Intervention de Bruno Tertrais

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 14 juin 2006 : 1ère réunion
Défense — Dissuasion nucléaire française - table ronde sur la dissuasion nucléaire

Bruno Tertrais :

a estimé que le débat sur la dimension européenne potentielle de la dissuasion nucléaire avait été stérilisé il y a une dizaine d'années. A cet époque, les déclarations sur la dissuasion concertée, et celles figurant dans le concept commun franco-allemand de défense, avaient été totalement brouillées par les interférences liées à la reprise des essais nucléaires et aux tentatives de la France de réintégrer, sous certaines conditions, la structure militaire intégrée de l'OTAN.

a estimé que depuis lors, beaucoup d'évolutions positives s'étaient produites. L'Union européenne s'est élargie et la politique européenne de sécurité et de défense (PESD) a été mise sur pied. Autant l'on peut dire qu'il n'était pas opportun d'introduire un débat sur la dissuasion nucléaire et l'Europe de la défense au moment où cette dernière peinait à s'imposer, autant on peut estimer que cela devrait être plus facile aujourd'hui, alors que les structures de la PESD sont en place.

a remarqué qu'au regard des éléments qui constituent désormais la PESD, seul le volet nucléaire reste absent. Il s'est déclaré convaincu que la clause de défense mutuelle finira par s'imposer au sein de l'Union européenne et que dans le même temps, la question de la présence des armes nucléaires américaines sur le sol européen aura été réglée, l'OTAN s'orientant en outre sur la voie de la défense antimissile. Le lien transatlantique devrait s'en trouver transformé et il n'est pas certain que tous nos partenaires voudront se reposer seulement, pour leur défense ultime, sur la défense antimissile mise en place par les Etats-Unis. Il sera alors de l'intérêt de la France et du Royaume-Uni d'ouvrir prudemment le débat sur la dissuasion nucléaire en direction de leurs partenaires européens, non pas sous la forme d'une grande initiative politique, mais dans le cadre de discussions avec les pays intéressés. Il serait également souhaitable que, par une déclaration conjointe, la France et le Royaume-Uni signifient clairement que leurs forces nucléaires ont vocation à être mises au service de la protection de l'Europe. Il est cependant clair qu'en ce domaine, les évolutions ne pourront être rapides et qu'elles seront tributaires des évolutions au sein de l'OTAN.

a par ailleurs exclu l'hypothèse de forces nucléaires européennes communes, établissant à ce propos un parallèle avec l'idée de siège permanent européen unique au Conseil de sécurité. Il a cependant estimé que la dissuasion française serait amenée à évoluer si elle devait s'intégrer dans une dimension collective.

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