Intervention de Christian Cambon

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 5 mai 2011 : 1ère réunion
Contrat d'objectifs et de moyens de l'agence française de développement afd — Examen de l'avis

Photo de Christian CambonChristian Cambon, co-rapporteur :

L'AFD, comme vous le savez, est devenue, depuis la disparition du ministère de la coopération, l'opérateur pivot de la coopération française. Examiner son contrat d'objectifs et de moyens nous permet d'exercer un contrôle sur cette politique. Je me félicite donc de cette procédure d'avis. Pour préparer ce rapport, nous avons effectué plusieurs missions sur le terrain, l'année dernière au Mali, cette année en Inde, pour évaluer l'action de l'AFD et les projets qu'elle conduit. Nous avons également procédé à de nombreuses auditions depuis plusieurs mois de façon à bien comprendre l'action d'un établissement singulier aux multiples facettes.

Avant d'examiner ce contrat, quelques mots sur le contexte.

L'AFD inscrit son action dans une politique de coopération qui a depuis une dizaine d'années diversifié ses objectifs et ses zones d'intervention. A une aide centrée sur le pré-carré africain et la lutte contre la pauvreté, a succédé une politique plus ambitieuse. Notre coopération poursuit non seulement des objectifs dans les secteurs sociaux comme l'éducation et la santé, mais également, un objectif de promotion d'une croissance partagée et durable, ainsi qu'un objectif de sauvegarde des biens publics mondiaux, c'est-à-dire de lutte contre le réchauffement climatique, de préservation de la biodiversité et enfin de lutte contre les pandémies. Cette politique de coopération est également devenue un enjeu important de notre diplomatie multilatérale comme en témoignent les engagements de la France à l'ONU ou dans le cadre de la présidence du G8 et du G20.

Il s'agit d'une politique de plus en plus ambitieuse avec, il est vrai, des moyens de plus en plus comptés. L'aide publique française demeure officiellement une des coopérations les plus importantes au monde. Mais nous avons pu mesurer au fil de nos travaux combien cette grandeur était mesurée par un thermomètre largement faussé.

Sur le terrain, l'état de nos finances publiques ne nous permet plus d'être aussi généreux qu'auparavant. Nous avons été frappés de constater que, dans certains pays francophones d'Afrique subsaharienne, la France était aujourd'hui loin derrière des bailleurs de fonds comme les Pays-Bas ou le Canada sans parler de la Chine. Ce décalage entre nos ambitions et la réalité des crédits explique que la France ait du mal à tenir les très nombreux engagements internationaux qu'elle a pris ces dernières années. Je veux parler du 0,7 % pour les objectifs du millénaire pour le développement, mais également les engagements pris en matière de soutien du secteur privé en Afrique ou de santé.

Ce décalage s'accompagne enfin d'un déséquilibre croissant entre l'aide bilatérale dont l'AFD est l'opérateur et une aide multilatérale qui passe notamment par la Banque mondiale, par le fonds européen de développement ou par le fonds Sida.

Le contrat d'objectifs et de moyens de l'AFD a été rédigé à un moment où cette politique de coopération est confrontée à plusieurs enjeux. Le premier enjeu, c'est celui de contribuer au décollage économique de l'Afrique et à la stabilité des pays du Maghreb. L'Afrique, vous le savez, c'est 1,8 milliard d'habitants en 2050. C'est un fait majeur qui nous concerne au premier plan et dont on ne doit pas sous-estimer les conséquences. Qu'on soit claire, l'aide au développement n'est pas en mesure de générer de la croissance économique à l'échelle d'un continent, ni remplacer des politiques nationales inappropriées. Mais elle peut accompagner des dynamiques et être un accélérateur de transformations économiques et sociales initiés par des acteurs locaux.

Le deuxième enjeu est celui de l'efficacité et de l'évaluation de notre action. La politique d'aide au développement doit faire l'objet d'une évaluation plus large, plus ambitieuse et plus complète de son impact réel sur le développement de nos pays partenaires. C'est un enjeu d'efficacité, c'est aussi un enjeu de redevabilité à l'égard des contribuables.

Le troisième enjeu est celui d'une meilleure articulation entre les bailleurs de fonds bilatéraux, aussi bien au niveau européen qu'au niveau multilatéral. Il y a dans ce domaine une jungle institutionnelle qui est une source de dysfonctionnement croissante.

Le dernier enjeu, me semble-t-il, pour la France, est celui de la crédibilité. La France affirme haut et fort sa préférence pour l'Afrique et cette priorité ne peut rester que rhétorique. Il faut qu'elle soit suivie d'effets et de moyens. Dans un contexte budgétaire tendu, il ne s'agit pas d'augmenter les déficits publics mais sans doute, de mieux répartir les crédits au sein de cette politique.

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