Intervention de Jacques Blanc

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 19 septembre 2007 : 1ère réunion
Traités et conventions — Coopération administrative avec monaco - examen du rapport

Photo de Jacques BlancJacques Blanc, rapporteur :

qui, par ailleurs, préside le groupe interparlementaire d'amitié France-Monaco du Sénat, a tout d'abord rappelé que cette convention s'inscrivait dans le cadre de la modernisation des relations franco-monégasques engagée par le traité du 24 octobre 2002, entré en vigueur le 1er décembre 2005, destiné à adapter et à confirmer les rapports d'amitié et de coopération entre les deux pays. Ce texte a fait passer les relations franco-monégasques d'une « amitié protectrice », selon les termes du précédent traité de 1918, à une « communauté de destin ».

Le rapporteur a souligné que l'esprit et le contenu du traité de 1918 ne correspondaient plus aux réalités actuelles et n'étaient plus compatibles avec les prérogatives d'un Etat souverain, qui dispose d'une Constitution (depuis 1962), qui est membre de l'ONU (depuis 1993), du Conseil de l'Europe (depuis 2004) et de nombreuses autres organisations internationales (mais pas de l'Union européenne).

En outre, M. Jacques Blanc, rapporteur, a indiqué que son poids économique (le PIB de Monaco était de 3,5 milliards d'euros en 2005) et son rôle pionnier (notamment en matière de protection de l'environnement et du milieu marin) lui permettent d'occuper une place au niveau international, et, en particulier, dans le cadre des relations euro-méditerranéennes, sans rapport avec sa dimension (32 000 habitants sur une superficie d'environ 2 km2).

Avec le nouveau traité de 2002 sont confirmées les relations d'amitié franco-monégasques, dont la spécificité est due à la situation géographique de la principauté ainsi qu'à notre histoire commune, a souligné M. Jacques Blanc.

Le nouveau traité réaffirme la souveraineté et l'indépendance de la Principauté de Monaco, tout en poursuivant la politique d'étroite concertation suivie par les deux Etats, notamment dans le domaine des relations internationales. Il prévoit ainsi que les actions de la principauté, conduites dans l'exercice de sa souveraineté, s'accordent avec les intérêts fondamentaux de la République française dans les domaines politique, économique, de sécurité et de défense.

Le traité du 24 octobre 2002 met aussi fin à la nécessité d'un agrément français dans le cas d'une modification de l'ordre successoral. Cette clause, a indiqué M. Jacques Blanc, rapporteur, s'expliquait par le contexte particulier de l'époque et la crainte des autorités françaises qu'en cas de décès de l'héritier du trône, le trône de la Principauté de Monaco ne revienne à un duc allemand. Elle n'a pas trouvé à s'appliquer, puisque le Prince Albert II a accédé au trône le 6 avril 2005 à la mort de son père, le Prince Rainier III, après plus de 50 ans de règne.

Enfin, le traité de 2002 a institué une commission de coopération franco-monégasque, qui sert de cadre aux consultations régulières entre les deux pays sur les questions d'intérêt commun. Lors de sa première réunion, cette commission a créé une « commission chargée des questions locales de coopération transfrontalière », qui s'est réunie à plusieurs reprises, associant les représentants des deux Etats et des collectivités territoriales intéressées. La Principauté de Monaco forme, en effet, avec les communes environnantes une agglomération de 103.000 habitants et joue vis-à-vis de celles-ci le rôle d'un pôle d'activité. Ainsi, sur 40.000 salariés du secteur privé que comptait Monaco en 2006, 27.000 étaient français et 30.000 résidaient en France. Les migrations quotidiennes sont donc importantes et justifient la mise en oeuvre d'un plan de déplacements urbains associant la principauté et les communes. La principauté est ainsi associée aux réflexions menées sur le projet de ligne à grande vitesse PACA, dont elle prend part au cofinancement des études.

Le centre hospitalier Princesse Grace met à la disposition des communes environnantes un ensemble complet de services hospitaliers.

