Puis les commissions ont entendu Me Hélène Poivey-Leclercq, avocat, représentante du Conseil national des barreaux, de l'Ordre des avocats au barreau de Paris et de la Conférence des bâtonniers.
avocat, représentante du Conseil national des barreaux, de l'Ordre des avocats au barreau de Paris et de la Conférence des bâtonniers, a estimé que le débat sur la résidence alternée s'inscrit dans le cadre d'un débat plus large sur l'égalité entre les hommes et les femmes. Tout comme ce dernier, il ne peut faire l'objet d'une réponse définitive.
S'appuyant sur sa pratique professionnelle, elle a relevé que les couples qui s'engagent dans des procédures de divorce connaissent en général l'existence de ce mode de résidence : les hommes ont tendance à considérer qu'il devrait constituer le principe, et non l'exception, et les femmes à y voir une menace au motif que leur conjoint n'a pas eu, dans l'éducation quotidienne des enfants, une implication aussi importante que la leur. La demande de résidence alternée s'apparente, pour certains couples, à un « droit de jouissance alternée » des enfants. Les demandes des parents ne sont pas toujours guidées par le seul intérêt de leur enfant, mais par deux autres types de considération : le regard des autres et l'argent.
Bien souvent, la résidence alternée est socialement perçue comme une victoire pour le père et un échec pour la mère, comme un jugement sur les rapports de couple et comme une mesure de sanction à l'égard de la conduite de la mère dans l'éducation des enfants.
S'agissant des considérations pécuniaires, certains pères attendent de la résidence alternée une diminution des sommes à verser à la mère, moins par souci de réaliser des économies que de subvenir directement aux besoins de leur enfant et de lui marquer ainsi leur affection ; certaines mères redoutent à l'inverse une réduction des sommes reçues du père, par crainte que celui-ci n'utilise son pouvoir d'achat plus élevé pour essayer de s'attacher les faveurs de leur enfant.
L'intervention du juge aux affaires familiales est l'occasion de replacer l'enfant, si besoin en est, au centre du débat entre les parents. Elle se fait toujours discrète en cas d'accord entre ces derniers. L'attitude du juge face au principe même de la résidence alternée est variable : certains magistrats y sont systématiquement favorables ou, à l'inverse, opposés, mais la majorité d'entre eux apprécie au cas par cas l'opportunité de la mesure, le plus souvent après une enquête sociale ou une expertise médico-psychologique ainsi qu'une audition de l'enfant.
Malheureusement, les juges préfèrent, pour des raisons de coût, prescrire des enquêtes sociales plutôt que de véritables expertises médico-psychologiques. D'ailleurs, dès lors que ces enquêtes peuvent ne pas se dérouler de manière identique, au détriment du père ou de la mère, l'égalité de traitement justifierait d'exiger la présence de l'avocat.
En ce qui concerne l'audition de l'enfant, la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance, applicable au 1er janvier 2009, laisse les juges perplexes : elle suppose qu'ils aient une formation en psychologie, pour procéder à l'audition de jeunes enfants, mais aussi en sciences divinatoires, puisqu'elle leur confie de nouvelles fonctions de pythonisse, celles de vérifier « ... que le mineur a été informé de son droit à être entendu et à être assisté par un avocat. »
a souligné que l'acceptation sociale progressive de la loi du 4 mars 2002 relative à l'autorité parentale avait accru le nombre des accords parentaux sur la résidence alternée. D'une manière générale, on constate une plus grande sensibilité des parents aux intérêts de leurs enfants, d'autant que la récente réforme du divorce a permis de dédramatiser la procédure.
Enfin, on relève une évolution des contentieux, les pères ne se résignant plus à abandonner à la mère la garde de l'enfant. On doit davantage craindre à l'avenir le cas inverse, où aucun des deux parents ne souhaiterait accueillir ses enfants chez lui en permanence, en raison notamment de ses obligations professionnelles. Ce cas de figure se produit déjà.
En conclusion, Me Hélène Poivey-Leclercq a estimé qu'il n'est pas nécessaire de bouleverser le dispositif de la loi du 4 mars 2002. En particulier, il ne serait pas opportun d'interdire le recours à la résidence alternée en dessous d'un âge déterminé et il convient de conserver la possibilité donnée au juge d'imposer aux parents une résidence alternée, au moins à titre provisoire. Cependant, outre les modifications précédemment évoquées pour l'enquête sociale ordonnée par le juge, il serait légitime d'instituer une sanction pénale à l'encontre du parent qui n'exercerait pas son droit de visite et d'hébergement de son enfant, cette sanction faisant le pendant de celle déjà prévue en cas d'entrave par l'autre parent à l'exercice de ce droit.