Intervention de René Beaumont

Réunion du 30 novembre 2006 à 9h30
Moyens des politiques publiques et dispositions spéciales — Compte d'affectation spéciale : contrôle et sanction automatisés des infractions du code de la route

Photo de René BeaumontRené Beaumont :

Monsieur le ministre, ainsi que d'autres l'ont fait avant moi, je me réjouis - et je vous en félicite - de la croissance globale du budget de votre ministère, ce qui permet, en ces périodes de disette budgétaire, une croissance appréciable de 1 % de la mission « Transports » elle-même.

Il ne faut pas craindre de dire que l'investissement dans les transports n'a jamais été aussi élevé dans notre pays grâce, notamment, aux financements de l'Agence de financement des infrastructures de transports en France, l'AFITF, - sujet qu'a déjà longuement évoqué M. Gérard Longuet tout à l'heure -, qui augmentent de 15 % en 2007, atteignant 2, 2 milliards d'euros, même si notre collègue nous a laissé entendre que quelques nuages s'annonçaient à l'horizon de 2010.

Ce budget nous apporte donc globalement satisfaction.

Toutefois, le président délégué de la route Centre Europe Atlantique, la RCEA, ne peut que demeurer perplexe sur l'avenir de ce grand chantier commencé il y a trente-cinq ans, en grande partie en Saône-et-Loire d'ailleurs, par quelques visionnaires de l'époque.

En effet, nous avons du mal à cerner par qui seront assurés les prochains financements de ce premier axe international Est-Ouest à deux fois deux voies de notre pays, connu sous le nom de GLAT, grande liaison d'aménagement du territoire.

Dans le précédent contrat de plan, trois partenaires institutionnels participaient à ce budget : l'État pour 50 %, les départements, régions et communes à hauteur de 25 % chacun, selon les cas.

La décentralisation des routes nationales aux départements a conduit ces derniers, fort logiquement, à cesser leur participation dans le prochain contrat de plan, qui sera alors dénommé « contrat de projets ». Et je ne perçois pas dans la région Bourgogne, actuellement, une volonté réelle de poursuivre un financement qui sera de toute façon amputé de la part départementale et donc nécessairement plus faible que les précédents, ce qui entraînera le report à une échéance encore plus lointaine de l'achèvement de cet axe.

J'en viens donc à ma première question, monsieur le ministre : comment envisagez-vous le financement de la RCEA et, surtout, avec quels partenaires ?

Cela m'amène immédiatement à ma deuxième question.

Constatant, depuis de longues années, l'extrême lenteur de la réalisation de cet axe, j'avais suggéré, après d'autres d'ailleurs, une éventuelle concession autoroutière du tiers central entre l'autoroute A6, de Chalon-sur-Saône ou de Macon jusqu'à Montmarault, et l'autoroute A71. Les départements traversés avaient, en effet, grandement besoin de leurs propres crédits routiers pour assurer désormais l'entretien et l'amélioration de leur réseau intérieur.

Et ce n'est pas, monsieur le ministre, l'ancien maire de Chalon-sur-Saône qui me contredira sur ce sujet, lui qui fut alors un acteur particulièrement efficace pour augmenter significativement l'inscription des crédits sur cet axe pendant de nombreuses années !

J'ai été très heureux de constater que vous-même et, derrière vous, votre administration, naguère hostile à une concession autoroutière sur cet axe, aviez, à la suite d'une nouvelle étude plus objective, admis le principe de cette concession.

Tout en demeurant très favorable à cette solution, je me permets de vous rappeler les conditions nécessaires, et sans doute suffisantes, pour la réalisation d'une telle opération.

Premièrement, il faut continuer à assurer le financement actuel jusqu'à la mise en place de la concession de manière qu'il n'y ait quasiment pas d'interruption de travaux sur l'axe.

Deuxièmement, il importe de donner, dès la signature de la concession, une date précise incontournable d'achèvement au concessionnaire.

Troisièmement, à titre de compensation pour les très gros investissements déjà réalisés par les départements et les régions, il convient de maintenir l'essentiel des sorties actuelles, avec des péages automatiques, pour permettre la parfaite irrigation des territoires.

Quatrièmement, enfin, il faut assurer une gratuité sur une trentaine de kilomètres autour de chaque péage pour les ressortissants locaux.

