a rappelé que, depuis l'année dernière, les crédits de la Mildt constituent une action rattachée à la mission « Direction de l'action du Gouvernement », cette nouvelle présentation budgétaire reflétant le recentrage opéré par cet organisme sur sa fonction de coordination.
En effet, avec un budget qui, en 2010, s'établira à 29,8 millions d'euros de crédits, la Mildt elle-même ne s'occupe directement que d'une infime partie de la lutte contre la drogue et la toxicomanie. Elle est cependant au coeur de cette politique. Rattachée au Premier ministre, elle a été chargée d'élaborer le plan gouvernemental 2008-2011 et elle en assure le pilotage national. Dans ce cadre, elle a élaboré, pour la première fois cette année et à la demande de la commission des affaires sociales, un document de politique transversale selon lequel le montant cumulé dédié à la lutte contre les drogues dans le budget de l'Etat s'élève à près de 932 millions d'euros. Ajoutés aux 267 millions consacrés à la prise en charge sanitaire des personnes, définie par la loi de financement de la sécurité sociale, ces crédits constituent une enveloppe totale de près de 1,2 milliard destinée, l'année prochaine, à lutter contre les drogues et la toxicomanie. Cette somme ne paraît pas disproportionnée au regard de l'impact des drogues sur la santé publique : on estime que 20 % des décès en France chaque année leur sont attribuables.
La part de financement consacrée à l'éducation et à la prise en charge sociale et sanitaire des personnes absorbe plus de la moitié du budget total, et dépasse donc celle se rapportant à la répression, l'essentiel relevant du budget de l'éducation nationale et de celui de l'enseignement supérieur et de la recherche, ce qui paraît légitime pour lutter contre la consommation précoce de substances addictives qui s'effectue parfois dès l'âge de dix ou onze ans. La politique française de lutte contre les drogues est donc clairement du côté de la prévention.
De nombreux cloisonnements demeurent néanmoins, qui nuisent à l'efficacité de la politique menée. Ainsi, l'action de l'éducation nationale est encore trop peu coordonnée avec celle des autres acteurs du système.
Plus généralement, la Mildt s'est nettement orientée, depuis la prise de fonction de son actuel président, vers une politique de responsabilisation des individus et de restauration de l'autorité. La campagne de communication menée en 2009 sur le statut juridique des substances avait ainsi clairement pour but de rompre avec les pratiques antérieures fondées sur la réduction des risques, ce qui pouvait aboutir à tolérer certains comportements concernant les drogues dites « douces », voire à envisager un « bon usage » du cannabis par exemple.
La Mildt a également souhaité mettre face à leurs responsabilités les employeurs et les parents auxquels elle estime qu'il appartient de faire respecter les interdits sociaux. En 2009, elle a organisé deux forums régionaux sur les addictions au travail qui déboucheront, l'an prochain, sur l'organisation d'états généraux ; elle a aussi commencé à préparer les états généraux de la parentalité prévus pour début 2010. La préfiguration de ceux-ci a été confiée par la Mildt au professeur Philippe Jeammet, que la commission des affaires sociales avait précédemment auditionné et qui avait à l'époque affirmé la nécessité « que la société donne un message clair et mette fin à sa promotion incessante de la destructivité ». Cette volonté de responsabilisation des porteurs d'autorité pour qu'ils exercent leur rôle de prescripteur de comportements s'inscrit dans une tendance européenne analogue en matière de lutte contre les drogues : la Norvège, la Suède et les Pays-Bas ont lancé, à ce titre, des programmes dont l'évaluation semble plutôt positive.
Plus globalement, la question fondamentale est celle de l'évaluation de l'action publique. Or, avec 193 mesures regroupées en 44 objectifs, le plan gouvernemental 2008-2011 risque fort de devenir un simple catalogue dont l'efficacité ne pourra réellement être mesurée à court terme ; d'où la nécessité d'une évaluation de fond, inscrite dans la durée, afin de saisir les tendances sociales en matière de consommation de drogues et, surtout, leurs déterminants. Obliger à respecter la loi est nécessaire, mais il est important aussi de savoir pourquoi elle ne s'impose pas d'elle-même. Ce devrait être le travail de l'observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT) qui a mené l'évaluation du plan 1999-2002, mais n'a plus été sollicité depuis lors. La détermination des indicateurs permettant de mesurer l'efficacité de la politique publique devrait lui être confiée et donner lieu à une publication annuelle. On ne dispose à l'heure actuelle que d'un indicateur budgétaire se résumant au nombre de mesures prises, fourni par la Mildt, et d'une description précise de la situation des drogues en France, présentée par l'OFDT, mais sans lien avec l'efficacité potentielle de la législation.
Sous réserve de ces réflexions, M. Gilbert Barbier, rapporteur pour avis, a proposé de donner un avis favorable au budget attribué pour 2010 à la Mildt.