Puis la commission a procédé, sur le rapport de M. Bernard Saugey, à l'examen de la proposition de loi n° 20 (2007-2008), adoptée par l'Assemblée nationale, relative à la simplification du droit.
a tout d'abord rappelé que la proposition de loi s'inscrivait dans une démarche de simplification ambitieuse, cohérente et pérenne, érigée en priorité absolue par le Gouvernement et le Parlement.
Après avoir souligné que la simplification du droit constituait un objectif juridique, le Conseil constitutionnel ayant consacré les principes d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, il a déclaré qu'elle répondait également à une attente forte des citoyens, déroutés par l'abondance et la complexité des normes, des entreprises, freinées dans leurs initiatives par la multiplicité des démarches administratives à accomplir, et des administrations publiques elles-mêmes, conscientes que l'inflation des textes et leur insuffisante clarté nuisent à l'efficacité de l'action des pouvoirs publics et en augmentent sensiblement le coût.
Après avoir rappelé que le législateur s'était efforcé de prendre en compte ces préoccupations au travers des lois de simplification des 2 juillet 2003 et 9 décembre 2004, M. Bernard Saugey, rapporteur, a fait valoir que l'effort de simplification pouvait, depuis lors, s'appuyer sur la Direction générale de la modernisation de l'Etat, née en 2006 de la fusion de quatre organismes dédiés à la réforme de l'Etat. Il a appelé de ses voeux la relance des études d'impact, regrettant qu'après leur expérimentation dans les années 1990, celles-ci soient progressivement tombées en désuétude, et l'abrogation des textes obsolètes, soulignant que notre corpus juridique comptait aujourd'hui environ 8.000 lois et 140.000 décrets, contre respectivement 7.500 et 100.000 en 1991. Il a ainsi jugé prioritaire la lutte contre l'empilement des textes, citant le rapport Pébereau sur la dette publique, publié en 2005, selon lequel la superposition des dispositifs et des structures explique, pour une part, la dérive des dépenses publiques.
a indiqué que les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale, ciblées sur des mesures concrètes en faveur des particuliers, des entreprises et des administrations publiques, étaient inspirées par de nombreuses études préalables.
S'agissant des mesures de simplification relatives aux particuliers, il a expliqué que l'article 2 de la proposition de loi avait pour objet de permettre à une personne d'être assistée ou représentée, devant diverses juridictions, par son concubin ou la personne avec laquelle elle a conclu un pacte civil de solidarité, les deux autres innovations de la rédaction finalement retenue par les députés portant sur :
- la possibilité, pour les parties à un litige devant le tribunal d'instance, la juridiction de proximité ou le juge de l'exécution (sauf en matière de saisie immobilière), d'être assistées ou représentées par des personnes qui ne sont pas exclusivement attachées à leur service personnel ou à leur entreprise, alors que cette exigence d'exclusivité est actuellement posée par l'article 828 du nouveau code de procédure civile ;
- la suppression de la possibilité, pour les parties à un litige devant le tribunal paritaire des baux ruraux, d'être assistées ou représentées par un salarié d'une organisation professionnelle agricole, seuls les membres d'une telle organisation restant autorisés à les assister pour leur défense.
Il a ensuite présenté les apports des articles 3, 4 et 5 de la proposition de loi :
- l'article 3 supprime l'obligation faite aux caisses d'allocations familiales de vérifier que les nouveaux nés ont bien passé les trois examens médicaux obligatoires au cours de leur première année et, à défaut, d'interrompre le versement de l'allocation de base de la prestation d'accueil du jeune enfant ;
- l'article 4 supprime le certificat médical prénuptial, ce qui devrait permettre aux futurs époux de s'affranchir d'une démarche obligatoire et payante (l'examen n'est remboursé qu'à 75 %) et à la sécurité sociale de réaliser une économie annuelle de plus de 11 millions d'euros ;
- l'article 5 supprime l'exigence d'un récépissé des services fiscaux pour la déclaration qu'un certain nombre d'organismes, tels que les sociétés d'assurances et les banques, sont tenus de faire à l'occasion de l'ouverture d'une succession.
Abordant les mesures de simplification en faveur des entreprises, M. Bernard Saugey, rapporteur, a mis en avant la suppression, par l'article 6, des déclarations relatives au financement de l'apprentissage et de la formation professionnelle, expliquant que les entreprises n'auraient plus qu'à compléter une nouvelle mention au sein de la déclaration annuelle des données sociales, alors qu'elles doivent aujourd'hui remplir chaque année une déclaration.
Il a signalé que les articles 7 à 9 de la proposition de loi visaient également à simplifier le fonctionnement des collectivités territoriales, citant :
- la réforme des modalités de suppléance au sein du Comité des finances locales, où s'appliquent actuellement des règles variables en fonction de la qualité des membres ;
- la suppression de l'autorisation par décret en Conseil d'État de certains emprunts des centres communaux d'action sociale ;
- la simplification et l'actualisation des conditions de délégation à l'organe exécutif des décisions relatives à la passation de marchés publics ;
- la réduction et l'encadrement du montant des vacations funéraires, les dispositions proposées reprenant une partie d'une proposition de loi relative à la législation funéraire adoptée à l'unanimité par le Sénat au mois de juin 2006 sur la proposition de M. Jean-Pierre Sueur et sur le rapport de M. Jean-René Lecerf ;
- la suppression de l'avis du conseil général pour la création ou la dissolution des syndicats de communes et des communautés de communes ;
- l'extension aux établissements publics de coopération intercommunale de la faculté d'accorder des aides économiques pour le maintien de services en milieu rural ;
- la possibilité d'éviter la création d'un syndicat mixte spécifique pour la mise en oeuvre d'un schéma de cohérence territoriale ;
- le rétablissement de la possibilité pour le maire ou le président d'un établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'urbanisme de déléguer sa signature aux agents chargés de l'instruction des demandes de permis de construire.
