Intervention de Nicole Maestracci

Mission commune d'information sur les politiques de lutte contre la pauvreté et l'exclusion — Réunion du 12 février 2008 : 1ère réunion
Audition de Mme Nicole Maestracci présidente et M. Hervé de Ruggiero directeur général de la fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale fnars

Nicole Maestracci :

Concernant l'hébergement des sans-abri, Mme Nicole Maestracci a souligné la complexité excessive du système et la nécessité d'unifier son cadre juridique. Personne ne dispose à ce jour d'une vision précise et claire des caractéristiques et de la qualité du dispositif d'hébergement. Cependant, il apparaît clairement que si les places sont théoriquement assez nombreuses pour héberger tous les sans-abri, la qualité de ces places est insuffisante pour répondre véritablement aux besoins. Les places d'hébergement ont en effet été créées au gré des plans d'urgence successifs, sans que soit prise en compte la diversité des sans-abri et de leurs besoins. Des hébergements avec dortoirs ont également été conservés alors que les sans-abri refusent de s'y rendre. Enfin, en région parisienne, environ 30 % des personnes bénéficiant de l'hébergement d'urgence sont suffisamment intégrées dans la société, mais ne peuvent bénéficier d'un logement en raison de son coût trop élevé. Elles occupent ainsi des places au détriment de personnes en situation bien plus difficile.

De manière générale, les politiques déployées ont seulement visé, jusqu'à présent, la simple mise à l'abri, ce que les Anglais appellent « revolving door » (la porte tournante). Le traitement de l'urgence sociale s'est ainsi largement inspiré de celui de l'urgence médicale alors qu'il exige davantage de durée et de continuité dans l'accompagnement. Entre 2000 et 2005, les crédits d'urgence d'hébergement ont ainsi connu une hausse de 25 % alors que le nombre de sans-abri a continué à augmenter. La comparaison avec d'autres pays européens montre également l'inadéquation de la politique menée jusqu'à présent. Il convient désormais de privilégier le suivi des personnes tout au long de leur parcours, de leur hébergement en urgence jusqu'à leur accession en logement, en passant par les séjours en hôtel. La FNARS a ainsi pu constater le succès de la cellule de suivi des sans-abri mise en place lors de la crise du canal Saint-Martin. Une telle prise en charge est finalement moins coûteuse pour la société, aussi bien financièrement qu'en termes de sécurité et de cohésion sociale.

En ce qui concerne les femmes battues, la FNARS dispose de structures d'accueil de bonne qualité dans tous les départements. Le problème principal est maintenant celui du conjoint, dont la loi sur les violences au sein du couple a prévu l'éviction mais pas l'accompagnement, alors même qu'un conjoint violent non accompagné présente un très fort risque de récidive. Il est également nécessaire de mieux prendre en compte les enfants du couple dont un conjoint est violent. Enfin, l'importante augmentation des violences conjugales constatée dans les statistiques est sans doute en grande partie due au fait que les femmes portent plus volontiers plainte qu'auparavant.

Dans le domaine de l'insertion par l'activité économique, la FNARS a mis en place de nombreux ateliers et chantiers d'insertion, avec le souci d'accompagner les personnes le plus longtemps possible, alors que la prise en charge par les pouvoirs publics ne s'étend pas au-delà de la durée du contrat aidé.

Concernant le revenu de solidarité autonomie (RSA), Mme Nicole Maestracci a rappelé que la FNARS avait participé à la commission « Famille et vulnérabilité » présidée par M. Martin Hirsch et partageait son diagnostic sur le caractère excessivement complexe et peu incitatif du système, diagnostic à l'origine du RSA. Cependant, elle a souligné deux difficultés dans la mise en oeuvre de cette mesure. D'une part, elle sera limitée aux bénéficiaires du revenu minimum d'insertion et de l'allocation de parent isolé et ne bénéficiera donc ni aux jeunes, ni aux travailleurs pauvres, ni aux personnes en contrat aidé vivant sous le seuil de pauvreté. La FNARS préconise au contraire une allocation compensatrice bénéficiant à toute personne qui, ayant un travail, n'atteindrait pas le seuil de pauvreté. D'autre part, il existe, a-t-elle estimé, un certain risque que les employeurs maintiennent les salaires à un bas niveau, sachant qu'il y aura compensation par les pouvoirs publics.

a également souligné la difficulté, constatée par les différents acteurs du Grenelle de l'insertion, d'organiser un pilotage et une coordination efficace du service public de l'emploi, des missions locales, de l'association pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) et des autres organisations de formation professionnelle, sans se laisser enfermer dans les catégories administratives : on constate ainsi pour le moment un ciblage des politiques sur les chômeurs indemnisés mais une attention insuffisante portée aux personnes non indemnisées tels que les chômeurs en fin de droits et les jeunes. Ainsi, certains jeunes non indemnisés ne peuvent pas bénéficier d'une formation alors que tous les crédits de la formation professionnelle ne sont pas dépensés.

La FNARS souhaite enfin la mise en place d'un contrat d'insertion unique qui remplacerait tous les contrats aidés actuels, différenciés par catégorie de personnes et de situations. Il s'agirait de faire confiance aux travailleurs de terrain pour adapter ce contrat en termes de type de formation, de durée... aux personnes concernées, avec un contrôle a posteriori sur le parcours des personnes. La FNARS réfléchit ainsi actuellement aux problèmes juridiques posés par la création d'un tel contrat.

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