Il n'est pas facile d'intervenir en dernier car beaucoup de choses intéressantes ont déjà été dites.
S'agissant de la question cruciale de l'alimentation de l'humanité, il convient bien entendu de traiter la question du gaspillage d'un tiers de la nourriture. Mais comment traiter de l'ensemble de ces sujets si une gouvernance mondiale n'est pas mise en place d'une façon ou d'une autre ? Vous avez, Monsieur le ministre, avec vos homologues un rôle important à jouer dans la façon dont ces enjeux doivent être abordés au niveau planétaire.
Certains prétendront qu'il convient de poursuivre dans la voie de l'agriculture intensive pour parvenir à nourrir la population mondiale, mais lorsque l'on observe concrètement ce qui se passe, que constate-t-on ? En Amérique du Sud et notamment au Brésil, des milliers d'hectares de cultures vivrières ainsi que la forêt primaire sont saccagés pour cultiver du soja transgénique destiné à nos animaux. Je ne peux donc absolument pas partager l'opinion de Gérard Bailly sur ces sujets.
Et ce constat vaut pour d'autres parties du monde. Que l'on songe aux terres agricoles africaines rachetées par la Chine, au coton transgénique qui y est aussi produit par les multinationales, à la situation de Madagascar, aux palmiers et oléagineux d'Indonésie utilisées pour nos oléo-carburants au détriment des cultures vivrières de ces pays. Face à ces phénomènes, une gouvernance mondiale est effectivement nécessaire.
S'agissant du porc, je crois que le Bretagne constitue véritablement le laboratoire de ce qu'il ne faut pas faire. Monsieur le ministre, alors que vous évoquiez l'intérêt d'un retour à la prairie naturelle, permettrez-moi de rappeler que ce sont précisément 40 000 hectares de ces prairies naturelles à vocation fourragère qui ont été détruits en dix ans afin de maintenir le potentiel de la production porcine. Cette évolution s'est accompagnée d'une dégradation de la qualité de l'eau, d'un appauvrissement de la terre et d'une croissance des algues vertes, sachant que, sur ce dernier sujet, on se condamne à l'échec en n'abordant la question que sous le seul angle curatif. Comment faire aujourd'hui pour revenir en arrière ?
Quant au projet de nouvelle PAC, j'y trouve des éléments intéressants, tout d'abord dans son esprit général, qui consiste à apprécier l'agriculture d'une façon globale en y intégrant, non seulement la dimension économique, mais aussi l'ensemble de la valeur ajoutée et ce, de façon à assurer des revenus décents. Je rappellerai à cet égard que si, par exemple, l'agriculture bretonne est la première de France, elle est aussi celle qui connaît les revenus d'agriculteurs les plus faibles. Il faut effectivement rémunérer les services environnementaux rendus par l'agriculture, afin d'agir de façon préventive et non seulement curative. Il faut aussi en considérer sa contribution sociétale mesurée par la création d'emplois durables.
Cette nouvelle PAC appelle plusieurs questions de ma part. Quelle est votre position sur l'idée d'accorder 30 % des aides en fonction de critères environnementaux, ce que je trouve pour ma part très intéressant ? Comment envisagez-vous le projet d'instauration d'aides dégressives en fonction des rendements et prenant en compte les emplois créés, ainsi que le plafonnement des aides ?
Enfin, s'agissant du décret du 10 octobre 2011, j'avais compris au contraire qu'il relâchait les contraintes pesant sur la pollution des eaux par les nitrates en permettant une augmentation des épandages de 20 %. Qu'en est-il exactement ?