Intervention de Nicolas de Warren

Mission commune d'information sur la sécurité d'approvisionnement électrique de la France et les moyens de la préserver — Réunion du 14 mars 2007 : 1ère réunion
Audition de M. Nicolas de Warren directeur des relations institutionnelles d'arkema

Nicolas de Warren, directeur des relations institutionnelles d'ARKEMA :

Puis M. Nicolas de Warren a observé que les risques de coupure allaient structurellement s'aggraver en raison des évolutions contrastées des profils de consommation et de production. Ainsi, le recul de la consommation industrielle électro-intensive entraîne une régression de la consommation « en base » et, par conséquent, une augmentation relative de la consommation « en pointe », plus délicate à gérer, tandis que le développement de la climatisation résidentielle va accroître la pointe en été. Par ailleurs, l'équilibrage de pointe va être rendu plus complexe en raison de l'évolution des climats, avec l'augmentation des sécheresses, des canicules et des vents nuls qui amoindrit et rend plus aléatoire la disponibilité des équipements hydrauliques et éoliens. Quant aux autres modes de production (CCG, biomasse, photovoltaïque, géothermie...), ils ne peuvent répondre dans l'immédiat aux besoins de la demande de pointe.

Au regard de ce constat, M. Nicolas de Warren s'est interrogé sur la contribution possible des industriels très électro-intensifs (EE+) face à ces différents défis. Il a estimé que certains d'entre eux pouvaient contribuer à la réserve primaire, dans la mesure où une interruption quasi-immédiate de leur activité est possible sur une dizaine de sites représentant un délestage potentiel de 1.000 MW. Selon lui, la définition des modalités techniques de cette interruption de l'activité devrait permettre au gestionnaire de réseau d'intervenir seul, sans préavis (ce qui distingue donc ce mécanisme de l'effacement programmé), cette substitution des responsabilités en cas d'urgence étant déjà organisée en Italie, en Grande-Bretagne, en Norvège, en Espagne et en Belgique.

Il a ainsi décrit plus précisément le régime appliqué en Italie depuis 2003. Dans le cadre de sa mission de service public, l'autorité de régulation de l'électricité italienne a mis en place un schéma national des sites effaçables sur préavis ou susceptibles d'être instantanément interrompus. Le gestionnaire du réseau, qui a négocié la possibilité d'intervenir seul sur les coupures, notamment pour les industries électro-intensives, définit annuellement le volume total d'électricité de secours à mobiliser (3.100 MW pour 2007) au titre de l'effacement programmé ou de « l'interruptibilité » immédiate. En contrepartie du risque d'une interruption brutale, les entreprises reçoivent une rémunération forfaitaire annuelle de l'ordre de 150 000 euros par MW, ainsi qu'un complément variable à raison de la réalisation du risque. Ainsi, lors de l'incident du 4 novembre dernier, l'interruption immédiate des industries EE+ a permis de mobiliser 800 MW de réserves primaires huit minutes seulement après la rupture qui, en venant s'ajouter aux 1.300 MW de délestage automatique et aux 2.500 MW de production supplémentaire, ont contribué à un rétablissement plus rapide de l'électricité pour les consommateurs.

a également développé le régime anglais d'interruptibilité immédiate, dit du « frequency control ». En pilotage manuel, la capacité assujettie est de 90 MW, avec un temps de réponse de 2 à 3 minutes, et en pilotage automatique, la capacité assujettie est de 150 MW, et le temps de réponse d'une demi-seconde. Le temps de rétablissement de l'électricité, la franchise entre les différents arrêts, le nombre maximal d'arrêts par jour, ainsi que les rémunérations forfaitaire et variable de sujétion sont fixées à l'avance. S'agissant du pilotage automatique, le nombre d'arrêts maximal par an est pré-établi lorsque la fréquence passe sous 49,65, 49,70 ou 49,75 hertz.

Affirmant que les mêmes possibilités techniques d'utiliser les EE+ comme réserve primaire existent en France, M. Nicolas de Warren a estimé qu'un nouveau cadre juridique devrait sans doute être envisagé pour les mobiliser. Il a en effet souligné que si la rédaction de l'article 15 modifié de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité prévoit la possibilité d'une contractualisation des effacements, il n'est pas certain qu'elle permette d'ouvrir à RTE la possibilité d'interrompre directement l'activité des industries électro-intensives. Aussi a-t-il suggéré qu'un dispositif législatif habilite le gestionnaire d'équilibre du réseau public de transport, en cas de menace immédiate sur le fonctionnement normal du réseau de transport d'électricité, à procéder à l'interruption immédiate des sites industriels à profil adapté, préalablement agréés, couverte, au-delà des coûts techniques, par une compensation forfaitaire pour sujétion de service public.

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