Intervention de Jean-Pierre Sueur

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 3 mai 2011 : 1ère réunion
Participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et jugement des mineurs — Audition de M. Michel Mercier garde des sceaux ministre de la justice et des libertés

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

plutôt que de surfer sur la vague des sentiments que l'on prête à l'opinion publique ! La création de jurys populaires n'a été demandée par aucun parti politique, aucune organisation professionnelle, aucune association de magistrats.

Vous n'êtes pas à un paradoxe près. Si les jurés populaires sont la panacée, pourquoi réduire leur nombre aux assises ? Pourquoi ne seraient-ils pas compétents pour la délinquance en col blanc ? La délinquance financière ou fiscale serait trop compliquée pour eux ? Bonjour l'égalité devant la justice !

Je ne doute pas de votre attachement aux principes de la justice des mineurs. Mais quand sera effacé le dossier unique de personnalité ? J'imagine qu'il ne va pas suivre la personne jusqu'à sa retraite... Pourquoi créer de nouveaux tribunaux correctionnels pour une partie des mineurs, ce qui contrevient au principe d'une justice spécifique des mineurs ? Dans les tribunaux pour enfants, pourquoi remplacer par des jurés populaires des personnes choisies en raison de leurs compétences ? Rompre avec la spécialisation de la juridiction pose une question de principe. Il ne faudrait pas, à force de révérence devant le texte de 1945, en dénaturer la nature !

Pourquoi cumuler sanction éducative et peine ? C'est inédit. Dans sa décision sur la LOPPSI 2, le Conseil constitutionnel estime que l'on ne peut sanctionner pénalement les parents d'un mineur n'ayant pas respecté l'interdiction d'aller et venir. Il rappelle l'interdiction d'instaurer une présomption irréfragable de culpabilité à raison d'une infraction commise par le mineur. La possibilité de délivrer un ordre d'amener à l'encontre des parents risque de tomber sous le coup du même reproche.

Les mineurs d'aujourd'hui ne sont pas ceux d'hier, dites-vous ? Vous verrez, dans la salle du Livre d'or du Sénat, un plan de Paris où figure une « rue d'enfer », ainsi dénommée tant elle était dangereuse ! Plutôt que d'exploiter les problèmes d'insécurité, expliquons pourquoi des mesures simplistes n'auront pas d'effet, et que le travail de fond est certes ingrat mais indispensable.

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