Intervention de Roland Lubeigt

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 18 juin 2009 : 1ère réunion
Les femmes dans les lieux privatifs de liberté — Audition de M. Roland Lubeigt président de l'association des établissements gérant des secteurs de santé mentale adesm accompagné de Mme Le Docteur blandine cabannes-rougier psychiatre chef de service à l'hôpital barthélémy durand

Roland Lubeigt :

a tout d'abord présenté l'Association des établissements gérant des secteurs de santé mentale (ADESM), précisant qu'elle concernait l'ensemble des établissements participant au service public de la prise en charge de la santé mentale, c'est-à-dire aussi bien les hôpitaux psychiatriques, appelés centres hospitaliers spécialisés (CHS), que les hôpitaux généraux comprenant un service psychiatrique. Il a insisté sur le rôle important joué, dans le service public de la santé mentale, par les établissements privés participant au service public de la santé mentale, appartenant à la catégorie des établissements de santé privés participant au service public hospitalier (PSPH). Il a rappelé que, parallèlement à sa fonction de président de l'ADESM, il assurait la direction d'un établissement public de santé mentale, l'hôpital Barthélémy Durand à Etampes.

Il s'est ensuite proposé de présenter l'organisation générale de l'offre de soins en psychiatrie publique en France, précisant que l'hospitalisation n'est que l'une des modalités de prise en charge et qu'elle s'inscrit dans un parcours plus général du patient.

Il a tout d'abord indiqué que le modèle français d'organisation de la prise en charge psychiatrique avait inspiré d'autres exemples à l'étranger. Il a ensuite rappelé que la population suivie par la psychiatrie publique représentait, aujourd'hui, 1,5 million de personnes dont 85 % sont suivies sur un mode ambulatoire, précisant que l'hospitalisation ne concernait ainsi que 15 % seulement des patients qui ont accès, à un moment ou à un autre, aux dispositifs de soins de la psychiatrie publique. Il a ajouté que la psychiatrie publique prenait en charge une population caractérisée par la désinsertion, de faibles ressources et l'isolement, soulignant que 64 % des hommes concernés et 38 % des femmes vivaient seuls ou étaient célibataires. Il a ensuite indiqué que les hommes étaient plus souvent concernés par des problèmes de schizophrénie et d'alcool, et les femmes par des problèmes de dépression grave.

Il a expliqué que l'organisation de l'offre de soins psychiatriques en France était fondée sur le principe de la sectorisation, chaque secteur géographique étant confié à une équipe soignante, chargée de prendre en charge toutes les personnes atteintes de troubles psychiques ou mentaux avec une obligation de les suivre sur la durée avec les moyens mis à leur disposition. Il a rappelé que ces moyens comprenaient un nombre important de structures ambulatoires, citant l'exemple de son établissement d'Etampes qui en regroupe 70, ainsi que 9 unités d'hospitalisation qui constituent le recours thérapeutique, lorsque les structures permettant une prise en charge au plus près de la personne dans son milieu naturel de vie ne permettent plus de gérer la pathologie. Il a précisé qu'il y avait donc souvent une prise en charge en amont de l'hospitalisation par le biais des structures ambulatoires, et une proposition de suivi après la période d'hospitalisation.

Il a indiqué que l'établissement public de santé mentale dont il assurait la direction couvrait les trois quarts du département de l'Essonne, chaque secteur couvrant en moyenne 70 000 habitants et disposant d'une unité d'hospitalisation.

Il a insisté sur le fait que l'hospitalisation constituait un temps dans la prise en charge globale du patient, et qu'elle pouvait être attentatoire aux libertés individuelles selon le mode d'hospitalisation de la personne. Il a rappelé, à ce titre, les trois modes d'hospitalisation en service public :

- l'hospitalisation libre, qui se fait à la demande de la personne concernée et à laquelle elle peut mettre un terme quand elle l'entend, représente la plus grande partie des situations (75 % des hospitalisations dans l'établissement public de santé d'Etampes) ;

- l'hospitalisation à la demande d'un tiers - qui représente 542 cas, soit 21 % des hospitalisations dans l'établissement d'Etampes en 2008, répartis équitablement entre hommes et femmes -, correspond aux situations où un tiers demandeur a demandé l'hospitalisation dans l'intérêt de la personne ; 80 % des demandeurs sont des membres de la famille, le plus souvent les parents âgés, ce fait témoignant de l'état de solitude des patients ; les autres tiers sont les conjoints, les frères et soeurs mais ne devraient plus être des personnels soignants ou administratifs, conformément à la jurisprudence du Conseil d'Etat ; il est fréquemment évoqué qu'un certain nombre d'hospitalisations d'office trouvent leur origine dans la difficulté à trouver un tiers ;

- l'hospitalisation d'office - qui représente 4,5 % des hospitalisations à Etampes (117 patients) dont 75 % d'hommes et 25 % de femmes -, est théoriquement décidée par arrêté préfectoral mais, le plus souvent, elle se fait dans l'urgence, par un arrêté provisoire du maire ; la population concernée est généralement masculine, et ce mode d'hospitalisation résulte dans un certain nombre de cas de l'impossibilité de mettre en place une procédure d'hospitalisation sur demande d'un tiers.

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