Intervention de Daniel Jouanneau

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 18 février 2009 : 1ère réunion
Audition de son exc. M. Daniel Jouanneau ambassadeur de france au pakistan

Daniel Jouanneau :

En réponse, M. Daniel Jouanneau a apporté les éléments suivants :

- le lien unissant l'armée et la religion a été renforcé par le général Zia, qui a contrebalancé le resserrement de l'alliance avec les Etats-Unis par une islamisation de l'armée ; les capitaines de l'époque sont maintenant généraux et ont une vision religieuse de leur mission de lutte contre les « infidèles », c'est-à-dire contre l'Inde ;

- les hauts gradés de l'armée sont, certes, formés aux Etats-Unis, mais n'ont cependant pas une admiration inconditionnelle envers ce pays, ce qui s'est publiquement manifesté lorsque le président Zardari y a effectué son premier voyage officiel. Les reproches émis alors l'ont conduit à se rendre, immédiatement après, en Chine ;

- le ressentiment de l'armée envers les Etats-Unis découle, en partie, des critiques incessantes formulées par les militaires américains combattant en Afghanistan contre sa supposée mansuétude à l'égard des menées d'Al Qaïda. Ainsi, en 2008, les Américains ont affirmé que de hauts dirigeants terroristes étaient hébergés dans les zones tribales pakistanaises, et ont enjoint à l'armée afghane de les neutraliser, faute de quoi, ils le feraient eux-mêmes ;

- les Américains basés en Afghanistan utilisent des drones Predator, armés de puissants missiles Hellfire, pour liquider les dirigeants supposés d'Al Qaïda dans ces zones tribales ; Islamabad se limite à des protestations formelles lorsque des terroristes avérés sont tués, mais sa position est de protester vivement si des populations civiles sont accidentellement touchées ;

- ces recherches relèvent du maintien de l'ordre et devraient donc être effectuées par la police pakistanaise et non par l'armée. Mais cette police est mal formée. L'aide américaine récemment promise au Pakistan, portant sur l'octroi de 1,5 milliard de dollars par an sur cinq ans, renouvelable (proposition de loi Biden-Lugar, devenue Kerry-Lugar), est conditionnée par la lutte pakistanaise contre le terrorisme. Elle reflète la stratégie de la nouvelle administration qui met l'accent à la fois sur le développement et sur la montée en puissance de la police.

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