Le diagnostic d'abord. Après une crise d'une brutalité et d'une ampleur inédites depuis la deuxième guerre mondiale, la France est engagée dans la reprise. Je veux pour preuve de cette entrée dans l'après-crise l'augmentation du PIB de 0,7 % au deuxième trimestre. Tous les moteurs de la croissance y ont contribué. La consommation n'a jamais fléchi : les stabilisateurs automatiques ont fonctionné et les aides aux plus défavorisés ont joué. L'investissement a repris (+ 0,1 % dans le privé) grâce à la demande adressée à la France, grâce aussi au redressement de la confiance ainsi qu'à la réforme de la taxe professionnelle. Les exportations contribuent positivement à la croissance - le budget que nous consacrons à leur soutien, faible par rapport à celui d'autres pays, a été maintenu.
La reprise est engagée pour la France qui a supporté la crise plutôt mieux que ses partenaires. Malgré la très forte reprise en Allemagne, notre voisin n'a pas retrouvé son niveau antérieur. En revanche, le marché de l'emploi, infiniment plus souple que le nôtre, s'y est mieux comporté.
Le poids de la crise s'est fait sentir en 2009. Le nombre de demandeurs d'emploi diminue, malgré des effets de « tôle ondulée ». Depuis le début 2010, l'économie française a commencé à créer des emplois. Le chômage au sens du BIT est revenu de 9,6 % à 9 % et nous favorisons la politique de l'emploi.
Si nous avons bien réussi face à la crise, la politique pour l'après-crise repose sur deux colonnes, la réduction du déficit et la poursuite des réformes structurelles. La première constitue un impératif absolu. Elle répond à un engagement que nous avons pris et prolonge le pacte de stabilité et de croissance dont vous avez été, monsieur le Président, un inspirateur. Nous ne devons pas transmettre aux générations futures une dette qui leste l'économie. J'espère que la trajectoire sera inversée d'ici 2013. C'est en outre une nécessité financière car la signature des Etats souverains est notée. Avec une note AAA, la France a un spread de trente points environ avec l'Allemagne. Avec celle-ci et les Pays-Bas, nous avons les trois meilleures signatures de l'Union.
Pour que la croissance soit durable, il faut agir sur les facteurs travail et compétitivité ainsi que sur l'environnement. Après les heures supplémentaires, le revenu de solidarité active (RSA), la réforme de Pôle emploi et celle de la taxe professionnelle, celle des retraites favorise le travail et l'emploi, et devrait entraîner une augmentation du PIB de + 0,3 point de PIB en moyenne sur dix ans.
L'amélioration de la compétitivité résultera notamment de la réforme de la taxe professionnelle, du crédit d'impôt-recherche, des pôles de compétitivité, mais aussi des grandes dépenses d'avenir pour les nouvelles technologies et pour l'enseignement supérieur et la recherche.
La régulation financière est améliorée par les dispositions du projet de régulation bancaire et financière et par la future taxe de risque systémique sur les banques.
La croissance, d'abord estimée à 0,7 % pour 2010 a été revue à 1,5 % ; prévoir 2 % pour 2011 ne paraît pas déraisonnable, puisque nous avons déjà un rythme annualisé de 2 %. Nous avons retenu une inflation de 1,5 %, un baril à 80 dollars, un euro à 1,30 dollar. Le redressement des créations d'emplois salariés est de 80 000 dans le secteur marchand en 2010, quoiqu'aient prédit les Cassandres, et de 160 000 au total pour 2010. Il engendrera consommation et investissement, ouvrant ainsi un cercle vertueux. Le taux des prélèvements obligatoires serait de 42,9 % en 2011 contre 41,9 % en 2010, ce qui ne correspond cependant pas à une augmentation des impôts.
Retraites, dette sociale ou autres mesures, la politique fiscale est cohérente. Les niches dégageront 9,4 milliards en 2011 et 11,5 milliards en 2012 ; les autres mesures de recettes porteront ces montants à respectivement 10,9 milliards et 13,6 milliards. Il s'agit du financement de la réforme des retraites, du relèvement d'un point de la tranche marginale de l'impôt sur le revenu et de la fiscalité du capital, relèvement pour lequel le bouclier fiscal ne jouera pas.
Pour la dette sociale, l'imposition au fil de l'eau des compartiments euros des contrats multisupports s'ajoutera à la taxe spéciale sur les conventions d'assurance (TSCA) à taux réduit sur les contrats d'assurance maladie solidaires et responsables et à la taxation des sommes placées dans la réserve de capitalisation des sociétés d'assurance.
Les autres mesures de réduction des niches concernent l'augmentation de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les offres triple play, la réduction des aides fiscales à l'énergie photovoltaïque, les modalités déclaratives en cas de mariage ou de pacs, le recentrage et la moralisation de l'ISF PME ou encore le rabot de 10 % sur toutes les niches plafonnées à l'exception de celles qui favorisent l'emploi et l'innovation ou en faveur des plus défavorisés, ainsi que la taxe sur les 4x4 convertibles.
Cette politique fiscale est cohérente. Les réformes structurelles sont poursuivies et l'investissement soutenu. Tous les leviers fiscaux jouent pour accompagner la politique économique. La répartition de l'effort entre les ménages et les entreprises est équilibrée : 40 % pour les uns, 60 % pour les autres. Les prélèvements que l'on met à la charge des entreprises sont ultimement financés par les ménages.