Tout d'abord, s'agissant du régime juridique, il existe deux sources normatives principales, la loi et la convention d'assurance chômage. Le médiateur, dans son dernier rapport, a évoqué cette difficulté. Les contentieux sont tantôt orientés vers les tribunaux administratifs, tantôt vers les tribunaux civils. Je ne suis pas sûr cependant que cette difficulté puisse être résolue à court terme car les partenaires sociaux sont attachés à leurs prérogatives en matière d'assurance chômage.
S'agissant des redondances entre les ex-Assedic et l'ex-ANPE, l'une d'elles portait sur le profilage, comme je l'ai indiqué. Cette démarche, mise en oeuvre par l'Assedic, était souvent reconduite à l'ANPE.
En ce qui concerne l'implantation régionale de Pôle emploi, j'avais demandé à Mme Bernadette Malgorn, lorsqu'elle siégeait au sein de l'instance nationale provisoire, de réaliser un rapport sur cette question. J'ai souhaité que les instances paritaires régionales, qui connaissent bien le terrain, jouent un rôle important dans ce domaine. Globalement, les points d'accueil seront moins nombreux. Cependant, certaines antennes de l'ANPE et des Assedic se trouvaient auparavant très proches, ce qui justifie une fusion des locaux. Au total, nous veillons à ce que la distance entre un demandeur d'emploi et une agence ne soit pas excessive.
En ce qui concerne l'organisation du travail, je rappelle que je suis président d'un conseil d'administration et non directeur général. Je n'ai donc pas à interférer sur des questions comme la gestion des relations avec les partenaires sociaux en interne, ce qui paraîtrait d'autant plus maladroit que siègent au conseil d'administration les représentants des organisations syndicales.
S'agissant des effectifs, d'importants débats ont lieu et des études sont en cours. Il convient de relativiser la comparaison avec d'autres pays. En outre, les psychologues de l'Afpa et les personnels anciennement chargés du recouvrement au sein des Assedic constituent des apports supplémentaires. En ce qui concerne les CDD, la situation ancienne qui a été évoquée concerne l'ex-ANPE.
La question de la « culture d'entreprise » de Pôle emploi reste difficile. Celle-ci ne se mettra pas en place du jour au lendemain. Dans certains cas, une personne peut assumer deux métiers, quand la pression ne s'avère pas trop forte. Par ailleurs, je crois beaucoup à la notion de collectif de travail. Face à un demandeur d'emploi, des agents peuvent constituer un binôme.
La situation était-elle meilleure auparavant ? J'ai vécu de nombreuses situations de fusion au sein de différentes entreprises, chez Usinor-Sacilor ou Air France, et je sais que les salariés conservent longtemps le souvenir de leur ancienne maison. L'enjeu consiste à dépasser cette nostalgie, sans la gommer pour autant, en se projetant vers des objectifs positifs.
La décentralisation et la territorialisation constituent une ouverture vers la sous-traitance ou la co-traitance. La capacité à travailler ensemble, sur la base d'un cahier des charges, et à apprécier le service rendu par tel ou tel partenaire paraît indispensable. Cependant, pourquoi confie-t-on à la sous-traitance les chômeurs qui vivent les plus grandes difficultés ? On peut se poser la question. Quoiqu'il en soit, plus la régionalisation sera effective, plus les personnels de Pôle emploi seront impliqués dans la démarche.
Quand une institution est périodiquement attaquée de l'extérieur, ces attaques peuvent susciter des phénomènes de repli. Je me souviens de personnes, lorsque j'exerçais des fonctions aux Assedic, qui avaient tendance à dissimuler leur profession et qui, par la suite, en sont devenues fières. Encore faut-il que la collectivité reconnaisse leur apport. Certes, il existe des cas douloureux : la réglementation s'applique globalement et ne tient pas toujours compte des spécificités de chacun.
Le médiateur national apporte son soutien aux médiateurs qui exercent dans l'ensemble des régions. Il ne faut pas hésiter à saisir ces instances. Souvent, dans le contexte d'une réglementation complexe et changeante, les agents ont peur de prendre des décisions qui pourraient faire jurisprudence.
En ce qui concerne les radiations, je tente de les suivre en termes de statistiques et de déceler d'éventuelles évolutions. Mois par mois, des variations peuvent être constatées. Cependant, depuis l'époque où j'exerçais des fonctions au sein de l'Unedic, c'est-à-dire depuis 1992, je n'ai pas assisté à des évolutions majeures, ni à l'injonction d'un gouvernement pour opérer des radiations massives. D'ailleurs, même si des pressions de cette sorte s'exerçaient sur les agents, ils ne s'y plieraient pas facilement. On ne vient pas travailler par hasard à Pôle emploi, pas plus que dans les hôpitaux, il faut posséder une fibre sociale. Même si des réactions de saturation s'expriment, les agents sont très sensibles aux difficultés des publics qu'ils côtoient.
Du travail collectif reste à effectuer. Après la phase de mise en place et la crise que nous avons traversée, il convient de définir une nouvelle étape, et de trouver un nouveau souffle. Pôle emploi est une institution encore jeune. La pire situation consisterait en un repli sur elle-même, dans un déni de la réalité. A l'inverse, un excès de critiques infondées constituerait l'autre écueil.
En France, le taux de chômage peine depuis longtemps à descendre en-dessous de 8 % de la population active. Chez les jeunes, il atteint 25 %. Chaque année, six millions de personnes passent par Pôle emploi. Cette institution rend de grands services. La communauté nationale doit l'inciter à mieux faire sans lui imputer toutes les difficultés d'ordre économique que le pays rencontre. Les agents exercent un métier difficile. Ils n'ont pas forcément de réponse à fournir aux personnes à la recherche d'un emploi, alors que cette problématique constitue la préoccupation majeure des Français.