a rappelé que le Commissariat a été crée par une ordonnance prise par le général de Gaulle le 18 octobre 1945, afin de tirer le meilleur parti de l'atome pour la défense, la recherche, l'industrie et la santé. Ces missions historiques correspondent toujours à ses quatre grands domaines de compétences. Il a précisé qu'un acte législatif est encore nécessaire pour que le CEA endosse la nouvelle dénomination, souhaitée par le Président de la République, de Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives, et a exprimé le souhait que ce changement de dénomination intervienne rapidement, à l'occasion du vote de la loi de finances rectificative pour 2010.
Les quatre missions du CEA l'amènent à conduire la recherche technologique et la recherche fondamentale dans un nombre limité de domaines, pour une large part régaliens ou stratégiques pour le pays, en tant qu'opérateur de l'Etat sur l'ensemble de la chaîne de valeur : recherche, développement, innovation et formation. Ses objectifs majeurs sont doubles :
- être reconnu par le monde industriel et par l'Etat, sur la base de ses résultats et ses méthodes, comme l'un des organismes de recherche technologique de premier rang en Europe, créateur majeur de valeur et de propriété intellectuelle et industrielle dans ses quatre grands domaines de compétences ;
- garantir en toutes circonstances à l'Etat, par sa maîtrise parfaite des technologies concernées, la pérennité de la dissuasion nucléaire et la sécurité globale du pays.
a précisé que, en matière de défense, le CEA est possesseur des armes atomiques qui sont mises à la disposition des forces armées, et qu'il en assume la totale responsabilité. En 2009, le Commissariat a réussi à qualifier une arme nouvelle sur la base de modélisations et de simulations, sans réaliser d'essai nucléaire, ce qui constitue une première dans le monde.
Le CEA, qui est dirigé par un administrateur général conseillé sur le plan scientifique par un haut commissaire, est placé sous la tutelle de sept ministères différents : défense ; affaires étrangères et européennes ; enseignement supérieur et recherche ; écologie, énergie, développement durable et mer ; économie, industrie et emploi ; budget. Il travaille également en liaison étroite avec le Premier ministre et se trouve en relation directe avec le Président de la République. A ce titre, il participe au conseil de politique nucléaire et au conseil de défense.
Le CEA est organisé en cinq directions opérationnelles : énergie nucléaire, recherche technologique, applications militaires, sciences de la matière, sciences du vivant. Il a, par ailleurs, des missions d'enseignement et de diffusion des connaissances et de valorisation et diffusion technologique.
Evoquant l'histoire du CEA, M. Bernard Bigot a rappelé que le Commissariat a une responsabilité majeure dans la dissuasion nucléaire de la France, dont a d'abord découlé son pôle défense. Les armes nucléaires nécessitant une électronique « durcie », et les Etats-Unis refusant dans les années 1960 de transférer à notre pays leur technologie dans ce domaine, le CEA a été amené à développer une expertise et une compétence pour l'électronique. Dès ses débuts, le Commissariat a été sensible à l'impact potentiel et aux bénéfices des rayonnements ionisants, ce qui a entraîné la création de ses directions de la santé et du nucléaire civil. Enfin, à partir de 1995, le CEA a développé des compétences dans les domaines des matériaux, de la thermohydraulique et du contrôle-commande, qui ont été à l'origine de son engagement dans les énergies renouvelables.
Le CEA dispose de dix centres de recherche implantés dans huit régions, cinq d'entre eux se consacrant aux applications militaires et les cinq autres aux activités civiles. Son budget annuel s'est élevé à 3,5 milliards d'euros en 2008, dont 2,3 milliards de subventions publiques et 1,2 milliard de recettes découlant de ses activités contractuelles, des apports des agences de financement et de sa contribution au démantèlement et à l'assainissement des sites nucléaires. Les effectifs s'élevaient, en 2008, à 15 800 salariés permanents, auxquels s'ajoutent 1 560 collaborateurs mis à disposition par les organismes partenaires. Cette même année, le CEA a produit 4 000 publications scientifiques et déposé 530 brevets prioritaires, ce qui l'autorise à se comparer au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) ou à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM).
