Soulignant que l'Union européenne était actuellement plongée dans les difficultés d'un ralentissement économique mondial majeur et reconnaissant que cette situation pouvait inciter certains à repousser au second plan le passage à une économie sobre en carbone, M. Marcel Deneux, rapporteur, a fait valoir au contraire que cette évolution était indissociable de notre rétablissement économique futur. Les prix élevés du pétrole et du gaz, qui alimentent l'inflation, ainsi que notre dépendance à l'égard de sources d'énergie fortement émettrices de carbone constituent une menace pour la sécurité de notre environnement et celle de notre approvisionnement. L'Union européenne est en mesure de proposer un nouveau cap mondial en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, et il faut combattre le fatalisme ambiant concluant à l'inéluctabilité d'une plus grande insécurité énergétique mondiale.
Considérant qu'une alternative était possible, il s'est déclaré favorable à la diversification des approvisionnements énergétiques et à la mise en place d'une économie sobre en carbone qui permettent non seulement de limiter les émissions de gaz à effet de serre et réduire les tensions inflationnistes, mais encore de créer des emplois dans de nouvelles filières et de doper la croissance économique. Les technologies nécessaires existent ou sont en voie d'émergence. A cet égard, la promotion des énergies renouvelables et le développement des technologies de captage et de stockage du carbone doivent être encouragés si l'on souhaite produire de l'électricité avec un faible taux d'émission de dioxyde de carbone (CO2). La question principale porte sur l'identification des moyens à développer pour accélérer le processus de conversion des économies.
a considéré que la réponse à cette question résidait en grande partie dans les propositions formulées par la Commission européenne le 23 janvier dernier dans son « paquet énergie-climat », élément essentiel pour construire une politique énergétique européenne équilibrée contribuant à la lutte contre le changement climatique. Il a ensuite indiqué que le rapport établi sur la proposition de résolution européenne était le résultat d'un long travail d'investigation du groupe de travail constitué au sein de la commission des affaires économiques qu'il a eu l'honneur de présider. Ce groupe a réalisé près d'une trentaine d'auditions afin de recueillir le point de vue des acteurs concernés par les propositions législatives de la Commission européenne, qu'il s'agisse des opérateurs énergétiques ou des entreprises industrielles, et s'est rendu à Bruxelles afin de prendre connaissance des positions des principaux partenaires européens de la France sur ce dossier sensible.
Il s'est félicité de pouvoir débattre de cette proposition de résolution avant que celle-ci devienne la position officielle du Sénat français sur le « paquet énergie-climat » en application de l'article 88-4 de la Constitution.
Rappelant que le paquet « énergie-climat » se composait de quatre propositions législatives, et s'agissant en premier lieu de la proposition de directive révisant le système communautaire d'échange de quotas d'émission des gaz à effet de serre, il a expliqué que la réforme consistait essentiellement à mettre fin aux disparités constatées aujourd'hui entre les plans nationaux d'allocation des quotas (PNAQ) élaborés par les différents Etats membres et à revenir sur le principe de la gratuité des quotas d'émission pour les producteurs d'électricité à partir de 2013. Pour les autres secteurs industriels soumis à la concurrence internationale, la Commission européenne propose que la part des quotas payants augmente progressivement entre 2013 et 2020 de 20 % à 100 %.
A propos de la proposition de décision sur la répartition de l'effort entre Etats membres pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, il a indiqué qu'elle concernait les secteurs non couverts par le système communautaire d'échanges de quotas de CO2 , à savoir l'agriculture, les transports terrestres, le logement et les bâtiments, les petites installations industrielles et les déchets, en rappelant que ceux-ci représentaient aujourd'hui la moitié des émissions de gaz à effet de serre de l'Union européenne. La Commission européenne propose, d'ici à 2020, de diminuer de 10 % les émissions de ces secteurs par rapport aux niveaux atteints en 2005, et de répartir l'objectif global entre les Etats membres en fonction de leur PIB par habitant, la France se voyant assigner un objectif de réduction de 14 %.
