Intervention de Raymond Vall

Commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire — Réunion du 22 novembre 2011 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2012 — Mission agriculture pêche alimentation forêt et affaires rurales et compte d'affectation spéciale développement agricole et rural - examen du rapport pour avis

Photo de Raymond VallRaymond Vall, rapporteur pour avis :

Nous parlerons tout à l'heure du nouveau schéma national des infrastructures de transport (Snit), publié aujourd'hui !

Le programme de développement rural hexagonal décrit les actions ayant vocation à être soutenues sur la période 2007-2013, avec de considérables mesures horizontales. Aux fonds européens s'ajoutent la contribution de l'État et celle des collectivités territoriales. Malgré ces soutiens, je suis inquiet pour l'avenir des territoires ruraux, car l'État se désengage de l'entretien des infrastructures routières ou ferroviaires - je vous fais grâce du déficit de Réseau ferré de France (RFF). En fait, nous craignons la délocalisation de certains stockages. D'ailleurs, nous y sommes, puisque dans ma région on envisage d'implanter à Port-la-nouvelle ou à Bordeaux, mais pas dans le Gers, les stocks tampons destinés à combattre la spéculation. Il est dramatique d'en arriver là !

Dans son rapport, Gérard Bailly a tiré la sonnette d'alarme pour l'élevage bovin allaitant. L'Institut de l'élevage a publié en septembre une étude elle aussi assez inquiétante, car l'élevage français ne tire pas suffisamment profit des marchés internationaux. En chantier depuis un an, la mise en place d'un GIE export s'est heurtée à l'opposition des industriels. Un groupement export, plus souple, devrait pouvoir être mis sur les rails. Pour le lait, en revanche, la situation semble s'améliorer, malgré l'incertitude inhérente à la fin des quotas en 2015.

Pour le lait comme pour l'élevage allaitant, l'enjeu de la modernisation reste entier. Le budget accompagne cette restructuration en reconduisant des dispositifs ayant fait leurs preuves : le plan de modernisation des bâtiments d'élevage et le plan de performance énergétique. Par ailleurs, FranceAgrimer met à disposition des crédits de modernisation, comme pour la mise aux normes de bâtiments d'élevage accueillant des truies gestantes ou la mise aux normes des cages de poules pondeuses.

Cette louable démarche ne permet cependant pas de rattraper notre retard, en particulier dans le domaine des énergies renouvelables. Je déplore l'arrêt catastrophique de la filière photovoltaïque.

La vocation première de l'agriculture est de nourrir la population, mais il n'est pas interdit de valoriser au mieux les coproduits, pour améliorer la situation économique de l'agriculteur, en premier lieu des éleveurs.

La situation de l'élevage n'est pas suffisamment solide pour affronter des crises climatiques conjoncturelles sévères comme la sécheresse du printemps 2011, avec un déficit de précipitations de 30 % à 50 % sur l'ensemble du territoire français en mai, atteignant 75 % dans certaines régions. Il n'y a pas d'agriculture sans eau, mais les agences de bassin n'ont qu'une faible capacité d'intervention. En juin, le président de la République a annoncé un plan à cinq ans pour la création de retenues d'eau. Encore faut-il qu'il soit suivi d'effet.

Ensuite, le plan d'aide annoncé par Bruno Le Maire pour contrer la sécheresse a bien fonctionné, mais sans rassurer les éleveurs : la décapitalisation des troupeaux ne s'est arrêtée qu'avec le retour de la pluie.

La solidité économique des élevages repose aussi sur la sécurité de l'approvisionnement en alimentation animale. La conclusion de contrats interfilières est utile, mais leur valeur est surtout morale. Nous n'échapperons pas à la relance des productions de protéines végétales, pour que la ferme France dépende moins des importations.

Nous avions débattu du lien entre agriculture et alimentation en juillet 2010 grâce à la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche. Pour certains territoires, la course à la productivité à outrance est une folie. En demandant des produits de qualité, le consommateur peut être un allié de l'agriculteur. Désormais, l'article 53 du code des marchés publics autorise les collectivités à prendre en compte « les performances en matière de développement des approvisionnements directs de produits de l'agriculture », ce qui ouvre la voie aux circuits courts en restauration collective.

Les crédits budgétaires contribuant à transformer le rapport à la production agricole sont cependant bien légers. L'agriculture biologique progresse, passant de 2,45 % de la surface agricole utilisée en 2009 à 3,5 % en 2011, mais la cible de 6 % en 2013 risque d'être difficile à atteindre. En ce domaine, les aides viennent principalement de l'Europe, pour plus de 80 millions d'euros. Au niveau national, l'essentiel du soutien au bio est de nature fiscale, puisque les crédits budgétaires représentent un peu plus de 6 millions d'euros, alors que le crédit d'impôt à l'agriculture biologique représente 18 millions d'euros, après la réduction opérée l'année dernière, alors que la France ne fait que combler son retard.

L'encouragement des circuits courts est plutôt l'affaire des collectivités locales, bien que l'enveloppe du programme 206 destinée à mettre en oeuvre le programme national de l'alimentation lui consacre 18 % de ses crédits.

Traditionnellement rapporté avec cette mission, le compte d'affectation spéciale développement agricole et rural (CASDAR) est remarquablement stable : alimenté par la taxe sur le chiffre d'affaires des entreprises agricoles, il finance notamment la recherche via les instituts techniques agricoles. Ses recettes et ses dépenses sont maintenues à 110 millions d'euros. Comme chaque année, on peut regretter que la maquette budgétaire de l'État n'intègre pas ses dépenses dans le budget de la mission « Agriculture », car il est paradoxal de financer des actions pérennes, notamment la recherche agricole, par des recettes indexées sur la conjoncture économique.

Pour conclure, je recommande de ne pas adopter les crédits de la mission « Agriculture » qui ne répond qu'imparfaitement à nos attentes. En revanche, j'émets un avis favorable à l'adoption des crédits du CASDAR.

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