Intervention de Dov Zerah

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 26 mai 2010 : 1ère réunion
Audition de M. Dov Zerah candidat à la direction générale de l'agence française de développement

Dov Zerah :

Je commencerai par vous exposer mon parcours professionnel, en insistant sur les aspects qui justifient ma candidature à la direction générale de l'AFD. Je suis né à Tunis il y a cinquante-cinq ans, mais il m'a fallu attendra ma scolarité à l'ENA pour voyager en Afrique hors de la Tunisie. En 1979 et 1980, un séminaire sur l'urbanisation des pays en voie de développement, portant plus spécialement sur Alger, Abidjan et Dakar, fut pour moi l'occasion de publier un premier article sur ce sujet.

Avant d'être nommé conseiller maître à la Cour des comptes en 2007, j'ai exercé diverses activités. Entre 1981 et 1993, j'ai suivi une carrière classique à la direction du Trésor, jusqu'à en être nommé sous-directeur. Entre 1984 et 1986 je fus attaché financier à la représentation permanente de la France auprès des Communautés européennes, où je m'occupais surtout des questions agricoles et de l'aide au développement : je découvris alors le fonctionnement du Fonds européen de développement et des instances auxquelles participent les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique (ACP).

Entre 1987 et 1991, j'exerçai les fonctions de chef du bureau chargé de la zone franc au ministère de l'Economie et des Finances : je dus alors défendre la parité du franc CFA - c'était avant la dévaluation de janvier 1994. Je procédai aussi à des restructurations bancaires et oeuvrai en faveur de l'intégration régionale. Entre 1991 et 1993, sous-directeur des affaires bilatérales à la direction du Trésor, je fus chargé de la coopération hors champ et des protocoles financiers avec les pays du Maghreb, de la péninsule indochinoise, d'Afrique subsaharienne, d'Amérique latine, ainsi qu'avec le Yemen. Je fus la cheville ouvrière du règlement de nos différends nucléaires avec l'Iran et le Pakistan.

De 1993 à 1999, je fus successivement à la tête du cabinet du ministre de la coopération M. Michel Roussin, de la ministre de l'environnement Mme Lepage et de la commissaire européenne chargée de la recherche Mme Cresson. Entre 1993 et 1995, en tant que directeur délégué de la Caisse française de développement, je négociai l'installation de l'agence Promotion et participation pour la coopération économique (Proparco) au Maroc et au Vietnam. Je siégeais en même temps au conseil d'administration de deux banques de développement en Tunisie.

De 1999 à 2007, j'exerçai des fonctions entreprenariales au service de l'Etat, d'abord, jusqu'en 2002, à la présidence de la Compagnie cotonnière et du groupe Développement des agro-industries du Sud (Dagris), holding d'une trentaine de sociétés implantées en Afrique subsaharienne. Je m'attachai d'abord au rétablissement financier du groupe, dont la valorisation passa en quelques années de 150 à 270 millions d'euros. Je donnai également une nouvelle orientation à l'ancienne Compagnie française des fibres textiles, rebaptisée Dagris : je suis en effet convaincu que le coton joue un rôle de premier plan dans le développement agricole et industriel des pays africains. Je modernisai aussi les modes d'intervention de celle que l'on nommait alors la vieille dame de la rue Monceau... Je développai des actions de coopérations avec l'Algérie, le Maroc, l'Ouzbékistan et la Syrie, et bataillai pour protéger le coton africain contre les subventions accordées par les pays riches à leurs agriculteurs : ce fut l'objet d'un article publié dans Le Monde en juin 2002, sous le titre : « Bono, le Farm Bill et le coton africain ».

Entre 2002 et 2007, à la direction des monnaies et médailles, j'oeuvrai à la restructuration industrielle et économique de ses activités et au développement de ses marchés étrangers : nous fûmes ainsi chargés de frapper les monnaies yéménite et afghane. Je regrette en revanche d'avoir laissé échapper des marchés en Afrique occidentale, au bénéfice des Britanniques.

Enfin, au cours de ces années, j'enseignai à Sciences Po, à HEC et à l'Institut supérieur de commerce où j'animai notamment des séminaires sur l'Afrique et sur les risques économiques et financiers internationaux.

J'en viens aux raisons de ma candidature. En une dizaine d'années, l'AFD a beaucoup changé : ses interventions ont triplé, voire quadruplé, et se sont étendues à de nombreux pays émergents. Des modes de financements innovants ont été inventés, parfois en collaboration avec d'autres bailleurs. L'AFD s'est ainsi imposée comme l'un des principaux acteurs mondiaux du développement : ces progrès doivent être consolidés. J'entends parler d'une distanciation de l'agence vis-à-vis de son autorité de tutelle, mais je crois au contraire qu'elle doit rester son bras séculier. Il faut veiller à ne pas trop étendre le champ géographique de ses interventions, et prendre garde à ne pas nous exposer au rééchelonnement ou à l'annulation de dettes, comme à la fin des années 1990. Je préfère parler de soutien au développement que d'aide : nous devons encourager les projets créateurs de valeur, en particulier dans le domaine agricole et agro-industriel. Prenons l'exemple des trois pays du Sahel, qui compteront 120 ou 130 millions d'habitants en 2050 contre 44 aujourd'hui : l'autosuffisance alimentaire conditionne leur réussite dans les domaines de l'éducation et de la santé. C'est également la seule manière d'endiguer l'exode rural, la désertification des campagnes et, à terme, l'émigration.

J'annonce enfin que si je suis nommé directeur général de l'AFD, je démissionnerai de la présidence du Consistoire de Paris-Ile-de-France.

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