Intervention de Josselin de Rohan

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 6 octobre 2010 : 1ère réunion
Transposition de la directive européenne 2009-43-ce relative à la coordination des procédures de passation de certains marchés de travaux dans les domaines de la défense et de la sécurité — Communication

Photo de Josselin de RohanJosselin de Rohan, président :

Le Parlement européen et le conseil ont adopté en 2009 le « paquet défense ». Ce paquet est composé de deux directives qui devront être transposées dans les législations nationales dans un délai de deux ans à compter de leur adoption.

La première directive simplifie les conditions des transferts de produits liés à la défense. Elle nous sera présentée la semaine prochaine par notre collègue Yves Fromion. Elle a pour objectif de réduire les barrières à la libre circulation des équipements de défense dans l'espace communautaire.

La seconde directive, relative à la coordination des procédures de passation de certains marchés publics et dans les domaines de la défense de la sécurité, dont Daniel Reiner va détailler le contenu, vise à harmoniser les règles émanant des codes de marchés publics des états membres pour permettre une meilleure transparence et plus de concurrence dans le processus d'achat des équipements de défense.

Ces deux directives constituent un véritable tournant par rapport au régime dérogatoire qui régit la production et l'achat d'armement protégé par l'article 296 du traité dont l'interprétation, sans doute extensive, a permis aux Etats de limiter les intrusions de la Commission dans un domaine de souveraineté. Les enjeux de la transposition sont donc extrêmement importants.

Les effets de la crise économique et financière et la nécessité de redresser les finances publiques que connaissent tous les pays européens se traduisent par des réductions des budgets de défense. Cette crise est également une opportunité pour mutualiser un certain nombre de programmes et d'action, pour accélérer la construction d'une Europe de la défense et pour consolider la base industrielle européenne. Il est évident qu'une partie des lacunes capacitaires que nous constatons est dû au manque de coopération entre les Européens. Toutefois, coopération et mutualisation supposent que nous définissions en particulier le socle des « capacités de souveraineté ».

L'une des questions qui se pose à travers la transposition de ces directives est celle de la construction d'un véritable marché européen des industries de défense. Toutefois, le risque existe que sans une clause de préférence européenne, similaire au Buy American act, nous n'ouvrions le marché européen à la concurrence de fournisseurs étrangers qui, aux Etats-Unis comme en Chine, sont fortement soutenus par leurs gouvernements respectifs.

Or, cette question de la préférence européenne est fortement contestée par un certain nombre de pays européens qui préféreraient, comme la Suède, la République tchèque ou même l'Italie, un level playing field, terme anglo-saxon qui désigne un environnement dans lequel l'ensemble des entreprises d'un marché donné doivent appliquer les mêmes règles, et ont les mêmes capacités à être compétitives. Ces pays mettent en avant l'obligation pour les Gouvernements de rechercher le meilleur rapport qualité-prix qui s'impose tant en termes politiques vis-à-vis des contribuables qu'en termes économiques dans le contexte de crise actuel.

Au-delà des aspects techniques de la transposition de ces deux directives du « paquet défense » se posent donc des problèmes politiques particulièrement importants puisqu'ils touchent à la souveraineté et à l'indépendance nationales mais aussi à l'opportunité de faire progresser ce qu'on appelle « l'Europe puissance ». Je passe la parole à Daniel Reiner.

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