a rappelé que cette communication avait lieu conformément aux nouvelles dispositions de l'article 53 de la loi de 1986 offrant aux commissions des affaires culturelles et des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat la possibilité de formuler un avis sur les contrats d'objectifs et de moyens (COM) conclus entre l'Etat et les sociétés de l'audiovisuel public, avant leur signature définitive.
A titre liminaire, il a relevé qu'il existait un véritable consensus sur l'utilité de ces contrats. En définissant, dans une perspective de moyen terme, des orientations stratégiques, il a estimé que des contrats de qualité pouvaient en effet contribuer à dynamiser et moderniser les relations que les sociétés publiques de l'audiovisuel entretiennent avec l'Etat.
Après s'être félicité de l'association du Parlement au bon fonctionnement du service public par l'intermédiaire de la transmission de ces documents, il a rappelé que les observations et critiques formulées par la commission à l'encontre du COM de Radio France en octobre dernier avaient ainsi été prises en compte par la tutelle et entraîné la modification du contrat dans le sens souhaité.
Evoquant la tonalité des COM examinés, il a indiqué que si ceux-ci constituaient des documents « politiques » permettant de mettre en valeur les résultats obtenus par le passé, ils devaient toutefois éviter de verser dans l'autosatisfaction ou dans la critique des concurrents.
A cet égard, il a rappelé que les différentes chaînes publiques et privées réalisaient des choix éditoriaux spécifiques dictés par des contraintes particulières qui ne pouvaient systématiquement faire l'objet de comparaison pertinentes avec Arte, seule chaîne de télévision française intégralement financée par la redevance.
Se penchant plus spécifiquement sur le contrat d'objectifs et de moyens d'Arte, il a estimé que le premier chapitre était le plus intéressant pour la commission, puisqu'il abordait deux sujets-clés : le soutien à la création et l'audience de la chaîne.
S'agissant du soutien à la création, il s'est réjoui des objectifs affichés par la chaîne en matière d'oeuvres audiovisuelles, d'oeuvres cinématographiques et de documentaires.
Il a regretté que la contribution au développement du documentaire ne soit pas quantifiée, mais a néanmoins souligné la progression des engagements de production d'oeuvres audiovisuelles et cinématographiques européennes pris par la chaîne. Ainsi entre 2006 et 2011, ces engagements progresseront de plus de 20 %, pour atteindre 67 millions d'euros par an, Arte se donnant ainsi les moyens de cofinancer de nouvelles oeuvres originales et de rivaliser, dans ce domaine, avec les autres chaînes du paysage audiovisuel.
Il a également noté qu'un effort particulier était envisagé en matière de financement de fiction française et en matière d'écriture et de développement afin de renouveler les thématiques de la fiction sérielle et de proposer des programmes alternatifs aux programmes anglo-saxons. Il a rappelé qu'il s'agissait là de l'une des principales faiblesses de la création française, les dépenses d'écriture ne représentant dans notre pays que 2 à 3 % de l'ensemble des dépenses de production, contre une proportion pouvant atteindre 10 % aux Etats-Unis.
En ce qui concerne l'audience, il a estimé que le contrat d'objectifs et de moyens ouvrait des pistes de réflexion intéressantes.
Il a souligné que l'audience demeurait la principale faiblesse d'Arte. Avec près de 210 millions d'euros de budget, la chaîne enregistre en effet une audience hebdomadaire cumulée inférieure à 10 millions de téléspectateurs, représentant 3,3 % de part d'audience sur le hertzien et 1,9 % de part d'audience sur la TNT.
Dans la mesure où la mission d'une chaîne de service public est de s'adresser à toutes les catégories de public, il s'est félicité de ce que la chaîne s'engage à élargir son public vers les jeunes actifs. Il a précisé que, pour ce faire, le contrat d'objectifs et de moyens prévoyait deux innovations notables : la mise en place d'une mécanique de grille rationalisée permettant de donner plus de lisibilité à cette dernière et de renforcer l'audience des premières parties de soirée et la possibilité offerte au téléspectateur de choisir entre la version originale et la version française lors de la diffusion de films sous-titrés.