Evoquant la mission de défense et de sécurité globale du CEA, M. Bernard Bigot a indiqué que celle-ci se décline en cinq domaines d'intervention :
- la conception, la fabrication, et le maintien en condition opérationnelle et le démantèlement des têtes nucléaires ;
- la mise en oeuvre du programme Simulation pour garantir à la France la pérennité de sa dissuasion, sans essai nucléaire ;
- la conception et la maintenance des réacteurs pour la propulsion nucléaire navale, tant pour les sous-marins que pour les porte-avions ;
- la non-prolifération et la surveillance du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires ;
- la lutte contre le terrorisme nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRDC).
Evoquant l'action du CEA dans le domaine des énergies, il a distingué les quatre domaines suivants :
- le Commissariat apporte un soutien constant à l'énergie nucléaire, notamment à l'exportation, et prépare la quatrième génération de réacteurs, qui permettra d'utiliser 100 fois mieux l'énergie présente dans l'uranium, à l'horizon 2040, ce qui reviendrait à disposer de 8 000 années de production sur la base du stock actuel de combustible ;
- le Commissariat contribue au développement des énergies renouvelables, qui permettront de réduire la dépendance de la France aux énergies fossiles, notamment le solaire thermique, photovoltaïque et de concentration. Il a estimé que la meilleure pratique, pour les énergies renouvelables, est de les collecter et de les consommer localement ;
- le Commissariat travaille à développer le stockage de l'énergie électrique, qui est essentiel dans la mesure où il n'y a pas d'adéquation spontanée entre la demande et l'offre d'électricité. Considérant que la généralisation des batteries serait associée au développement des véhicules électriques, il estimé que, sur la base d'un parc de véhicules particuliers et utilitaires de 36 millions d'unité, effectuant des distances annuelles de 15 000 kilomètres pour les premiers et de 36 000 kilomètres pour les seconds, la puissance nécessaire sera environ équivalente à celle de six tranches nucléaires. De surcroît, il a observé que le stockage dans les batteries des véhicules serait un moyen efficace de régulation de la production et de la consommation d'électricité ;
- le Commissariat étudie le moyen d'extraire des hydrocarbures de synthèse de la biomasse, afin de réaliser de manière quasi-instantanée ce qui nécessite des millions d'années dans la nature. Relevant que les ressources de la forêt et des déchets agricoles équivalent annuellement à 40 millions de tonnes équivalent pétrole non utilisées, il a estimé que, si l'on parvenait à transformer en hydrocarbures un quart seulement de cette ressource, les besoins d'hydrocarbures non substituables de l'aviation et des véhicules lourds seraient couverts.
Evoquant les interventions du CEA dans le démantèlement et l'assainissement nucléaires, M. Bernard Bigot a souligné que l'enjeu majeur, dans ce domaine, est d'assurer une gestion responsable de la radioactivité induite par les activités industrielles et de recherche-développement nucléaires. Après leur arrêt, les installations doivent être démantelées et assainies dans le strict respect des règles de sûreté et en minimisant l'impact sur l'environnement, dans une double logique de maîtrise des coûts et des délais. Ces objectifs impliquent une planification sur plusieurs dizaines d'années, et l'engagement d'un énorme chantier dont les dépenses, pour la seule année 2009, se sont élevées à 640 millions d'euros.
