a souhaité intervenir en tant qu'entrepreneur, afin de proposer un service national civil pour le cinéma, le théâtre, la littérature et la musique, en direction des jeunes des banlieues. Il a suggéré que la France propose un « prototype » dans ce domaine, susceptible de servir de modèle à d'autres pays, dans la mesure où toutes les nations d'Europe devront affronter ce problème des banlieues. Il a précisé qu'une telle politique devait être impulsée par les pouvoirs publics, c'est-à-dire à la fois par l'Etat et par les collectivités territoriales.
Avant de présenter ce projet, M. Roger Planchon a expliqué pour quelles raisons il s'estimait fondé à parler des banlieues. A cette fin, il a retracé ce qui, dans sa carrière et ses initiatives passées, lui donnait l'expérience et la crédibilité nécessaires pour justifier sa présente démarche :
- en 1945, alors que n'existait plus aucune vie théâtrale en province, il a créé le premier théâtre « fixe » de province, à Villeurbanne, faisant ainsi preuve -avec d'autres artistes- d'un volontarisme politique, supérieur à celui des élus, en matière de décentralisation artistique ; il a refusé, d'ailleurs, plusieurs propositions de direction de grands établissements parisiens ;
- dans les années 50, alors que la province ne bénéficiait d'aucune salle d'art et essai, ni d'aucun film en version originale, il a agi de façon à inciter les régions à s'impliquer dans le financement du cinéma ; il a été également co producteur d'un nombre important de films (170 au total) ;
- dans le domaine du cinéma, il a initié, en outre, la création des commissions régionales des films, ainsi que celle du premier studio en province à Lyon.
Revenant à la présentation de son projet de service national civil, M. Roger Planchon a indiqué qu'il s'agissait de regrouper des moyens humains et financiers existants au profit des banlieues, et donc au service de la Nation. Il a proposé, ainsi, d'organiser la coopération des élèves des écoles artistiques et cinématographiques à la fois avec les jeunes « leaders » de banlieue attirés par les secteurs artistiques et avec les professionnels qui organisent des représentations théâtrales dans les écoles.
Après avoir précisé que son plan avait recueilli l'accord des ministères de la culture et de l'éducation nationale, ainsi que celui du Centre national de la cinématographie (CNC), il a détaillé les modalités de son projet :
- il s'agit de demander aux élèves des principales écoles artistiques, en contrepartie de la gratuité de leur formation supérieure, de consacrer, à la fin de leurs études, une année à la transmission aux jeunes des banlieues des compétences acquises lors de leur scolarité, dans le cadre d'un service national civil ;
- parallèlement, les « leaders » des banlieues intéressés se verraient aidés pour réaliser un projet amateur, qui, s'il était sélectionné, leur donnerait droit à une formation, d'une durée d'une année ;
- enfin, il serait proposé de revoir les modalités d'intervention extérieure dans le domaine de l'éducation artistique afin de regrouper les forces existantes ; on pourrait demander aux jeunes des banlieues ainsi formés de partager leurs savoirs avec les élèves, notamment par l'organisation de mini-spectacles. Cela serait plus efficace que les interventions actuelles des professionnels du spectacle dans les établissements scolaires.
a évoqué les trois phases de l'organisation d'un tel projet :
- tout d'abord, un temps de préparation, d'environ 6 mois (janvier à juin), au cours duquel il serait proposé aux écoles d'art de préparer un spectacle sur un sujet donné ; en cas de sélection, les jeunes concernés bénéficieraient d'un an de service national civil, rémunéré par exemple au niveau du SMIC (salaire minimum interprofessionnel de croissance). Parallèlement, les jeunes des banlieues prépareraient un spectacle sur le même thème, qui serait présenté dans leur région, les équipes amateurs réussissant la sélection pouvant accéder à une école d'art ;
- en second lieu, le temps des études, d'une durée d'environ deux mois (août-septembre). Les élèves des écoles de banlieue ainsi que les étudiants échangeraient, sur la base du savoir acquis, sur le thème travaillé. Si le spectacle ou le scénario étaient sélectionnés, la possibilité leur serait offerte de réaliser un « pilote » d'environ dix minutes, ce qui intéresserait nécessairement les producteurs. Ils pourraient être amenés à réaliser de mini-documentaires, mini-reportages ou mini-fictions ;
- enfin, le temps de la diffusion, tout au long de la période scolaire de neuf mois.
a jugé nécessaire une réflexion sur les aides publiques, la priorité de leur allocation aux banlieues devant être affirmée. Ceci aurait aussi pour avantage de fixer des critères aux pouvoirs publics, pour l'attribution des subventions. Ceci nécessite un engagement réel des élus, auquel la commission des affaires culturelles du Sénat pourrait contribuer.