Intervention de Nicole Maestracci

Mission commune d'information sur les politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion — Réunion du 12 février 2008 : 1ère réunion
Audition de Mme Nicole Maestracci présidente et M. Hervé de Ruggiero directeur général de la fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale fnars

Nicole Maestracci :

a d'abord rappelé que la FNARS avait été fondée en 1956 par de grandes associations nationales de lutte contre la pauvreté (notamment le Secours catholique, Emmaüs, Aurore, l'Armée du Salut), afin de venir en aide à des personnes pour lesquelles il n'existait pas alors de prise en charge publique, notamment les ex-détenus et les prostituées. La FNARS a mis en place avec les pouvoirs publics les premiers centres d'hébergement pour personnes en difficulté. Elle rassemble aujourd'hui près de 800 associations qui couvrent la plus grande partie du champ de l'insertion et qui gèrent ensemble environ 85 % des centres d'hébergement (centres d'hébergement et de réinsertion sociale, centres d'hébergement d'urgence, centres d'hébergement éclaté), 50 % des ateliers et chantiers d'insertion, financés notamment par les contrats aidés, et 50 % des foyers d'accueil pour demandeurs d'asile. Animant un réseau de 22 associations régionales, elle permet aux organismes qui la composent de bénéficier d'une veille juridique, de conseils et d'une assistance technique.

La FNARS s'efforce d'influencer les politiques publiques nationales, locales et européennes dans le champ de la pauvreté et de l'exclusion et signe également des conventions avec les pouvoirs publics pour l'exercice de certaines missions dans ce domaine. Elle a tenu en 2006-2007 ses états généraux, qui lui ont permis de formuler de nouvelles propositions sur la prise en charge des personnes en difficulté.

Au cours de la récente affaire des sans-abri du canal Saint-Martin, les pouvoirs publics ont confié à la FNARS une mission de coordination des associations et des travailleurs sociaux, afin d'établir un diagnostic de la situation des personnes concernées et de proposer des solutions. Une conférence de consensus a été ensuite organisée le 18 décembre dernier, puis le Premier ministre a confié au député Etienne Pinte une mission sur l'hébergement et le logement des personnes sans abri ou mal logées, celle-ci devant s'appuyer sur les propositions du comité de suivi de la loi sur le droit au logement opposable. Le Premier ministre a annoncé le 29 janvier un plan d'action sur lequel la FNARS travaille actuellement, tout en regrettant que les moyens annoncés soient, selon elle, insuffisants.

En réponse à une question de Mme Brigitte Bout, présidente, sur une éventuelle aggravation de la pauvreté et de l'exclusion et sur l'évolution des catégories de populations touchées par ce phénomène, Mme Nicole Maestracci a d'abord regretté un manque de données croisées sur la pauvreté, malgré les éléments fournis par l'INSEE et par l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion. La FNARS souhaite que ce dernier dispose de moyens plus importants, afin, notamment, que les plans d'hébergement ne soient plus élaborés sans une connaissance précise des besoins.

D'après les données disponibles, la pauvreté monétaire a diminué depuis dix ans. Cependant, la pondération de cet indicateur par le critère du taux d'effort dans le logement permet de constater que les personnes vivant au niveau du seuil de pauvreté ne peuvent pratiquement pas se loger. A un niveau de revenu médian, le taux d'effort pour le logement est encore de 50 %. Il convient également de prendre en compte le coût élevé des transports, qui constitue souvent un obstacle à la reprise d'emploi. Le « reste à vivre » peut donc rester très bas malgré la diminution de la pauvreté monétaire. Disposer de nouveaux indicateurs plus fins est indispensable, notamment eu égard à l'objectif fixé par le Président de la République à M. Martin Hirsch de réduire de 30 % la pauvreté en cinq ans.

a ensuite souligné que les catégories de personnes concernées par la pauvreté avaient évolué. Les personnes ayant un emploi sont ainsi plus souvent touchées qu'auparavant, même lorsqu'elles vivent en couple. La complexité du système d'indemnisation tend également à laisser de côté les jeunes de 18 à 25 ans, en particulier dans les zones sensibles, où le chômage est très fort. S'ils ne peuvent pas s'appuyer sur des solidarités familiales, ces jeunes peuvent très vite glisser dans la grande pauvreté. Ils représentent ainsi 20 % des personnes accueillies dans les centres d'hébergement alors qu'ils constituent seulement 9 % de la population totale.

Les associations observent par ailleurs une aggravation des problèmes de santé malgré la mise en place de la couverture maladie universelle (CMU). En effet, divers obstacles gênent l'accès des personnes les plus marginalisées à la CMU, et le rapport Chadelat a montré en outre que certains médecins refusent de recevoir les patients qui relèvent de cette couverture. La crise du système psychiatrique public est également en cause : les maladies les plus graves sont prises en charge de manière prioritaire au détriment des troubles de comportement dont souffrent beaucoup de sans-domicile fixe, ce qui rend plus difficile leur accueil dans les centres d'hébergement.

a par ailleurs constaté que les personnes âgées étaient de plus en plus touchées par la pauvreté en raison de revenus insuffisants. Elle a également souligné l'importance des addictions, en particulier de l'alcoolisme, dont il est bien souvent difficile de savoir s'il est la cause ou la conséquence de l'exclusion.

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