Tout d'abord, la Cour des comptes a évalué, non l'entièreté de la période 2009-2010, mais une partie seulement. C'est le reproche méthodologique que je lui adresserais : on ne peut pas calculer la dépense sur toute la période alors que tous les paiements n'ont pas eu lieu, et mesurer l'impact sur une seule partie de ladite période. En outre, la Cour n'a pas pris en compte le chiffre de la croissance pour 2010, puisque nous le connaîtrons seulement en fin d'année.
Les 400 000 emplois recouvrent les emplois sauvegardés et créés. Comment définir un emploi sauvegardé, me direz-vous ? Laissez-moi vous donner un exemple. Un grand sous-traitant automobile de la région Centre était au bord du dépôt de bilan en février 2009. Pas moins de 1 500 emplois étaient en jeu. En coordination avec le préfet, remarquable en cette affaire, nous lui avons accordé une avance sur le remboursement du crédit d'impôt recherche de 50 millions d'euros. Nous sommes parvenus à débloquer les fonds en huit jours ! Ultérieurement, le chef de cette entreprise m'a confié : « Vous avez sauvé l'entreprise ! Sans vous, c'était la pendaison. » L'entreprise a également bénéficié de mesures de trésorerie. Comptabilisez-vous ces emplois-là ? Moi, oui. L'évaluation est difficile quand le sinistre n'a pas eu lieu. Le maréchal Foch disait : « Je ne sais pas qui a gagné la guerre, mais je sais bien qui l'aurait perdue. » Il en va de même pour l'emploi : je ne sais pas si nous avons sauvegardé des emplois, mais je sais qu'il y aurait eu des chômeurs.
Un effet d'aubaine sur le FCTVA ? Je ne le pense pas. Les collectivités ont investi 45 milliards d'euros en 2009 et se sont engagées à investir 54,5 milliards d'euros, soit 19 milliards de plus que la moyenne des trois années de référence. L'investissement a bien eu lieu. Nous ne nous sommes pas contentés de rembourser la TVA sur les opérations qui auraient eu lieu de toute façon. En outre, on observe généralement un rétrécissement des investissements les années qui suivent des élections municipales. Certes, il y a des exceptions vertueuses ! Mais, tout de même, le phénomène inverse s'est produit en 2009 avec 19 milliards d'investissement de plus que la moyenne. Ce n'est pas moi qui le dis, mais l'Insee : les collectivités signataires ont augmenté leur investissement de 4,8 %, celles qui ne l'étaient pas l'ont réduit de 13,8 %.
J'en viens aux substitutions de crédits. La Cour évalue leur montant à 300 millions d'euros, soit une part extrêmement faible aux dires mêmes du président de la Cour lorsqu'il a été auditionné à l'Assemblée nationale. La Justice et la Culture ont peut-être sous-consommé leurs crédits. Nous avons arrêté la liste des opérations dès janvier, liste qui ne comportait pas de substitutions. Peut-être les ministères ont-ils renoncé à des investissements programmés, profitant du plan de relance... Mais laissez-moi prendre l'exemple, qui me tient à coeur en tant qu'ancien avocat, de la rénovation de la « souricière » du Palais de justice à Paris. Le plan de relance l'a entièrement financé, la Chancellerie n'avait rien prévu. Peut-être cesserons-nous enfin d'être stigmatisés par l'Union européenne, et d'ailleurs, à juste raison : c'était une honte !
Les entreprises chargées de services publics ont engagé plus tard que prévu leur financement. La Cour des comptes n'a donc pas pu en rendre compte. Au total, elles ont engagé 87 % de leur budget relance.