Intervention de Dominique Leclerc

Mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale — Réunion du 18 mai 2010 : 1ère réunion
Rendez-vous 2010 pour les retraites — Examen du rapport d'information

Photo de Dominique LeclercDominique Leclerc, rapporteur :

Puis M. Dominique Leclerc, rapporteur, a ajouté que des évolutions plus profondes du système doivent être désormais engagées. Face aux inéquités, à l'opacité, à la complexité, le rendez-vous 2010 doit poser des jalons en vue d'un rapprochement des paramètres et des régimes de retraite.

En ce qui concerne les règles de calcul des pensions et les efforts contributifs des régimes, des rapprochements progressifs pourraient porter sur le salaire de référence pris en compte pour le calcul de la pension, les âges d'ouverture des droits et les taux de cotisations. Naturellement, ces évolutions devront être progressives et tenir compte du fait que les régimes spéciaux ont été réformés il y a seulement deux ans.

Quant aux rapprochements entre les régimes, il ne s'agit pas de créer un régime unique rassemblant tous les régimes de base et complémentaires, mais bien d'opérer des regroupements pouvant avoir un sens. La création d'une caisse unique pour l'ensemble des fonctionnaires mériterait par exemple d'être étudiée. Ces rapprochements pourraient être facilités si les gestionnaires des régimes étaient conduits à échanger régulièrement entre eux sur leurs modes de fonctionnement. A cet égard, le concept de « maison commune des retraites » proposé par la CGT est intéressant. Il serait également important que les architectures des différents régimes soient harmonisées, ce qui faciliterait une plus grande cohérence des gouvernances.

Le droit à l'information des assurés devra aussi être renforcé. La création du GIP Info Retraite a constitué un progrès incontestable qui mérite d'être salué. A terme, il conviendrait que chaque assuré puisse, pratiquement à tout moment, calculer ses droits, par exemple sur un site Internet.

Enfin et surtout, ce rendez-vous doit permettre d'engager la refondation du système, de préparer une réforme structurelle qui ne peut être conduite que sur une période longue d'environ vingt ans. La situation actuelle, caractérisée par la montée sourde de tensions intergénérationnelles, ne peut perdurer. C'est pourquoi il est proposé d'envisager le passage progressif à un système par points dans les régimes de base.

Plusieurs avantages peuvent en être attendus :

- toutes les cotisations versées au cours d'une carrière donnent des droits à pension et la pension versée est directement dépendante des cotisations accumulées ;

- les éléments de solidarité du système sont isolés et identifiables ;

- un régime par points évite de prendre des engagements qui ne peuvent être tenus : la valeur de service du point, contrôlée par les gestionnaires du régime, devient l'élément central de régulation sans empêcher cependant un relèvement des cotisations. Celles-ci donnent alors de nouveaux droits à pension ;

- ce système est surtout particulièrement lisible pour les assurés, et donc susceptible de rassurer des jeunes générations qui ne croient plus dans notre modèle de retraite.

Ce passage à un régime par points pourrait être accompagné de l'introduction de la neutralité actuarielle par génération, qui est un élément essentiel du système de retraite suédois, consistant à faire en sorte que chaque génération perçoive en pensions ce qu'elle a versé en cotisations, assorti d'un taux d'actualisation. Progressivement, ces évolutions permettraient d'instaurer une retraite « à la carte », les salariés effectuant des choix éclairés entre une durée d'activité plus longue et une meilleure pension ou une durée d'activité plus courte et une pension plus faible.

En tout état de cause, une telle réforme doit être le fruit d'un processus de débat bien plus large que la concertation organisée dans le cadre des rendez-vous périodiques sur les retraites. En Suède, le processus de refondation du système s'est étalé sur une quinzaine d'années. Le rendez-vous 2010 pourrait donc être l'occasion de poser le principe de cette réforme et d'engager un grand débat démocratique.

Ce débat national pourrait permettre d'aborder globalement les conséquences du vieillissement de la population. Retraite, maladie, dépendance, logement, les besoins à satisfaire pour faire face à ce bouleversement des âges de la vie sont considérables, sans que les moyens financiers soient extensibles à l'infini. Il faudra donc définir des priorités.

Pour conclure, il faut souhaiter que le rendez-vous 2010 ne soit pas seulement un rendez-vous financier et comptable, mais aussi l'occasion d'engager une véritable refondation du pacte intergénérationnel qui a autrefois présidé à la création de l'assurance vieillesse.

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