s'est inquiété de notre déficit en matière de transport aérien au vu des limites du parc d'avions actuel et des risques éventuels de décalage du programme A400M. Il s'est également interrogé sur les incidences de l'entrée en service du Rafale en matière de coût de maintien en condition des matériels aériens. Enfin, il a souhaité connaître les appréciations du chef d'état-major des armées sur le renforcement de la dimension interarmées dans notre défense et sur les relations entre la délégation générale pour l'armement (DGA) et les états-majors, s'agissant notamment de la bonne prise en compte des besoins opérationnels.
En réponse à cette première série d'interventions, le général Jean-Louis Georgelin a apporté les précisions suivantes :
- tous les ministres de la défense successifs, depuis M. Charles Hernu, ont souligné l'enjeu majeur constitué par l'espace pour nos capacités militaires ; avec un budget annuel de l'ordre de 400 millions d'euros, la France se situe, en la matière, au premier rang en Europe, devant le Royaume-Uni et l'Allemagne qui y consacrent respectivement 285 M€ et 110 M€ par an ; l'espace, comme le transport aérien, est l'un des domaines où il convient de se montrer plus ambitieux dans la recherche de synergies ; l'instauration d'une programmation spécifique, comme l'avait suggérée le groupe d'orientation présidé par M. Bujon de l'Estang, pourrait présenter le risque de déconnecter les choix effectués dans le domaine spatial des autres volets de notre politique d'équipement militaire ; il serait sans doute plus sage de mener une réflexion stratégique et capacitaire globale, le développement de capacités nouvelles, comme les satellites ou les drones, pouvant justifier de moindres besoins en équipements d'autres types ;
- l'exécution de l'actuelle loi de programmation militaire s'est caractérisée par trois changements majeurs qui en ont garanti la bonne mise en oeuvre : les budgets annuels successifs ont été conformes à la programmation, le financement des opérations extérieures a été assuré par des financements supplémentaires et les crédits ouverts sont restés disponibles. Cette loi de programmation a également été marquée par une prise de conscience du caractère crucial du maintien en condition opérationnelle, pour lequel un effort important a été consenti. Si des difficultés ont pu affecter certains aspects de l'exécution de la loi de programmation, elles résultent le plus souvent de facteurs propres à tel ou tel programme d'équipement ;
- le rythme des opérations extérieures est élevé, tant pour les hommes que pour les matériels dont l'usure est accélérée par un emploi intensif, mais il n'est pas excessif au regard du format de nos forces armées, dimensionné pour pouvoir faire face à un niveau d'engagement plus important ;
- le moral, dans les armées, est lié à la qualité de l'équipement et du commandement comme à l'intérêt du travail et des missions ; par ailleurs, les armées sont concernées par les mêmes préoccupations que celles qui traversent la société civile ; la professionnalisation a sans doute contribué à une certaine « banalisation » de l'état militaire, bien qu'il faille rester conscient, sur ce point, des spécificités du métier des armes ;
- l'importance de l'hélicoptère apparaît avec force dans les engagements militaires actuels, même s'il faut tenir compte de certaines restrictions d'emploi, et l'arrivée du NH 90 représentera une amélioration significative de nos capacités, compte tenu de l'usure plus rapide que prévu des Puma ; en ce qui concerne l'hélicoptère de combat Tigre, l'entrée de l'Espagne dans le programme a été l'occasion d'abandonner le développement d'une version antichar pour privilégier une version unique et polyvalente, dite « appui-destruction » (HAD) ; enfin, nos forces spéciales viennent d'être dotées d'un hélicoptère EC 725 adapté à leurs missions et particulièrement performant ;
- créée dans les années 1960, au moment où la France entendait se doter de la force de frappe, la DGA s'est notablement transformée depuis la fin de la guerre froide ; sans doute cette évolution est-elle appelée à se poursuivre dans le cadre plus général de l'adaptation de notre défense aux besoins générés par les conflits actuels, notamment sous la pression du développement de l'Europe de la défense ;
- chaque armée conserve sa personnalité mais, dans les faits, la vision interarmées s'impose de plus en plus, sous l'effet d'opérations engageant les moyens des trois armées, mais également parce que l'intérêt des armées elles-mêmes est de parler d'une seule voix.
A la demande du général Georgelin, le Général Thierry Cambournac, sous-chef d'Etat-major « Plans » à l'Etat-major des armées, a apporté les compléments d'information suivants :
- au cours des quatre premières années de la loi de programmation, les crédits de paiement ont été supérieurs aux autorisations d'engagement ; ce ne sera pas le cas en 2007, le niveau des autorisations d'engagement étant légèrement réduit pour éviter un montant trop élevé de « restes à payer » en fin d'année 2008, au terme de la programmation ;
- cette diminution des autorisations d'engagement a principalement porté sur quatre programmes ; l'hélicoptère de transport NH 90, dont les commandes ne porteront que sur 12 appareils en 2007, ce qui ne doit se traduire par aucun retard sur les échéances de livraison des appareils, ni par aucun surcoût, le montant de la dotation pour 2007 n'ayant d'ailleurs été réduit que de moitié par rapport aux prévisions initiales alors que les commandes seront réduites des deux tiers sur cette même année ; la future torpille lourde, programme sur lequel d'autres participations européennes peuvent être espérées ; le soutien du futur avion de transport A400M, dont la commande peut être ajustée du fait du déroulement prévisible du programme ; la commande d'équipements optionnels pour le Rafale, qui s'effectuera à un rythme légèrement inférieur à celui qui était prévu compte tenu d'une réévaluation plus précise du besoin ;
- les capacités de transport aérien viennent d'être renforcées avec l'entrée en service au 1er juillet dernier, dans le cadre d'un contrat de location, d'un premier avion à très long rayon d'action (TLRA), un second appareil devant entrer en service au 1er janvier 2007 ;
- la grande majorité des munitions d'artillerie ainsi que des munitions d'aviation sont fournies par l'industrie française ;
- le plan Vigipirate, auquel participent des unités provenant de toutes les armées et formations, mobilise actuellement 750 hommes qui s'ajoutent aux 550 participants à la posture permanente de sûreté ; au total ce sont 1.300 militaires qui concourent quotidiennement à la sécurité de nos concitoyens.