a rappelé que la mission « Immigration, asile et intégration », créée dans le cadre du projet de loi de finances pour 2008, constituait la traduction budgétaire du nouveau ministère de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement. Il a souligné que le montant de ses crédits apparaissait limité, 609 millions d'euros en crédits de paiement, pour ce qui constituait la première étape d'une intégration des administrations publiques concourant à la politique de l'immigration du gouvernement.
Il a précisé que deux programmes figuraient au sein de la mission :
- le programme 303 « Immigration et asile », regroupant, pour 414 millions d'euros, les crédits relatifs aux centres de rétention administrative, aux reconduites à la frontière, à l'accueil et à l'hébergement des demandeurs d'asile et au traitement de leur demande par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et la Commission de recours des réfugiés (CRR). Ce programme inclut également les fonctions « support » de la future administration centrale du nouveau ministère ;
- le programme 104 « Intégration et accès à la nationalité française » finançant, à hauteur de 195 millions d'euros, l'accueil des étrangers par la voie du contrat d'accueil et d'intégration mis en oeuvre par l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM), et l'intégration par le biais d'associations financées par l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé).
a indiqué que la nouvelle mission présentait trois caractéristiques, faisant remarquer que :
- 50 % de la dépense (300 millions d'euros) était liée au traitement de la demande d'asile, et en particulier à l'hébergement des demandeurs, les délais d'examen de la demande ayant un impact direct sur les frais d'hébergement des demandeurs d'asile, notamment en centre d'accueil des demandeurs d'asile (CADA) ;
- un tiers des crédits de la mission étaient mis en oeuvre par des opérateurs de l'Etat : OFPRA, ANAEM et ACSé, ce qui impliquait de définir les modalités de la tutelle du nouveau ministère sur ces organismes ;
- la mission regroupait seulement 609 emplois, soit uniquement les effectifs d'une administration d'état-major, les services déconcentrés - préfectures, consulats, service de la main-d'oeuvre étrangère des directions départementales du travail - ne figurant pas au sein de la présente mission.
Il a observé que l'administration centrale du ministère était confrontée au défi d'être à la fois une administration destinée à produire des textes et des règlements, et un outil de pilotage de services aux actions très fortement hétérogènes, dans l'objectif de renforcer une performance encore perfectible.
Puis, en premier lieu, il a souligné que la mise en cohérence des administrations chargées de l'immigration et de l'intégration était une nécessité, comme l'avait indiqué dès novembre 2004 la Cour des comptes dans un rapport dont il a rappelé les termes : « dans un domaine sensible, l'absence de pilotage n'a pas été étrangère à l'incapacité à définir une politique claire de l'immigration, et elle a favorisé le cloisonnement des politiques ministérielles et l'autonomisation des divers établissements et institutions chargés des différents dossiers, sans que les moyens de leur cohérence soient toujours réunis ». Il a indiqué que le rôle, et la difficulté, du nouveau ministère était d'agréger des administrations aux cultures de travail éparses et aux traditions parfois antagonistes. Il s'agissait dès lors de décloisonner les administrations, les systèmes informatiques et les méthodes de travail.
En deuxième lieu, il a noté que le nouveau ministère de l'immigration devait être un ministère symbole de la réforme administrative. Il a cité l'exemple de l'immigration économique, et de l'attractivité du territoire auprès des étudiants et des personnes les plus qualifiées. Il a tout d'abord regretté l'absence d'objectif, et d'indicateur, sur ce sujet, dans le projet annuel de performances, alors que ceci était au coeur de la lettre de mission adressée par le Président de la République à M. Brice Hortefeux, ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du codéveloppement, rappelant l'objectif de porter le taux d'immigration économique à 50 % des flux migratoires. Par ailleurs, il a précisé qu'il fallait définir avec précision la « population cible » : 60 métiers avaient déjà été ouverts à l'immigration économique, et 152 le seraient prochainement. Il a rappelé que des accords avaient été passés avec le Sénégal en septembre 2006, avec le Gabon en juillet 2007, et récemment avec les Philippines. D'autres accords étaient prévus fin 2007 avec le Bénin et le Congo-Brazzaville.
Par conséquent, M. André Ferrand, rapporteur spécial, a indiqué qu'il serait nécessaire de produire une administration de l'immigration économique cohérente et efficace. Dans cet esprit, il a suggéré de créer des indicateurs de simplification administrative ainsi qu'un indicateur qualitatif sur l'accueil dans les services des visas et des préfectures, sur la base d'enquêtes. Il a rappelé que les personnes qualifiées viendraient d'autant plus volontiers en France que le service public d'accueil des étrangers y serait de qualité.