a souligné que le texte avait également pour objet de permettre le recours à la visioconférence devant les juridictions civiles, sous deux conditions strictes : le consentement de l'ensemble des parties et l'utilisation des seules salles d'audience. Il a fait valoir que la visioconférence pourrait être utilisée, par exemple, dans l'hypothèse où les magistrats appelés à remplacer leurs collègues ultramarins se trouveraient dans l'impossibilité matérielle de venir sur place dans les délais requis.
Enfin, il a précisé que le texte adopté par les députés mettait l'accent sur la nécessité d'abroger les textes illégaux ou obsolètes, relevant, d'une part, que l'article premier de la proposition de loi vise à contraindre les autorités administratives à faire droit à toute demande tendant à l'abrogation d'un règlement illégal ou sans objet, d'autre part, que l'article 13 procède à cent vingt-six abrogations explicites de dispositions législatives devenues désuètes ou sans objet.
Il a ensuite proposé d'approuver la plupart des dispositions de la proposition de loi sous réserve de :
- limiter le champ des dérogations au monopole des avocats en matière d'assistance et de représentation des parties en justice, considérant que la possibilité, pour les parties, d'être assistées ou représentées devant les juridictions par une personne qui ne serait pas exclusivement attachée à leur service personnel ou à leur entreprise n'était pas pertinent. De même, la justification de la suppression de la possibilité d'être assisté ou représenté devant le tribunal paritaire des baux ruraux par le salarié d'une organisation professionnelle agricole, instituée en 1990, n'apparaît guère évidente. Aussi a-t-il suggéré de maintenir le droit en vigueur sur ces deux points (article 2) ;
- supprimer les dispositions relatives à la législation funéraire, issues de deux articles de la proposition de loi relative à la législation funéraire adoptée à l'unanimité par le Sénat en 2006, estimant que cette proposition de loi constitue un ensemble cohérent, méritant d'être examiné par l'Assemblée nationale (article 7) ;
- sécuriser les autorisations d'urbanisme délivrées depuis le 1er octobre 2007, en validant les décisions relatives à des demandes d'autorisation ou à des déclarations d'utilisation des sols, prises par les maires et les présidents d'établissements publics de coopération intercommunale entre le 1er octobre 2007 et la date d'entrée en vigueur de la présente loi, en tant que leur légalité serait contestée par le moyen tiré de l'interdiction qui leur était faite de déléguer leur signature aux agents chargés de l'instruction de ces demandes et déclarations (article 7 quater) ;
a enfin proposé de compléter la proposition de loi par des mesures de simplification complémentaires :
- autoriser la saisine directe du Médiateur de la République, tout en maintenant celle passant par les parlementaires, afin de mettre en oeuvre une recommandation de l'Office parlementaire d'évaluation de la législation, organe commun aux deux assemblées, dans son rapport de 2006 sur les autorités administratives indépendantes (article additionnel après l'article 2) ;
- garantir l'égalité des droits des créanciers et des débiteurs d'aliments dans l'accès à l'information fiscale (article additionnel après l'article 2) ;
- clarifier la procédure de réclamation motivée formée par un contrevenant à la suite de l'envoi d'un avis d'amende forfaitaire majorée (article additionnel après l'article 2) ;
- préciser que toute opposition administrative doit comporter la nature et la date de la créance ou de la condamnation pécuniaire, afin d'informer parfaitement le redevable sur le fondement de la procédure engagée à son encontre (article additionnel après l'article 2) ;
- prévoir l'inscription automatique des mentions relatives à la nationalité sur les extraits avec filiation des actes de naissance, afin que les personnes qui souhaitent obtenir un passeport n'aient plus à produire une copie intégrale de leur acte de naissance au risque de découvrir qu'elles ont été adoptées (article additionnel après l'article 5).
Concluant son propos, M. Bernard Saugey, rapporteur, a plaidé pour un renforcement des liens entre le Médiateur de la République et les parlementaires ainsi que pour une rénovation du Conseil d'orientation de la simplification administrative. Il a soutenu, en premier lieu, que la saisine directe du Médiateur n'impliquait pas un relâchement des liens entre le Médiateur et les parlementaires. Au contraire, la consécration juridique de la saisine directe évitera au Médiateur d'avoir à demander à un parlementaire de valider rétroactivement les démarches des citoyens, et lui permettra ainsi de se concentrer sur ses missions fondamentales : écouter, orienter, proposer. Il a soutenu, en second lieu, que la « démarche permanente de simplification », annoncée par M. Eric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, devait s'appuyer sur le Conseil d'orientation de la simplification administrative (COSA), organe dont l'originalité réside dans sa composition. Ce Conseil réunit en effet des élus, dont trois députés, trois sénateurs, un conseiller régional, un conseiller général et un maire, et des services ministériels. La présence d'élus permet, a-t-il précisé, de relayer les difficultés et les lenteurs que certaines procédures administratives sont susceptibles de générer auprès des citoyens.