Intervention de Michelle Demessine

Commission des affaires économiques — Réunion du 14 novembre 2006 : 1ère réunion
Pjlf pour 2007 — Mission « stratégie économique et pilotage des finances publiques » - examen du rapport pour avis

Photo de Michelle DemessineMichelle Demessine, rapporteur pour avis :

a indiqué que la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques » relevait du ministère de l'économie et des finances et comportait notamment les crédits de personnel et les crédits de fonctionnement des directions générales de Bercy chargées d'aider à définir la politique économique et financière de la France. Cette mission est dotée d'environ 860 millions d'euros de crédits de paiement et se compose de deux programmes.

S'agissant du premier programme, Mme Michelle Demessine, rapporteur pour avis, a précisé qu'il était doté de 414 millions d'euros et qu'il concernait la conception et la mise en oeuvre des politiques économique et financière ainsi que le pilotage des actions de modernisation de l'Etat. Elle a rappelé qu'à ses yeux, le rattachement de la réforme de l'Etat au ministère du budget présentait le risque d'enfermer la réforme de l'Etat dans des considérations purement budgétaires.

a ensuite souhaité souligner deux points. Tout d'abord, plus de la moitié des crédits de la mission concernent la rémunération des agents de certaines grandes directions de Bercy, notamment la direction du Trésor et la direction du Budget. Or ces agents sont extrêmement polyvalents et participent donc, en réalité, à de nombreux autres programmes répartis dans d'autres missions. En conséquence, la lecture des coûts au sein du programme s'avère extrêmement complexe, et des efforts devront encore être effectués l'année prochaine pour améliorer la lisibilité des documents budgétaires. Par ailleurs, le responsable de ce programme est le directeur de l'Agence pour l'informatique financière de l'Etat, qui ne dispose pas d'autorité hiérarchique sur les directeurs d'administration centrale, dont il est pourtant censé gérer les crédits, ce qui apparaît également problématique.

Abordant le deuxième point, Mme Michelle Demessine, rapporteur pour avis, a relevé que l'un des objectifs du programme n'était pas atteint alors même qu'il revêtait une grande importance. Cet objectif concerne la qualité des prévisions économiques présentées dans le projet de loi de finances. A cet objectif est associé un indicateur relatif à la fiabilité des prévisions du Gouvernement. Or cet indicateur est marqué par une mauvaise performance, puisqu'en 2005, le Gouvernement avait tablé sur une croissance de 2,5 %, c'est-à-dire une prévision plus optimiste que celles des instituts de conjoncture, qui la fixait à 2,2 %. La croissance n'a été que d'1,2 % en 2005, soit un écart de 1,3 point par rapport à l'hypothèse du Gouvernement. Contrairement à cette prévision, fondée sur l'hypothèse d'une croissance supérieure à celle de la zone euro, la performance française a été inférieure à cette zone.

a relevé que cette situation menaçait de se répéter en 2007. En effet, le budget repose sur une hypothèse de croissance de 2-2,5 %, alors que l'INSEE a prévu une croissance nulle au troisième trimestre 2006 et qu'en conséquence, d'après de nombreux prévisionnistes, il est peu probable que la croissance soit supérieure à 1,9-2 %, en 2006. Elle a estimé que cet écart était tout à fait regrettable, puisqu'il signifiait que le budget était fondé sur une hypothèse erronée et que le vote du Parlement était donc d'une certaine façon biaisé. En outre, elle a rappelé que la Cour des comptes avait souligné, dans un rapport récent qu'aucun des quatre programmes pluriannuels établis entre décembre 2001 et décembre 2004 n'avait été exécuté conformément aux prévisions. Tous se sont traduits par des résultats très en retrait des ambitions affichées, en raison d'hypothèses économiques insuffisamment réalistes. Elle a jugé, en conséquence, qu'il fallait être particulièrement attentif, à l'avenir, à l'évolution de cet indicateur.