En ce qui concerne les technologies innovantes pour l'information et la santé, il a rappelé que, s'agissant des premières, la compétence du CEA s'étend des microprocesseurs aux systèmes intelligents tandis que, s'agissant des secondes, sa compétence va de la compréhension des phénomènes fondamentaux aux diagnostics et aux thérapies. Le CEA travaille en partenariat avec l'INSERM, le CNRS et le système hospitalier. Par ailleurs, le Commissariat a construit une approche cohérente de la valorisation de la recherche, qui emprunte trois voies principalement : les partenariats avec les industriels, qu'il s'agisse de grands groupes ou de PME ; les licences de savoir-faire propres auprès des industriels ; les créations d'entreprises technologiques. En matière de brevets, M. Bernard Bigot a souligné l'importance de disposer d'un service contentieux étoffé, capable d'engager des actions lourdes, qui constitue la seule garantie que les brevets déposés soient effectivement respectés. A cet égard, il a rappelé que le CEA avait le premier développé la technologie des écrans plats, sans pouvoir protéger les brevets afférents vis-à-vis des industriels coréens. L'insertion du CEA dans le système de recherche prend la forme, principalement, de relations conventionnelles avec les multiples acteurs qui interviennent dans le cadre des quatre Alliances constituées pour les sciences de la vie et de la santé, l'énergie, les sciences et technologies du numérique, ainsi que l'eau, l'alimentation, l'environnement et le climat. Elle prend la forme, également, des financements distribués par l'Agence nationale de la recherche (ANR), par l'ADEME et par Oséo Innovation.
En ce qui concerne le niveau européen, il a indiqué que le CEA, dans le cadre du 7ème programme-cadre de recherche et développement (PCRD), est partenaire dans plus de 230 projets, souvent en tant que coordinateur de projets. Pour la construction de l'espace européen de la recherche, le CEA participe aux initiatives technologiques conjointes, aux plateformes technologiques, et est membre fondateur de l'Alliance européenne des organismes de recherche dans le domaine de l'énergie. Le CEA a répondu aux appels d'offres lancés par l'Institut européen de technologie créé en 2009, et a été retenu pour les trois projets de communautés de la connaissance et de l'innovation relatifs, respectivement, à l'énergie, au climat, et à l'information et la communication.
Abordant l'utilisation faite par le CEA de la fraction de l'emprunt national qui lui sera affectée, M. Bernard Bigot a identifié cinq enjeux principaux :
Le premier enjeu est relatif à l'enseignement supérieur et à la formation, auxquels sont affectés 11 milliards d'euros. Le CEA est partenaire de nombreux campus d'excellence : Saclay, Aix-Marseille, Lyon, Grenoble, Bordeaux, Montpellier et Paris.
Le deuxième enjeu est relatif à la recherche, à laquelle sont affectés 8 milliards d'euros, dont 1 milliard d'euros pour les laboratoires d'excellence, 1 milliard d'euros pour les équipements d'excellence et 2,4 milliards d'euros pour les plateformes de santé et de biotechnologies. Par ailleurs, 3,5 milliards sont affectés au fonds national de valorisation de la recherche et de l'innovation, qui permettra de soutenir les Instituts Carnot, quatre campus d'innovation, et les sociétés régionales d'accélération des transferts de technologies. M. Bernard Bigot a souligné la nécessité d'agir rapidement, sans trop attendre de retours sur investissement.
Le troisième enjeu est relatif aux filières industrielles et aux PME, auxquelles sont affectés 6,5 milliards d'euros, dont 1 milliard d'euros pour le développement des véhicules du futur, en partenariat avec Renault et l'ensemble des entreprises de la filière des batteries pour véhicules électriques, et 2,5 milliards pour le soutien à la croissance des PME innovantes.
Le quatrième enjeu est le développement durable, auquel sont affectés 5 milliards d'euros, dont 2,6 milliards pour les projets de recherche-développement dans le secteur des énergies renouvelables, et 1 milliard d'euros pour le réacteur nucléaire de nouvelle génération et le traitement sûr des déchets.
Enfin, le cinquième enjeu est le numérique, auquel sont affectés 4,5 milliards d'euros, dont 750 millions d'euros pour le soutien aux technologies de numérisation, et 1,75 milliard d'euros pour le développement des usages et des contenus innovants.