Intervention de Philippe Esper

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 24 juin 2008 : 1ère réunion
Industries de défense — Audition de M. Philippe Esper président du conseil économique de défense pour la présentation du mémorandum sur le projet « eurodéfense »

Philippe Esper, président du Conseil économique de défense :

Après avoir rapidement présenté le Conseil économique de défense, M. Philippe Esper a répondu que les auteurs du rapport ne s'étaient pas spécialement penchés sur la forme institutionnelle de l'initiative, mais avaient privilégié son contenu et son objectif : N'est-il pas temps, cinquante quatre ans après l'échec de la Communauté européenne de défense, de construire l'Europe de la défense ? N'est-il pas temps, cinquante ans après la réponse négative au memorandum du Général de Gaulle pour un directoire à trois de l'Alliance atlantique, de proposer un directoire à deux entre Etats-Unis et « Eurodéfense » ? Force est de constater que l'évolution spontanée des choses, « au fil de l'eau », n'aboutit pas à des progrès et des résultats suffisants, pouvant être qualifiés d'Europe de la défense. Aujourd'hui, deux pays seulement, le Royaume-Uni et la France, ont encore des industries de défense capables de couvrir l'ensemble des besoins des armées et des forces militaires capables de remplir (pour combien de temps ?) l'essentiel des missions de défense. Certains pays ont, certes, des entreprises performantes, mais, mises ensemble, leurs capacités de recherche, de conception et de production ne couvrent pas le spectre des besoins. Ayant analysé cette situation depuis cinq ans, le Conseil économique de défense a souhaité proposer aux autorités françaises de s'engager sur une initiative consistant, notamment, à regrouper les Etats prédisposés à consentir progressivement à un effort de défense raisonnable, à mettre en place un état-major européen, à partager leurs capacités opérationnelles et industrielles (programmes et recherche) et à organiser, de façon cohérente leur tissu industriel (y compris la sauvegarde de centres de gravité européens des entreprises d'aéronautique et d'armement, sans lesquelles le concept de défense est vide de sens).

S'agissant de l'effort de défense, M. Philippe Esper a proposé de réfléchir à l'hypothèse d'école suivante. Si l'ensemble des pays européens effectuait le même effort de défense, en pourcentage, que la Grande-Bretagne ou la France, le budget d'équipement des forces européennes, actuellement d'un peu plus de cinquante milliards d'euros, contre cent cinquante aux Etats-Unis, passerait à quatre-vingt milliards d'euros. Si, en outre, le volume des effectifs militaires européens était aligné sur celui des Etats-Unis, ce budget passerait à cent dix milliards, ce qui ne serait pas excessif pour un ensemble démographique une fois et demi supérieur à celui des Etats-Unis, ayant un revenu global supérieur au revenu américain et une vocation mondiale à faire entendre un message de soft power aussi intéressant et crédible que les messages américain, chinois, russe ou indien. A l'occasion du dernier Conseil européen de l'année, une déclaration politique se limitant à lancer les principales têtes de chapitre d'une « Eurodéfense » et à proposer la rédaction en 2009 d'un cahier des charges pourrait inviter les pays qui le souhaitent à rejoindre ce projet.

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