Nous allons examiner le projet de loi autorisant la ratification de la convention d'entraide judiciaire en matière pénale entre la République française et le Royaume du Maroc.
Une convention d'entraide judiciaire entre la France et le Maroc était en vigueur depuis le 5 octobre 1957. Cette convention d'aide mutuelle judiciaire, d'exequatur des jugements et d'extradition couvrait à la fois la coopération judiciaire en matière civile et la coopération judiciaire en matière pénale (entraide, extradition). Néanmoins, les dispositions de la convention de 1957 apparaissaient comme très largement incomplètes, d'où la nécessité de procéder à une révision.
L'article 1er prévoit que les deux Etats « s'engagent à s'accorder mutuellement (...) l'aide judiciaire la plus large possible dans toute procédure visant des infractions pénales dont la sanction est, au moment où l'entraide est demandée, de la compétence des autorités judiciaires de la partie requérante. L'entraide sera accordée sans qu'il soit exigé que les faits soient considérés comme une infraction dans le pays requis ». Toutefois, demeure hors du champ d'application toute demande d'entraide concernant l'exécution des décisions d'arrestation et des condamnations, ainsi que les infractions militaires qui ne constituent pas des infractions de droit commun.
L'article 3 réserve aux Etats parties la possibilité de refuser l'entraide judiciaire dans plusieurs hypothèses : si la demande se rapporte à des infractions considérées par la Partie requise comme des infractions politiques ou des infractions connexes à des infractions politiques ; si la Partie requise estime que l'exécution de la demande est de nature à porter atteinte à la souveraineté, à la sécurité, à l'ordre public ou à d'autres intérêts essentiels.
Les demandes d'entraides sont adressées « directement par l'autorité centrale de la Partie requérante à l'autorité centrale de la Partie requise », c'est-à-dire le ministère de la justice pour la France et le ministère de la justice pour le Maroc (articles 5 et 6). L'article 4 précise les mentions devant figurer dans la demande. Les demandes d'entraide judiciaire peuvent être adressées indifféremment dans la langue de l'Etat requérant ou de l'Etat requis.
L'entraide judiciaire peut prendre la forme de la comparution de témoins ou experts. Si ce témoin est une personne détenue, une procédure de transfèrement aux fins d'entraide peut être mise en place (articles 12, 13 et 14). La communication d'extraits de casier judiciaire est prévue à l'article 25. Quant à la recherche de preuves, en particulier la recherche et saisie des produits d'infraction, une partie peut demander de rechercher et de saisir les produits d'une infraction à sa législation susceptibles de se trouver sur le territoire de la Partie requise (article 20).
Outre ces dispositions classiques, la convention comporte diverses dispositions plus atypiques. La première d'entre elles est l'extension du champ de l'entraide, notamment aux actions civiles jointes aux actions pénales (tant que la juridiction répressive n'a pas encore définitivement statué sur l'action pénale) ou dans les procédures d'instruction et de notification en matière d'exécution des peines ou des mesures de sûreté (article 1er).
La deuxième vise à écarter l'opposabilité de certains motifs de refus et à introduire une obligation de motivation des refus. Ainsi, l'entraide judiciaire ne peut être rejetée au seul motif que la demande se rapporte à une infraction fiscale, que la partie requise n'impose pas le même type de taxes ou d'impôts, ou encore le secret bancaire ne peut être invoqué comme motif de rejet.
La troisième spécificité concerne l'assouplissement des règles de l'entraide et à établir un dialogue entre la partie requérante et la partie requise. Ce dialogue approfondi se retrouve dans les stipulations des articles 5 (refus des demandes), 7 (exécution des demandes) et 9 (demandes complémentaires d'entraide).
La quatrième permet d'introduire certaines formes particulières d'entraide : recueil d'informations en matière bancaire (article 18), restitution des objets obtenus de façon illicite à la partie requérante (article 21), échange spontané d'informations concernant des faits pénalement punissables (article 24), livraisons surveillées (article 15), dénonciation aux fins de poursuite (article 23), présentation de demandes d'entraide complémentaire simplifiées (article 9).
Enfin, cette nouvelle rédaction introduit une possibilité de transmission directe des demandes d'entraide entre autorités judiciaires en cas d'urgence.
En termes statistiques, en 2009, 37 demandes d'entraide judiciaire ont été présentées par la France au Maroc, et inversement 1 demande a été présentée par le Maroc à la France.
En conclusion, cette convention bilatérale entre la France et le Maroc révise et modernise utilement la convention de 1957 déjà en vigueur entre les deux pays. C'est pourquoi je vous propose d'adopter ce texte et suggère qu'il fasse l'objet d'une procédure d'examen simplifié en séance publique le 31 mai prochain.
Le projet de loi est adopté en forme simplifiée par la commission.