Intervention de Jean Pisani-Ferry

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 18 octobre 2011 : 1ère réunion
Modalités de sortie de la crise de la zone euro — Table ronde

Jean Pisani-Ferry, directeur de l'institut Bruegel :

Sa responsabilité réside dans son opposition résolue à la restructuration des dettes, qui m'étonne, car ce n'était pas inacceptable pour une banque centrale. Ce n'était pas au premier rang une affaire de banque centrale, mais une responsabilité budgétaire qui relève des gouvernements. Il était légitime, pour la banque centrale, de poser des conditions. Il n'a pas tenu ce discours et la BCE a refusé toute obligation pour le secteur privé, ce qui a eu pour effet de lui laisser l'initiative des termes de la restructuration.

Au lieu de créer un cadre commun de négociation, on a dit aux banques : « allez faire une offre » ! Il ne faut pas s'étonner que cette offre soit trop favorable aux créanciers et ne permette pas de résoudre le problème de solvabilité.

Sur le FMI, j'ai des réserves, non parce que l'Italie est un pays du G7, mais parce que faire passer des pays comme l'Italie ou l'Espagne sous programme FMI, c'est les sortir du marché, or ils sont très différents de la Grèce ou du Portugal. Je rappelle que la dette espagnole est inférieure de vingt points de PIB à la dette publique allemande. Après avoir un peu tardé dans la prise de conscience de la gravité de ses problèmes, l'Espagne a adopté une série de mesures extrêmement vigoureuses. Il y a un moment où il faut exprimer un vote de confiance envers la politique économique de ces pays et oser dire aux marchés qu'ils se trompent lorsqu'ils prétendent qu'ils ne sont pas solvables.

Oui, on a besoin d'un cadre. On ne peut pas subir, comme en Italie, un revirement de la politique budgétaire après l'annonce d'un programme d'achat de titres. Mais le cadre n'a pas besoin d'être celui d'un programme classique du FMI. Le Fonds a introduit il y a quelques années la possibilité d'assistance financière à faible conditionnalité. Il faut s'en inspirer, pour créer un cadre européen plus souple que celui actuellement défini pour la Grèce et qui permette à un gouvernement de prendre ses responsabilités.

J'ai des réserves importantes sur le mécanisme d'assurance car je ne suis pas sûr qu'il soit souhaitable de segmenter le marché obligataire, entre marché primaire et secondaire, entre détenteurs de vieille dette et de nouvelle dette. Ensuite, on couvre les premières pertes. Quand vous êtes porté au-delà du seuil de 20 %, vous n'êtes plus couvert, et si la situation s'aggrave, vous n'avez plus les moyens d'agir, alors que dans les programmes d'achat de titres, le spread de taux d'intérêt est couvert, ce qui est à la fois une pression et une limite, empêchant d'aller vers un équilibre de faillite. C'est aussi une question de taille : pour couvrir beaucoup, vous aurez un multiplicateur faible et vous vous retrouverez avec un trésor de guerre limité. Bref, ce n'est pas une très bonne solution.

Sur le cadre institutionnel, les euro-obligations remettent en cause l'article 125. On peut essayer de jouer avec les dispositions propres à la zone euro (l'article 136), mais il est clair qu'il s'agit de remplacer un principe par un autre.

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