements agricoles. Pensez-vous qu'ils vont continuer à progresser ? Je vous le demande car un certain nombre d'évolutions ne semblent pas aller dans ce sens. On peut songer à l'agriculture biologique, bien que je n'ai rien contre le bio en soi. Il en va de même pour l'interdiction des plantes génétiquement modifiées (PGM), alors que je ne suis pas nécessairement un partisan de ce type de cultures. Mais tout cela mis bout à bout finit par peser globalement sur les rendements agricoles. Je prendrai simplement l'exemple de l'exploitation pour laquelle l'octroi d'appellation d'origine contrôlée (AOC) exige un cahier des charges prévoyant pas moins de 99 conditions, comme par exemple la limitation de la production à 4 600 kilos de lait par vache et par an ou 1,3 unité gros bovin (UGB) par hectare. Tout ceci est bien intentionné mais à la fin la production plafonne, et cela ne sert pas l'objectif recherché, par ailleurs, de nourrir l'humanité. Je vous demande donc, Monsieur le ministre, d'être particulièrement attentif aux conséquences du « verdissement » de la PAC, même si je partage entièrement les propos que vous venez de tenir à ce sujet.

Sur un sujet un peu voisin, j'ajouterai que j'étais il y a peu dans les Alpes et j'ai eu à connaître une nouvelle fois de la menace que représentent les prédateurs pour l'agriculture de montagne. J'ai rencontré une éleveuse qui, à la suite d'une attaque de loup, a décidé de vendre ses 240 brebis et de cesser l'exploitation. Si l'on veut nourrir l'humanité, on ne le fera pas, que je sache, avec de la viande de loup ou de lynx ! Là aussi, il faut être cohérent. Vous savez que ce sujet me tient à coeur et j'aurai l'occasion de m'en ouvrir une nouvelle fois à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet.

Enfin, s'agissant de la forêt, je me félicite de l'intérêt pour le bois énergie. Encore faut-il aller le chercher et veiller pour cela au maintien des dessertes forestières. Je vous demande là aussi d'être vigilant sur ce sujet.

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