Intervention de Alexis Bautzmann

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 8 avril 2009 : 1ère réunion
Crise russo-géorgienne — Audition de M. Alexis Bautzmann directeur du centre d'analyse et de prévision des risques

Alexis Bautzmann, directeur du centre d'analyse et de prévision des risques :

a tout d'abord rappelé que pour les différents protagonistes rencontrés quelques jours avant le déclenchement de la crise, l'Ossétie du Sud ne semblait pas présenter, à la différence de l'Abkhazie, un risque de conflit imminent.

Le fait que, quelques heures avant le début des hostilités, le président Saakachvili s'apprêtait à partir pour les jeux olympiques de Pékin, semble démentir la thèse d'une préparation de la crise par l'armée géorgienne.

Symboles du renouvellement de la classe politique après l'indépendance, l'extrême jeunesse et la totale inexpérience des membres du cabinet du président Saakachvili expliquent la gestion chaotique de la crise, sous l'angle de la communication comme pour les aspects opérationnels.

a observé que contrairement à leurs affirmations, les Russes avaient conservé le monopole de l'information, l'interruption des liaisons aériennes via la Russie ayant différé de 48 heures l'arrivée des premiers journalistes occidentaux. La perspective russe, notamment les allégations de nettoyage ethnique, a longtemps prédominé, les occidentaux ne disposant pas d'une analyse fiable de la situation.

Les Russes ont ainsi réussi à faire croire qu'ils allaient envahir Tbilissi alors qu'ils en étaient incapables. Les forces russes ne l'ont emporté qu'avec difficulté dans les combats. Pourtant, l'aide américaine à la Géorgie est restée très limitée, de l'ordre de 60 millions de dollars. Les troupes géorgiennes entrainées se trouvaient en Irak et, à leur retour, elles ont été déployées autour de Tbilissi.

Tbilissi constitue le foyer patriotique de la Géorgie ; la ville a fourni l'essentiel des recrues dans les combats des années 1990. Les Russes auraient certainement rencontré une résistance acharnée et n'auraient pas pu tenir la ville, pour des raisons diplomatiques.

Faute d'une expertise suffisante en France sur les forces militaires russes, la diplomatie française n'a pas correctement évalué les moyens militaires de la Russie, en décalage complet avec la rhétorique de puissance de ce pays. Un accord de cessez-le-feu très contestable a donc été conclu qui, à la grande satisfaction de la diplomatie russe, reconnaît à la Russie le droit de défendre les intérêts des populations russophones hors de ses frontières.

Pourtant, les Russes eux-mêmes ont constaté les mêmes défaillances opérationnelles que dans la guerre de Tchétchénie : une mauvaise organisation de la chaîne de commandement qui fait peser une charge excessive sur des officiers subalternes insuffisamment formés, peu d'évolution réelle malgré une volonté politique de modernisation de l'armée, une moindre capacité opérationnelle en zone urbaine, une protection insuffisante de l'aviation, un déficit en moyens de communication.

De leur côté, les Géorgiens ont fait preuve d'une grande difficulté à gérer les conscrits et d'une certaine désorganisation de la chaine de commandement.

Ces différents éléments expliquent que le conflit n'ait duré que cinq jours, mais la victoire russe est une victoire par défaut qui a par ailleurs clairement montré les insuffisances et les faiblesses de l'armée russe.

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