Intervention de Fabienne Keller

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 18 juin 2008 : 1ère réunion
Contrôle budgétaire — Environnement - suivi des contentieux communautaires - communication

Photo de Fabienne KellerFabienne Keller, rapporteur spécial :

a rappelé que 4 des 6 « procédures 228 » ouvertes dans le domaine de l'environnement présentaient un risque de condamnation supérieur à 50 % et avaient donné lieu à des provisions pour litiges d'un montant total de 367 millions d'euros. Elle est ensuite revenue :

- sur la procédure liée à la non-transposition partielle de la directive OGM, dans laquelle l'avocat général auprès de la Cour de justice des Communautés européennes avait rendu ses conclusions. La France a effectivement manqué à ses obligations, motif pour lequel la condamnation à une astreinte journalière de 235.764 euros est recommandée ;

- sur l'affaire des nitrates de Bretagne, dans le cadre de laquelle la France avait obtenu un ultime sursis de la part de la Commission, au prix d'un ambitieux plan d'action mobilisant 60 millions d'euros sur cinq ans et destiné à réduire d'un tiers des apports azotés et à fermer les 4 prises d'eau les plus dégradées. Elle a vu dans cette décision « in extremis » de la France le symptôme d'une insuffisante réactivité, à laquelle il faudra préférer, à l'avenir, un traitement efficace et précoce des procédures naissantes ;

- sur l'affaire liée au non-respect de la directive « Eaux résiduaires urbaines ». Cette procédure a franchi une étape supplémentaire avec l'envoi d'un avis motivé de la Commission, qui reproche à la France de n'avoir pas soumis à un traitement plus rigoureux les rejets d'eaux urbaines d'un grand nombre d'agglomérations, et d'avoir tenté de soustraire certaines d'entre elles à l'application de la directive. Nonobstant la mise en place d'un dispositif tendant à la résorption des cas de non-conformité, le risque de saisine de la Cour de justice demeure élevé.

a reconsidéré les conclusions de l'avocat général dans l'affaire « OGM ». Si elles étaient suivies par la Cour, elles remettraient en cause plusieurs éléments de la doctrine de la Commission en matière de sanctions pécuniaires, en les assouplissant.

a ensuite évoqué les éléments de contexte communautaire qui tendaient à renforcer l'obligation de résultat pesant sur les Etats membres. Elle a tout d'abord relevé que, dans une communication du 5 septembre 2007, la Commission entendait améliorer ses méthodes en matière de prévention et de gestion des infractions, notamment sous la forme d'une expérience pilote - à laquelle la France ne prend pas part - permettant aux Etats membres de se mettre directement en relation avec l'auteur d'une plainte ou d'une demande de renseignement. La Commission souhaite également traiter en priorité, et dans des délais plus brefs, les infractions liées à la non-notification de mesures nationales de transposition et les procédures faisant suite à un premier arrêt en manquement. Elle a indiqué que la volonté, exprimée par la Commission, d'accélérer le traitement des affaires s'était déjà traduite par un accroissement du rythme des réunions dédiées au passage en revue des infractions.

a observé que la médiatisation des procédures d'infraction constituait un outil précieux à la disposition de la Commission, dont la France a déjà éprouvé l'âpreté. Cette médiatisation est renforcée par l'habitude de la Commission de dresser des « listes noires » d'Etats membres en infraction sur un sujet déterminé.

Parallèlement aux initiatives de la Commission, le rapporteur spécial a indiqué que le traité de Lisbonne était susceptible d'avoir un impact substantiel sur la gestion de certaines procédures d'infraction, en permettant, par exemple, le prononcé d'une sanction pécuniaire dès le premier arrêt en manquement pour les cas de défaut de transposition. De surcroît, le Parlement européen joue désormais un rôle non négligeable dans le contrôle de l'application du droit communautaire, en encourageant la Commission à faire preuve de volontarisme et de fermeté et en menant des réflexions sur l'implication de ses propres commissions permanentes.

S'agissant de la réponse apportée par la France à ces nouveaux enjeux, Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial, a estimé que les administrations nationales avaient désormais bien intégré les contraintes communautaires. Les améliorations constatées concernent aussi bien la transposition des directives que la gestion des procédures d'infraction en cours. Des bénéfices sont ainsi attendus de la réorganisation de l'administration centrale du ministère de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire (MEEDDAT), afin de regrouper les fonctions juridiques et internationales autrefois éparpillées au sein de chaque direction. Le MEEDDAT s'attache également à développer les études d'impact de la législation communautaire en cours d'élaboration, grâce à une systématisation progressive de l'évaluation au regard du développement durable prévue dans le cadre du Grenelle de l'environnement.

s'est également félicitée de ce que les exigences liées au respect du droit communautaire de l'environnement transparaissaient désormais clairement dans les documents budgétaires accompagnant le projet de loi de finances et le projet de loi de règlement. Le projet annuel de performances (PAP) de la mission « Ecologie, développement et aménagement durables » contient notamment des indicateurs de performance relatifs à l'effort de transposition des directives ou directement corrélés à l'application du droit communautaire de l'environnement. Elle a toutefois suggéré que l'ensemble de ces éléments soit complété par la création d'un indicateur lié à l'évolution du montant des provisions pour litiges communautaires, de nature à éclairer le Parlement sur l'évolution des risques encourus et sur nos résultats en matière de respect du droit communautaire de l'environnement.

a jugé indispensable l'implication des Parlements nationaux dans le contrôle du respect du droit communautaire de l'environnement. L'initiative parlementaire peut notamment contribuer à améliorer les performances françaises en matière de transposition des directives. Elle s'est déclarée convaincue que les parlementaires seraient d'autant plus conscients des enjeux liés au respect du droit communautaire qu'ils bénéficieraient d'un accès immédiat et transparent à l'information disponible.

a enfin cité les initiatives prises pour mieux associer les collectivités territoriales aux processus décisionnels communautaires, parmi lesquelles la création d'une commission nationale des exécutifs locaux, ou la réunion trimestrielle d'un groupe de travail technique associant le Secrétariat général des affaires européennes et les correspondants sectoriels des associations de collectivités territoriales. Elle a également salué la création, à l'initiative de M. Alain Lambert, d'une commission consultative d'évaluation des normes chargée d'émettre un avis sur les propositions de textes communautaires ayant un impact technique et financier sur les collectivités territoriales et leurs établissements publics.

a conclu en relevant la sensibilisation accrue des administrations nationales aux enjeux liés au respect du droit communautaire de l'environnement. Elle a rappelé que les effets des nouvelles procédures mises en oeuvre et des réformes accomplies au niveau national ne sauraient être sensibles qu'à moyen terme. Partant, le seul indicateur de performance pertinent sera la baisse effective du nombre de procédures d'infraction ouvertes contre la France et de condamnations à déplorer.

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