Intervention de Francis Giraud

Commission des affaires sociales — Réunion du 16 janvier 2007 : 1ère réunion
Santé — Menaces sanitaires de grande ampleur - examen du rapport

Photo de Francis GiraudFrancis Giraud, rapporteur :

a indiqué que la proposition de loi, dont il est le premier signataire, ne crée pas de nouveaux mécanismes, mais vise à rationaliser l'existant en donnant un cadre juridique solide à un ensemble disparate, construit empiriquement au fil des ans.

La France a certes réalisé des progrès considérables depuis 2001 dans les domaines de la veille et de l'alerte sanitaires, mais des faiblesses importantes demeurent.

En premier lieu, aucun dispositif d'ensemble n'est prévu pour la rémunération, la protection sociale ou la couverture juridique des professionnels de santé volontaires pour se rendre en urgence sur les lieux touchés par une catastrophe ou par une épidémie.

En second lieu, la logistique relative aux produits de santé et équipements achetés et stockés dans le cadre des différents plans de traitement des crises sanitaires est assurée par la direction générale de la santé avec des effectifs humains trop réduits et dans des conditions ne permettant pas d'en garantir une gestion optimale.

Enfin, un dernier élément de faiblesse tient à l'absence de stratégie alternative dans le cas où les professionnels de santé seraient eux-mêmes massivement affectés par la propagation d'une pandémie virale ou bactériologique. Leur absentéisme serait alors un facteur aggravant de la crise.

En réponse à ce constat, la proposition de loi vise à renforcer les moyens de prévention et de gestion des menaces sanitaires de grande ampleur par la mise en place de deux instruments : un corps de réserve sanitaire qui permettra d'augmenter les ressources en personnel de santé ; un établissement public, chargé tant de l'administration de la réserve sanitaire que de la logistique des produits et équipements prévus par les différents plans de prévention et de gestion des situations de catastrophe, d'urgence et de menace sanitaires graves.

a ensuite présenté le dispositif proposé. Il a indiqué que la constitution d'un corps de réserve sanitaire repose sur le volontariat et que cet instrument a d'abord vocation à être utilisé sur le territoire national. La réserve sanitaire comprendra, en effet, des professionnels de santé en activité ou retraités depuis moins de trois ans, ainsi que des personnes poursuivant des études médicales et paramédicales sous condition de niveau d'études. Elle pourra être engagée sur place ou dans d'autres régions, lors de crises localisées, de type chikungunya, ou lors de crises étendues, de type pandémie grippale. Elle pourra être affectée en structure hospitalière, publique ou privée, ou bien en renfort au sein d'un cabinet libéral.

Evoquant l'hypothèse de l'envoi de cette réserve sanitaire à l'étranger, en réponse à un besoin exprimé par un Etat, comme l'Indonésie après le tsunami de décembre 2004, M. Francis Giraud, rapporteur, a clairement écarté tout risque de polémique : les professionnels de santé utilisés dans ce cadre n'auront pas pour vocation de concurrencer les unités de la sécurité civile et de sapeurs-pompiers déléguées par la France, mais de compléter leur action sur le plan strictement sanitaire.

La proposition de loi prévoit que la réserve sanitaire se décompose en une réserve d'intervention et en une réserve de renfort. La réserve d'intervention sera appelée en priorité et ses membres seront soumis à des règles de formation et de perfectionnement plus contraignantes que celles imposées aux membres de la réserve de renfort. La réserve de renfort permettra aux volontaires de s'engager sur des obligations de disponibilités moindres et sera mobilisée en « deuxième rideau », si le système sanitaire appuyé par la réserve d'intervention ne parvient plus à faire face à ses obligations.

Par ailleurs, le statut très protecteur envisagé pour le réserviste constitue l'un des points forts de la proposition de loi.

Les membres de la réserve sanitaire jouiront, en particulier, d'une totale continuité de leurs droits en matière de protection sociale et, le cas échéant, d'ancienneté, d'avancement et de congés payés.

Ce statut favorable est complété par la protection de l'Etat accordée au réserviste en cas de mise en cause de sa responsabilité civile ou pénale à l'occasion de son activité dans la réserve sanitaire. De même, l'Etat indemnisera le réserviste, ou ses ayants droit, pour les dommages subis dans ce cadre.

Le second volet du dispositif propose la mise en place d'un établissement public administratif exerçant trois fonctions principales : d'abord, administrer la réserve sanitaire et assurer la projection opérationnelle des réservistes ; ensuite, mener, à la demande du ministre chargé de la santé, des actions de prévention et de gestion des risques sanitaires exceptionnels, et notamment acquérir, fabriquer, importer, distribuer et exporter des produits et services nécessaires à la protection de la population face aux menaces sanitaires graves ; enfin, exercer les missions d'un établissement pharmaceutique pour assurer la couverture en médicaments répondant à des besoins non satisfaits, faisant l'objet d'une rupture ou d'une cessation de commercialisation ou d'une production en quantité insuffisante.

a indiqué que ce nouvel établissement public a vocation à prendre la suite du fonds de prévention des risques sanitaires, créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

Il a rappelé que le Sénat, puis la commission mixte paritaire, avaient adopté, sur la proposition du sénateur Alain Vasselle, rapporteur des équilibres financiers, trois amendements relatifs aux modalités de gestion et de financement du fonds : le premier a organisé la présence au sein du conseil d'administration, à parité avec les représentants de l'Etat, de représentants des régimes d'assurance maladie, dans la mesure où ces derniers contribuent au financement du fonds ; le deuxième a imposé que le montant de la contribution annuelle de l'assurance maladie au financement du fonds soit fixé et voté en loi de financement de la sécurité sociale, et non établi par simple arrêté des ministres compétents, sans contrôle parlementaire ; le troisième a plafonné à 50 % la participation de l'assurance maladie au financement du fonds, conformément à la position de principe constante de la commission qui considère que la prise en charge des mesures de protection sanitaire relève du domaine régalien et donc de l'Etat.

a indiqué qu'il proposera de réinsérer ces trois dispositifs dans la proposition de loi, à l'identique pour les deux premiers et sous réserve d'adaptations pour le troisième. En ce qui concerne, en effet, l'encadrement de la contribution de l'assurance maladie au financement des dépenses d'équipement, qui avait été adopté contre l'avis du Gouvernement, il pourrait être assoupli en autorisant le franchissement ponctuel du seuil de 50 %, à condition que cette moyenne soit respectée sur une période de trois ans.

En conclusion, les chances de succès de la mise en place d'une réserve sanitaire supposent, d'une part, la sensibilisation la plus large possible aux principes de base de la médecine de crise, d'autre part, la garantie que participer à cette réserve n'occasionnera pas une perte de revenu. Il appartient au ministre de la santé de prendre des engagements sur ce point en séance publique.

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