Intervention de Christian Gaudin

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 18 novembre 2009 : 1ère réunion
Contrôle budgétaire sur la politique du crédit d'impôt recherche — Point d'étape

Photo de Christian GaudinChristian Gaudin, rapporteur spécial :

Enfin, la commission a effectué un point d'étape sur le contrôle de M. Christian Gaudin, rapporteur spécial, sur le bilan de la réforme et l'évaluation de la politique du crédit d'impôt recherche.

Procédant à l'aide d'une vidéo-projection, M. Christian Gaudin, rapporteur spécial, a tout d'abord déclaré que ses travaux sur le crédit d'impôt recherche (CIR) ne sont pas encore achevés, en particulier parce que les statistiques pertinentes du Gouvernement ne devraient être disponibles qu'au début de l'année 2010. Il semble néanmoins utile de faire un point d'étape avec les commissaires au moment de l'examen du projet de loi de finances pour 2010.

Il a ensuite rappelé que le CIR a été créé par la loi n° 82-1126 du 29 décembre 1982 de finances pour 1983, et qu'il s'appliquait alors à l'excédent des dépenses de recherche et développement (R&D) exposées au cours d'une année par rapport aux dépenses de même nature exposées au cours de l'année précédente. Son équilibre a été changé successivement par :

- la loi n° 2003-1311 du 30 décembre 2003 de finances pour 2004, qui a introduit une part « en volume », au taux de 5 %, au côté de la part traditionnelle « en accroissement », dont le taux a alors été ramené de 50 % à 45 % ;

- la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, qui a doublé le taux de la part en volume, à 10 %, et réduit le taux de la part « en accroissement » à 40 % ;

- la loi n° 2007-1822 du 24 décembre 2007 de finances pour 2008, qui a triplé le taux de la part « en volume », dont le taux « de droit commun » est désormais de 30 %, supprimé la part « en accroissement » et déplafonné le CIR, qui était jusqu'alors limité à 16 millions d'euros. Toutefois, au-delà de 100 millions d'euros de dépenses de R&D, le taux du crédit d'impôt ne s'élève qu'à 5 %.

a souligné que ces réformes ont changé la nature du CIR : de « coup de pouce ponctuel » aux entreprises l'année où elles effectuent un effort particulier en matière de recherche et développement, celui-ci est devenu une aide structurante, visant à encourager fortement les dépenses de R&D sur le territoire national.

Il a ensuite observé que la dépense fiscale associée au CIR, qui s'élevait à environ 500 millions d'euros en 2003, est passée à 700 millions d'euros en 2005 du fait des premiers effets de la réforme de la loi de finances pour 2004 précitée, puis à un milliard d'euros en 2007. S'agissant de la réforme de la loi de finances pour 2008 précitée, les premiers éléments transmis par le Gouvernement laissent présager une dépense fiscale de 2 milliards d'euros en 2009 et de 2,5 milliards d'euros en 2010, hors l'effet de trésorerie exceptionnel lié à la mesure de remboursement immédiat du CIR, instauré pour 2009 par l'article 95 de la loi n° 2008-1443 du 30 décembre 2008 de finances rectificative pour 2008 et que l'article 4 du projet de loi de finances pour 2010 propose de prolonger d'un an. A terme, le crédit d'impôt recherche devrait engendrer un coût annuel de 4 milliards d'euros pour l'Etat. Dès lors, il est devenu un élément bien identifié de la fiscalité française, à l'intérieur comme à l'extérieur des frontières du pays.

Puis M. Christian Gaudin, rapporteur spécial, a constaté que le CIR, dans son état actuel, suscite trois grands types d'interrogations, voire de critiques :

- les premières portent sur la légitimité de cet effort financier de l'Etat, qui empêcherait une augmentation plus sensible des crédits dévolus à la recherche publique ;

- les deuxièmes conduisent à s'interroger sur la cible atteinte par le crédit d'impôt. Par exemple, la répartition de la dépense fiscale entre entreprises de différentes tailles ou de différents secteurs économiques peut susciter des débats ;

- les troisièmes concernent la sécurité juridique et fiscale du dispositif. Les PME, en particulier, restent très préoccupées par la question du contrôle fiscal et de la définition du périmètre d'éligibilité de leurs dépenses.

a enfin présenté les premières pistes auxquelles le conduisent ses travaux.

En premier lieu, il a plaidé en faveur d'un maintien de l'économie générale du CIR. En effet, une telle stabilité apparaît cohérente avec l'horizon d'investissement de la plupart des entreprises actives en matière de R&D. De plus, l'image de la fiscalité française auprès des investisseurs internationaux en serait renforcée. Par ailleurs, un changement incessant de règles pénalise en tout premier lieu les entreprises qui ont le moins de capacité à suivre l'évolution des lois et, éventuellement, à répartir différemment leurs investissements selon les pays, c'est-à-dire les PME.

Il a ensuite relativisé certaines critiques souvent adressées à l'égard du CIR. Ainsi, il a indiqué que, si les grandes entreprises sont les plus grands bénéficiaires du mécanisme en chiffres absolus, les PME ont également profité de la réforme du dispositif issue de la loi de finances pour 2008 précitée, ce qu'ont souligné l'ensemble de leurs représentants auditionnés jusqu'à présent. De fait, seule une société qui ferait plus que doubler tous les ans ses investissements éligibles y perdrait, une telle situation ne pouvant être qu'exceptionnelle. S'agissant de la répartition sectorielle du CIR, il a observé que, corrigés de l'effet holding qui a pu biaiser certaines études, les derniers chiffres disponibles montrent que l'industrie capte plus de la moitié du crédit d'impôt, les banques en absorbant environ 2 %.

a toutefois observé que le fichier actuel des bénéficiaires du CIR laisse de côté 29,6 % de « holdings » qui ne peuvent être rattachées à un secteur d'activité. Certes, il s'agit généralement de « têtes de pont » de groupes importants dont on peut imaginer qu'ils ont souvent une dominante industrielle. Mais il apparaît indispensable que le fichier soit amélioré afin de permettre un suivi plus précis de cette importante dépense fiscale.

Il a également souhaité poursuivre ses travaux afin d'établir des préconisations susceptibles de renforcer la sécurité juridique et fiscale des entreprises qui utilisent le CIR, ce que pourrait permettre, par exemple, la définition d'un document de référence unique décrivant les dépenses éligibles. En revanche, l'état des finances publiques ne permet pas, pour le moment, d'envisager une extension du champ desdites dépenses éligibles, mais pour l'avenir, le financement des prototypes ou de la preuve de concept pourraient y être inclus.

Un débat s'est instauré à l'issue de cette présentation.

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