Effectivement, exactement comme cela est déjà le cas en matière de défense sol-air. C'est une responsabilité du commandement d'opérations.
Le deuxième champ est celui de la défense de théâtre. L'ambition est un peu plus large et dans certains cas, la défense de théâtre recouvre la défense du territoire, par exemple pour un Etat comme les Emirats Arabes Unis. Il s'agit ici de se protéger contre les missiles de quelques centaines à quelques milliers de kilomètres de portée, jusqu'à 3 000 kilomètres environ. Cette menace se développe actuellement, avec le passage de la génération de missiles Scud à la génération du No-Dong nord-coréen.
Il y a enfin la défense antimissile du territoire, qu'il s'agisse du territoire américain ou européen, pour des missiles de portée supérieure à 2 500-3 000 kilomètres ou intercontinentaux. Pour l'instant, la France n'est pas exposée à ce type de menace, exception faite des capacités russes ou chinoises. Il doit être clair, à mon sens, que cette menace est avant tout couverte par la dissuasion nucléaire et que l'apport de la défense antimissile ne peut être que complémentaire, pour compliquer la décision de l'adversaire et lui rendre les choses plus difficiles.
Si l'on prend l'exemple de la Chine, on peut penser qu'elle fera le nécessaire pour préserver la crédibilité de la dissuasion quels que soient les développements de la défense antimissile américaine. C'est ce que l'on appelait en France et au Royaume-Uni le « critère de Moscou » durant la guerre froide. Nos pays ont effectué des investissements considérables, en termes de têtes multiples ou de pénétration, pour avoir l'assurance de percer le système de défense antimissile déployé par les Soviétiques autour de Moscou. Dans le cadre d'une relation dissuasive de puissance à puissance, les Etats concernés feront le nécessaire pour avoir cette certitude de franchir les défenses antimissiles. Le perfectionnement de ces dernières vise d'une part à rehausser le seuil d'accès à cette certitude, en particulier dans le cas des nouveaux venus dans la prolifération balistique, et d'autre part à rendre le jeu de l'adversaire beaucoup plus compliqué dans un certain nombre de scénarios limites : par exemple le fait de réaliser une frappe balistique conventionnelle ciblée sur un allié pour l'empêcher de s'engager dans une coalition sans pour autant encourir de rétorsion de nature nucléaire.