Je vous demande donc, monsieur le ministre, de bien vouloir faire examiner rapidement ces conditions et de nous dire à quelle échéance vous envisagez la réalisation de cette concession, qui ferait gagner vingt ans de confort et de sécurité, économisant, surtout, au rythme actuel, quelque trois cents vies humaines.

Enfin, toujours sur cet axe et sans m'immiscer dans le très long et compliqué débat des tracés La Rochelle-Limoges ou Nantes-Poitiers-Limoges, le tronçon Angoulême-Limoges me paraît devoir faire l'objet d'investissements importants et urgents. La situation de certains villages l'impose. C'est notamment le cas de La Rochefoucauld, dont la déviation est heureusement déjà engagée, et surtout de Chabanais, où je vous invite à vous rendre, monsieur le ministre, car il « vaut le détour », comme dirait le Guide Michelin, puisque 3 500 poids lourds traversent chaque jour ce village tortueux. C'est colossal !

Dans ces conditions périlleuses, une inscription de 110 millions d'euros serait nécessaire pour cette extrême urgence.

Si je vous fais cette supplique, c'est, bien sûr, pour avoir constaté sur place l'état catastrophique du trafic dans ce secteur et également pour relayer l'action énergique de mon collègue et ami Henri de Richemont, qui est absent aujourd'hui, car il est retenu précisément par une réunion sur le terrain à ce sujet, mais qui aurait aimé vous rappeler ce point noir particulièrement névralgique pour les populations concernées.

J'ai vu là-bas, devant l'absence d'amélioration de l'itinéraire et l'accroissement considérable des flux de trafic entre l'Europe centrale et la péninsule Ibérique, se mettre en place une pratique qui, si elle était coordonnée par l'État et n'avait pas pour seul but de détourner le trafic chez les voisins, me paraîtrait intéressante. J'aimerais avoir votre sentiment à cet égard.

Il s'agit de l'interdiction pour les poids lourds en transit d'emprunter telle ou telle route dans un département, interdiction prononcée par le président du conseil général, par arrêté. Une telle décision a été prise par Mme la présidente du conseil général de la Vienne, mais, en l'occurrence, elle a plutôt pour effet de détourner le trafic chez les autres.

À condition que s'instaure une vraie coordination nationale visant à sauvegarder l'intérêt général, cette pratique pourrait s'avérer judicieuse pour obliger les poids lourds internationaux en transit à utiliser les grandes voies routières - elles existent presque partout - et surtout autoroutières, fussent-elles payantes, plutôt que d'aller troubler la quiétude de nos campagnes et défoncer des routes totalement inadaptées à un trafic intensif de poids lourds.

C'est ce que l'on observe essentiellement à l'extrémité ouest de la route Centre-Europe-Atlantique. C'est la raison pour laquelle l'innovation de Mme la présidente du conseil général de la Vienne, si elle était coordonnée, me paraîtrait particulièrement utile, y compris dans notre département, monsieur le ministre, ne serait-ce que sur la RN73, entre Dole et Chalon.

Enfin, permettez-moi d'aborder très rapidement un autre sujet, celui du transport combiné de marchandises - rail-route, fluvial-route et mer-route -, qui constitue une solution alternative très performante, notamment sur de longs trajets, au « tout routier » ; vous connaissez depuis longtemps mon attachement au développement du transport fluvial à grand gabarit.

Ces solutions d'intermodalité sont avantageuses à plusieurs titres, car elles permettent de diminuer l'encombrement des réseaux routiers, de réduire les émissions de gaz carbonique et d'accroître très sensiblement la sécurité.

Cependant, la concurrence du secteur routier demeure vive et des mesures sont nécessaires pour encourager le rééquilibrage entre les différents modes de transport, en particulier, en neutralisant le plus possible les coûts de manutention et de transbordement.

Ainsi, il existe un système d'aide aux opérateurs par unité de transport intermodal afin de soutenir la viabilité de ce secteur, en attendant que le transport combiné trouve toute sa place sur le marché.

À ce propos, monsieur le ministre, je sais que l'action du Gouvernement s'inscrit dans la continuité. Je souhaite donc que vous puissiez nous préciser quels moyens financiers sont réservés dans la mission « Transports » au développement du transport intermodal.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion