Intervention de Thierry Terret

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 25 novembre 2010 : 1ère réunion
Femmes et sports — Audition thierry terret professeur à l'université lyon i

Thierry Terret, directeur du Centre de recherche et d'innovation sur le sport. - « :

Scientifiques et journalistes ont été très attentifs à l'athlétisme lors des Jeux olympiques d'Amsterdam en 1928 : fallait-il laisser les femmes courir le 800 mètres et un tel effort était-il compatible avec la féminité ? La chute d'une concurrente à l'arrivée suscite un tel scandale que le 800 mètres ne figure plus dans le programme féminin jusque dans les années 1960...

Les fédérations masculines adaptent les règlements à la fragilité supposée des femmes : on réduit le terrain, on prend des poids moins lourds... Le conservatisme de Vichy ne remet pas en cause cette évolution ; au contraire, toutes les fédérations féminines autonomes sont supprimées par une loi de 1940.

De là jusque dans les années 60, le sport féminin connaît une évolution continue et sous contrôle, quel que soit le régime. La dynamique reste très importante sous Vichy, pour les femmes comme pour les hommes, et la pratique sportive se développe dans les années 50 et 60 : 10% des Français pratiquent un sport à a fin des années 50, 30 à 35% à la fin des années 60, mais les femmes ne représentent toujours que 6,7% des licenciés au début des années 1960 et 10% en 1970 - elles pratiquent de plus en plus, mais essentiellement en dehors des fédérations. L'événement sportif, s'il entre dans la vie quotidienne des Français, reste masculin qu'il s'agisse de la presse, de son lectorat ou encore des principaux sportifs. L'on ne compte que 10% de femmes dans les délégations aux jeux olympiques et quand Michèle Ostermeyer remporte une médaille d'or de lancer de disque aux jeux de Londres, en 1948, pas un journaliste n'est présent ; la presse ne commence à s'intéresser à elle qu'à ses deuxième et troisième médailles. Le silence, retombé autour d'elle quelques semaines après, reflétait les attentes limitées des lecteurs de l'époque. Si celles-ci augmentent du temps de Kiki Caron, de Colette Besson et des soeurs Goitschel, elles n'ont rien de comparable avec la présence d'un Jean-Claude Killy par exemple. Le discours médiatique, politique et journalistique continue de relayer les anciennes représentations essentialistes et les textes officiels demeurent ceux des années 20 à l'image du Règlement général d'éducation physique - méthode française, qui explique que « les femmes ne sont point faites pour lutter mais pour procréer ».

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