Au sujet du deuxième programme de la mission, Mme Michelle Demessine, rapporteur pour avis, a relevé qu'il concernait essentiellement les crédits de l'INSEE. Ces crédits, constitués à 83 % de dépenses de personnel, s'élèvent, pour 2007, à environ 446 millions d'euros en autorisations de paiement. Par rapport à la loi de finances pour 2006, ils sont en baisse d'1,5 %, cette réduction affectant surtout les crédits de personnel. En effet, 122 emplois sont transférés à d'autres programmes, et 110 sont supprimés. Ces suppressions s'inscrivent dans le cadre de la politique de modernisation menée au sein du ministère de l'économie et des finances, qui se traduit par l'élaboration d'un contrat de performance pour la période 2007-2009. Celui-ci devrait porter notamment sur la rénovation des applications dans le domaine de la statistique des entreprises et la mutualisation des moyens entre établissements régionaux. Mme Michelle Demessine, rapporteur pour avis, a déploré, à titre personnel, les suppressions d'emplois qui affectent l'INSEE, et a rappelé que les syndicats dénonçaient certains points du contrat de performance en cours d'élaboration.

Elle a ensuite indiqué que l'action la plus importante de ce programme, qui constituait le coeur de métier de l'INSEE, était dotée d'environ 114 millions d'euros et qu'elle finançait notamment, d'une part, les crédits de personnel affectés au recensement, à la comptabilité nationale et au calcul de l'indice des prix à la consommation et, d'autre part, la dotation forfaitaire de recensement versée chaque année aux collectivités territoriales, qui s'élève à 18 millions d'euros.

a jugé urgent que l'INSEE engage une réflexion de fond sur la question de l'indice des prix à la consommation et souligné que, depuis la création de l'euro, les statistiques fournies par l'institut concernant le pouvoir d'achat étaient en contradiction avec la perception qu'en avaient les Français. La prévision par l'INSEE, au début du mois d'octobre, d'une hausse de 2,3 % du pouvoir d'achat en 2006, a ainsi suscité un débat. Cette estimation repose sur l'indice des prix à la consommation, un indicateur de plus en plus contesté, car il sous-estime notamment le poids réel de certaines dépenses. Tel est le cas, en particulier, des loyers, qui ne pèsent que 6 % dans la composition de l'indice, alors que les locataires, qui représentent 40 % de la population française, consacrent près d'un quart de leur budget à se loger. De même, les crédits immobiliers ne sont pas pris en compte par l'INSEE, alors qu'ils grèvent de plus en plus le budget des familles.

a relevé que, selon l'indice sur le coût de la vie, créé par M. Michel-Edouard Leclerc en 2004, le pouvoir d'achat n'avait augmenté que de 0,5 %, une fois soustraites les charges contraintes, c'est-à-dire le remboursement des crédits, les loyers, les assurances, les transports publics. Entre les deux, l'Institut de la consommation estime quant à lui à 0,9 % la hausse du pouvoir d'achat en 2006. Elle a donc relevé qu'il existait une vraie interrogation sur la capacité de l'indice des prix à la consommation à refléter réellement l'évolution du pouvoir d'achat des Français et qu'il apparaissait dès lors urgent d'élaborer de nouveaux instruments de mesure, plus transparents et plus fiables.

a ensuite abordé la question du recensement de la population et a indiqué qu'une enquête effectuée en 2006 par l'Association des maires de France auprès des villes de plus de 30.000 habitants montrait que la dotation forfaitaire ne compensait pas, dans de nombreux cas, les dépenses. D'après cette enquête, 60 % des communes interrogées prennent en charge elles-mêmes plus de la moitié des dépenses induites par le recensement. Elle a estimé, en conséquence, que la question de la réévaluation de cette dotation devrait être examinée par le comité des finances locales.

En conclusion, Mme Michelle Demessine, rapporteur pour avis, a indiqué que les crédits de la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques », étaient globalement stables dans le budget 2007, et n'appelaient donc pas de commentaire particulier, mais qu'en revanche, sur deux points au moins, la prévision de croissance et l'indice des prix à la consommation, les instruments de pilotage des politiques économiques et budgétaires devraient être revus. Elle a ajouté, à titre personnel, que dans le contexte actuel, marqué par la multiplication des délocalisations, l'impression qui dominait était qu'aucune réflexion d'ensemble n'était menée au sein du ministère de l'économie sur les moyens à mettre en oeuvre pour mieux préserver notre tissu industriel, et qu'en conséquence, les services de l'Etat devraient davantage se mobiliser sur cette question.

Elle a conclu en proposant à la commission de s'abstenir sur les crédits de la mission « Stratégie économique et pilotage des finances publiques ».

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