Je suis championne marocaine de course de jet-ski. Lorsque j'ai voulu m'inscrire au championnat, on m'a dit : « Ce n'est pas pour les femmes, il n'y a pas de catégorie « Femmes » en jet-ski ! ». Je suis donc revenue avec les statuts du championnat et ai fait remarquer qu'il n'y était nulle part inscrit qu'il était interdit aux femmes et je me suis donc inscrite dans la catégorie « Hommes ». Et j'ai gagné !
Cela m'a servi en politique lorsque j'ai été candidate aux législatives. A la dernière ligne de mon CV, j'ai écrit : « Championne de jet-ski, catégorie Hommes ». Dès lors, toutes les discussions ont porté sur ce seul point, on ne me croyait pas, on parlait d'erreur. J'ai beau diriger l'Association marocaine des femmes chefs d'entreprise, on ne m'a jamais interrogée sur mes compétences managériales. Je n'ai jamais été médiatisée que pour cette question de jet-ski. Pourtant, avec les femmes chefs d'entreprise, nous avions réalisé des exploits, récolté 1,5 millions en trois ans, monté des incubateurs, créé 57 entreprises, formé des chômeuses et d'anciennes prostituées jusqu'à leur faire obtenir des CDI. Pour tout cela, je ne suis jamais passée à la télévision. Au Parlement, j'ai travaillé sur la réforme des médias ; cela ne m'a valu que quelques lignes dans la presse. Seule ma victoire au championnat de jet-ski intéresse les journalistes.
C'est pourquoi je vois dans le sport une manière d'avancer vers la parité, d'une manière intelligente et détournée car nous ne pouvons le faire de façon trop frontale. Au Maghreb, le football est très populaire mais, malheureusement, il est aussi le symbole de l'argent. Je déplore cette image que donne le sport. La Coupe du monde a poussé les gens à changer leur télévision - mon mari le premier - mais elle n'a pas développé en eux l'amour du sport.
- Présidence de Mme Christiane Kammermann, vice-présidente -