Si, en matière de création et d'audience, ce contrat d'objectifs et de moyens recèle incontestablement des points positifs, il s'est toutefois interrogé sur la pertinence de certains choix. Compte tenu de la fiabilité relative des indicateurs d'opinion, il a notamment regretté le recours à des indicateurs qualitatifs pour mesurer la perception, par le public, du respect par les programmes de la chaîne de la diversité des points de vue et la perception, par ce même public, du reflet de la diversité des origines de la population en général.
Il a souhaité, par ailleurs, dans la mesure du possible, qu'en matière de financement d'oeuvres audiovisuelles et cinématographiques européennes, Arte mette en oeuvre ses engagements plus vite que les projections contenues dans le contrat.
Il a indiqué que l'autre chapitre du contrat méritant un commentaire était consacré aux « possibilités offertes par le numérique pour le service public ».
Il a rappelé que, compte tenu de l'extinction du numérique, du lancement de la télévision mobile personnelle (TMP) et de l'arrivée de la haute définition, l'ensemble des chaînes du service public était appelé à relever sur la période du COM de nombreux défis technologiques, à enveloppe budgétaire quasi constante.
Dans ce domaine, il a précisé qu'Arte souhaitait se lancer dans une politique résolument volontariste. La chaîne propose ainsi :
- de créer près de 2.000 nouveaux sites de diffusion numérique afin de couvrir d'ici à 2011, plus de 95 % de la population métropolitaine en télévision numérique terrestre, (TNT), conformément à la loi sur la modernisation audiovisuelle ;
- de diffuser simultanément Arte et Arte en haute définition sur le câble, le satellite et l'asymetric digital subscriber line (ADSL) dès 2007 ;
- de proposer Arte en haute définition sur la TNT dès le lancement des appels à candidatures prévus à cet effet ;
- de développer des contenus adaptés à la télévision sur les terminaux mobiles afin de diffuser Arte sur la TMP ;
- d'accroître ses efforts en matière de video on demand (VOD) afin de proposer au public une diffusion délinéarisée des programmes de la chaîne.
En première analyse, il a affirmé que l'on pouvait difficilement condamner cette volonté de diffuser les programmes d'Arte sur tous les supports. Ce programme ambitieux tranche en effet avec la frilosité caractérisant généralement les entreprises du service public en matière de nouvelles technologies.
Il a toutefois souhaité faire un certain nombre de remarques sur cette stratégie audacieuse.
D'une part, il s'est demandé s'il appartenait au service public d'être précurseur en matière de nouvelles technologies, compte tenu des surcoûts et des incertitudes qui caractérisent celles-ci lors de leur apparition sur le marché.
A cet égard, si l'argument selon lequel les programmes d'Arte (opéras, films, documentaires) sont particulièrement adaptés à la haute définition est tout a fait recevable pour justifier une stratégie offensive en ce domaine, celui consistant à affirmer que « la diffusion des programmes d'Arte en HD est importante pour favoriser l'introduction de cette nouvelle technologie » parait beaucoup moins convaincant.
Il a estimé, en effet, que l'introduction de technologies telles que la HD et la TMP en France se ferait avec succès sans la diffusion des programmes d'Arte dans la mesure où, selon les résultats des premières expériences en ce domaine, les téléspectateurs souhaitent avant tout retrouver sur ces supports les chaînes les plus populaires.
Dans le même ordre d'idée, il s'est interrogé sur l'opportunité de diffuser dès 2007 Arte et Arte en haute définition sur le câble, le satellite et l'ADSL. Il a estimé que le surcoût engendré par ce « simulcast » comparé à l'audience limitée de la chaîne sur ces supports (0,7 % de part de marché sur le câble et le satellite) devait faire l'objet d'une véritable réflexion.
D'autre part, il a insisté sur la nécessité de rester attentif aux modalités de financement d'une telle stratégie pour une chaîne quasi intégralement financée par la redevance.
Certes, l'arrêt total de la diffusion de la chaîne en analogique devrait permettre à terme un gain de 17 millions d'euros par an. Mais, avant cette date, la double diffusion analogique et numérique hertzienne, la diffusion de la chaîne en TMP et la diffusion de la chaîne en HD sur le câble, le satellite et l'ADSL pèseront fortement sur l'équilibre financier d'Arte, marqué par une progression modérée de la redevance et des recettes commerciales, qui passeront, entre 2006 et 2011, de 1 à 1,46 million d'euros.