Intervention de Didier Migaud

Commission des affaires sociales — Réunion du 12 octobre 2011 : 1ère réunion
Application des lois de financement de la sécurité sociale — Audition de M. Didier Migaud premier président de la cour des comptes

Didier Migaud, Premier président :

Sur le premier point, la Cour des comptes a procédé à un contrôle approfondi de la Cades, ses conclusions figurent dans le rapport. Nous formulons des suggestions d'amélioration mais reconnaissons la qualité d'ensemble du modèle. L'établissement aura aussi recours à un audit externe.

Sur les 135 milliards d'euros de dette qu'elle porte, 40 % sont financés par la CRDS, 36 % par la contribution sociale généralisée (CSG), 14 % par un transfert lié à la liquidation du FRR, le solde par un prélèvement sur les revenus des capitaux. La question principale n'est pas l'équation financière, qu'elle fait fonctionner correctement, ni celle de la qualité des ressources, mais celle de la responsabilisation par rapport à la spirale de la dette. Nous estimons qu'une plus grande clarté est nécessaire sur la dette sociale : le nouveau tableau patrimonial apporte la transparence souhaitable. Je l'ai dit, la dette est de 136 milliards d'euros à fin 2010 et il est très anormal de financer à crédit des dépenses de consommation courante. La Cour propose donc que les déficits sociaux soient transférés chaque année à la Cades, accompagnés d'un financement supplémentaire ; la CRDS, à l'assiette large, est le prélèvement le mieux adapté. Nous suggérons aussi que soit défini un plan de retour à l'équilibre des comptes sociaux.

Je confirme que la France a, en Europe, le niveau le plus élevé de dépenses sociales et le meilleur taux d'acceptation d'un financement à crédit ! Nos dépenses dépassent de trois points de Pib la moyenne européenne. Le besoin de financement des administrations sociales, qui existe dans seulement six pays sur seize, est en France le plus élevé de la zone euro : 0,1 point de Pib en moyenne, mais 1,2 point chez nous. Notre pays est le seul, en outre, dont la situation se soit dégradée en 2010. Il y a bien une spécificité française. Pourtant la performance du système social ne nous distingue pas des autres. En termes d'indicateurs de santé publique, les défis sont les mêmes, par exemple le vieillissement de la population. Et les réformes sont partout difficiles.

Il ne s'agit bien sûr pas de plaquer un autre modèle sur notre système de protection sociale. L'organisation repose en Allemagne sur les Länder, avec des caisses autonomes en concurrence ; en Grande-Bretagne la sécurité sociale est totalement intégrée dans le budget de l'Etat, avec une enveloppe limitative ; en Italie et en Espagne la décentralisation est très large, y compris pour la fixation des prélèvements sociaux. En Allemagne, l'interdiction des déficits sociaux impose une cogestion de la maîtrise des dépenses de soins, ainsi qu'une meilleure prévision des réformes structurelles à réaliser.

Tarifs forfaitaires de responsabilité et généralisation des génériques peuvent infléchir la situation dans la durée, sans conséquence sur la santé. Je signale que les pays voisins ont le souci que les prélèvements sociaux ne pèsent pas sur la compétitivité de leur économie.

Quant à la répartition des médecins sur le territoire, quotas et incitations financières ont échoué. Nous proposons donc de mieux réguler les mesures d'installation. La nouvelle convention médicale va en ce sens. La Cour des comptes a également proposé de moduler la prise en charge des cotisations sociales du secteur 1, y compris pour les praticiens déjà installés, en fonction du lieu d'exercice. La modulation actuelle coûte cher et des correctifs doivent y être apportés.

Les hôpitaux, les coopérations hospitalières ont fait l'objet d'enquêtes de la part de la Cour, qui conclut à la nécessité d'un pilotage plus ferme de la recomposition de l'offre. Au-delà des coopérations, la mise en oeuvre de nouveaux schémas régionaux d'organisation des soins s'impose.

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