Le troisième texte est une proposition de directive relative au captage de stockage géologique du dioxyde de carbone, fixant un cadre juridique au développement de ces technologies qui représentent un axe essentiel dans la stratégie de lutte contre l'effet de serre.
S'agissant enfin de la proposition de directive relative à la promotion des énergies renouvelables (ENR), M. Marcel Deneux, rapporteur, a rappelé qu'elle proposait de définir un objectif contraignant de 20 % d'ENR dans la consommation globale d'énergie de l'Union européenne d'ici à 2020. Cet objectif global est nationalement réparti selon plusieurs critères, dont le niveau du PIB par habitant ou le potentiel national de développement de ces énergies, et la France se voit assigner un objectif particulièrement ambitieux, mais pas irréalisable, de 23 % d'ENR dans sa consommation finale d'énergie, cette part étant actuellement de 10,3 %.
Au total, l'ensemble de ces mesures devrait, d'ici à 2020, permettre à l'Union européenne de diminuer ses émissions de gaz à effet de serre de 20 % par rapport au niveau atteint en 1990 et l'enjeu de ces propositions est considérable, si les Etats membres souhaitent créer les conditions propices d'une nouvelle révolution industrielle en Europe.
Dans cette perspective, l'Union européenne a besoin d'un marché du carbone efficace permettant aux Etats d'identifier les secteurs les plus rentables pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, le système européen de permis d'émissions (Emission Trading Scheme ou ETS) en constituant le socle et des mécanismes de nature à aider les pays en développement à accéder directement aux énergies faiblement productrices de carbone. Il convient néanmoins de prendre garde aux risques de délocalisation des industries fortement consommatrices d'énergie dans des pays qui ne seraient pas soumis aux mêmes contraintes, ce qui rend absolument nécessaire la mise en place de mécanismes de compensation aux frontières afin de préserver les emplois industriels et la compétitivité européenne.
a ensuite insisté sur la nécessité d'orienter les investissements européens vers des technologies « vertes », estimant que l'édiction au niveau de l'Union de normes ambitieuses concernant le développement des ENR permettant de valoriser les atouts du plus grand marché unique de la planète pour encourager l'innovation. Les énergies renouvelables constituent, non seulement un moyen essentiel pour limiter les émissions de gaz à effet de serre et renforcer notre indépendance énergétique, mais encore un gisement d'emplois dans de nouvelles filières. S'agissant des biocarburants, il est indispensable d'organiser leur développement de manière à éviter tout risque de « conflit d'usage » avec les productions agricoles et alimentaires et d'encourager fortement la recherche et le développement des biocarburants de synthèse.
Enfin, il a souligné que l'Union européenne devait mobiliser toutes les technologies pour atteindre les objectifs ambitieux de réduction des émissions de carbone qu'elle s'est fixés. A cet égard, la technologie de captage et de stockage du CO2 peut constituer une solution de transition dans l'attente d'une conversion possible à l'utilisation d'une électricité produite sans émission de CO2. Le développement de cette technologie doit néanmoins être réalisé sous réserve d'un contrôle strict des risques potentiels qu'elle représente.
Déclarant, par ailleurs, que l'Union européenne serait jugée sur son aptitude à tenir ses engagements pour 2020, M. Marcel Deneux, rapporteur, a considéré que sa capacité à obtenir un accord mondial sur le changement climatique à Copenhague en décembre 2009 dépendrait en grande partie de sa capacité à trouver un accord entre les vingt-sept Etats membres sur ce « paquet énergie-climat ».
En conclusion, il a estimé que les propositions de la Commission européenne contenaient des avancées positives, mais comportaient également des lacunes, et a invité le Gouvernement français à prendre en compte la position du Sénat dans la perspective des négociations qui auront lieu lors de la prochaine réunion du Conseil des ministres de l'énergie les 8 et 9 décembre prochains.