En troisième lieu, au sujet de l'intégration, autre pilier essentiel de la politique de l'immigration, il a précisé que l'ensemble des actions étaient déléguées à l'ACSé, pour un peu plus de 100 millions d'euros, sans aucun objectif ou indicateur de performances et que plus de 4.800 associations étaient financées par ce biais.
Il a précisé qu'il y avait un besoin d'évaluation des actions entreprises, l'ACSé en étant consciente puisqu'elle avait lancé des audits sur les principales associations financées. Il a rappelé que ces audits ont montré, selon le rapport d'activité de l'agence, l'essoufflement de la vie associative de certaines grandes associations. Il a également relevé que plusieurs opérateurs éprouvaient de la difficulté à orienter leurs actions sur leur coeur de métier : la lutte contre les discriminations, notant qu'il y avait donc, dans ce domaine, un besoin « d'activation » de la dépense pour la rendre globalement plus efficace.
Enfin, en quatrième lieu, il a souligné la nécessité de renforcer la tutelle financière sur les opérateurs de la mission et d'en moderniser la gestion. Il a jugé qu'il en était ainsi de la commission de recours des réfugiés, bientôt transformée en Cour nationale du droit d'asile, dont les délais d'examen des recours étaient trop longs. Une réduction du nombre de formations de jugement et une professionnalisation progressive des présidents de ces formations apparaissaient incontournables.
S'agissant de l'ANAEM et de l'ACSé, M. André Ferrand, rapporteur spécial, a mis en exergue :
- la question de la répartition des tâches entre l'ANAEM et l'ACSé, notamment en ce qui concerne la formation linguistique. En théorie, il a montré que la répartition des tâches était claire : à l'ANAEM le contrat d'accueil et d'intégration, et donc l'accueil et les formations aux primo-arrivants ; à l'ACSé l'intégration, c'est-à-dire la formation linguistique des personnes présentes sur le sol français depuis plus d'un an. En pratique, il a observé que cette distinction était peu opérante, puisque les personnes concernées étaient en définitive les mêmes, et que les opérateurs, qui gagneraient d'ailleurs à être professionnalisés, étaient en grande partie identiques ;
- la question des objectifs de chaque agence, celles-ci se caractérisant par l'empilement au fil des ans de compétences parfois très hétérogènes et éclatées, sans « revue générale des politiques publiques » ;
- la question de la performance de la gestion, conformément aux prescriptions de la LOLF.
Sur ce point, il a fait valoir la nécessité pour la tutelle de ces opérateurs d'introduire une comptabilité d'engagement et une comptabilité analytique, et de fixer les fonds de roulement et les plafonds d'emploi au niveau strictement nécessaire à l'exercice des missions. S'agissant de l'ANAEM, qui ne disposait ainsi pas de comptabilité d'engagement, il a considéré qu'il y avait là une anomalie qui devait être corrigée au plus vite. Elle empêchait, en effet, de savoir avec certitude si les ressources budgétaires de l'ANAEM étaient conformes à ses besoins. En outre, il a précisé que l'agence disposait au 30 septembre 2007 d'un fonds de roulement de 62 millions d'euros, à comparer avec le montant du budget de l'ANAEM, qui s'établissait en 2007, à titre prévisionnel, à 134 millions d'euros.
Dans ces conditions, M. André Ferrand, rapporteur spécial, a présenté l'article 45 rattaché qui portait la taxe sur les attestations d'accueil, affectée à l'ANAEM, de 30 à 45 euros, en s'interrogeant sur :
- la pertinence du mode de financement de l'Agence par l'empilement de six « petites » taxes affectées ;
- les besoins financiers réels de l'organisme ;
- la perception, à plusieurs reprises, sur les personnes étrangères, de droits de timbre qui n'étaient plus tout à fait de l'ordre du symbolique (frais des centres des études en France pour les étudiants, de l'ordre de 80 à 100 euros selon les pays, frais de visas de 60 euros, taxe sur le titre de séjour), appelant par conséquent à une rationalisation.
A l'issue de cet exposé, M. André Ferrand, rapporteur spécial, a néanmoins proposé d'adopter l'article 45 sans modification. Il a présenté trois amendements sur la mission :
- le premier amendement vise à donner au Parlement une vision complète et exhaustive des crédits alloués à la politique de l'immigration et de l'intégration dans un document de politique transversale ;
- le deuxième amendement tend à permettre à la tutelle sur l'Agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations (ANAEM) de définir un fonds de roulement au niveau strictement nécessaire à l'exercice des missions de l'opérateur ;
- le troisième amendement vise à permettre à la tutelle sur l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSE) de définir un plafond d'emplois au niveau strictement nécessaire à l'exercice de ses missions.