Sur le plan fiscal, les ressortissants français domiciliés à Monaco (c'est le cas de 8.000 de nos compatriotes, installés à Monaco parfois depuis plusieurs générations) paient l'impôt sur le revenu et l'ISF comme s'ils étaient domiciliés en France, sauf pour une partie d'entre eux établie à Monaco avant 1957 et qui va en diminuant (environ 200 personnes).

Enfin les établissements scolaires monégasques accueillent en priorité les enfants domiciliés à Monaco, puis les élèves dont les parents occupent un emploi en principauté sans y habiter. Près de trois fois plus d'enfants français que d'enfants monégasques sont scolarisés à Monaco.

Le traité du 24 octobre 2002 est d'ailleurs complété par une série d'accords sectoriels, qui portent sur des sujets variés, comme l'entraide judiciaire en matière pénale, les relations économiques et financières ou encore le domaine social, a rappelé M. Jacques Blanc, rapporteur.

a ensuite abordé le contenu de la convention sur la coopération administrative avec Monaco. Celle-ci devrait se substituer à une précédente convention du 28 juillet 1930 relative à l'accession des sujets monégasques à certains emplois publics en France et au recrutement de certains fonctionnaires de la principauté, qui ne paraissait plus compatible avec les prérogatives d'un Etat souverain.

En particulier, les Monégasques souhaitaient que le principe du libre accès des ressortissants monégasques aux emplois publics de leur pays soit admis, tout en continuant de faire appel, en priorité sur toute autre nationalité, à des ressortissants français, pour un ensemble d'emplois et de fonctions auxquels l'étroitesse de la population monégasque ne permet pas de répondre.

Les autorités françaises rejoignaient cette préoccupation, conforme aux conventions internationales, en particulier à celle du Conseil de l'Europe, qui prévoient le droit des citoyens d'un Etat à accéder à tous les emplois publics de cet Etat.

La négociation a porté sur la manière dont serait conciliée cette préoccupation partagée et la nécessité de s'assurer que les titulaires de certaines fonctions ou emplois dits « sensibles », parce que mettant en cause les intérêts fondamentaux, jouissent de la confiance respective des deux Etats.

a indiqué qu'en ce qui concerne l'accès aux emplois publics à Monaco, le principe sera que, désormais, ces emplois reviendront aux ressortissants monégasques, alors qu'auparavant tous les emplois pouvaient être occupés par des Français et devaient même l'être pour certains emplois élevés et sensibles.

Ceux-ci pourront désormais être occupés par des ressortissants monégasques ou français, à condition qu'ils jouissent de la confiance respective des deux parties, ce qui préserve les intérêts français autant que la souveraineté monégasque.

L'accord prévoit donc, toujours dans le même esprit et également pour manifester la communauté de destin qui les lie, que les deux parties se consulteront à propos des titulaires d'emplois qui touchent à leurs intérêts fondamentaux.

Cela concerne notamment la désignation du Ministre d'Etat (l'équivalent du Premier ministre), du conseiller du Gouvernement pour l'intérieur, du directeur des Services judiciaires, du directeur de la Sûreté publique et du directeur des Services fiscaux de la principauté.

Ces consultations permettront de s'assurer que les personnalités concernées, qui seront choisies et nommées par le Prince de Monaco parmi des ressortissants monégasques ou français, jouissent de la confiance respective des deux parties.

De plus, les ressortissants français auront la priorité sur les ressortissants d'autres pays tiers, par voie de détachement ou sur contrat, pour les emplois publics non pourvus par des ressortissants monégasques.

a indiqué que 267 fonctionnaires français étaient actuellement détachés dans la Principauté, dont 225 pour l'éducation nationale, 14 pour la magistrature, 10 pour le maintien de l'ordre, 8 pour les services hospitaliers et 8 pour les services fiscaux.

Le ministre d'Etat est français et deux conseillers de Gouvernement sur cinq le sont également (le conseiller du Gouvernement pour l'intérieur et le conseiller du Gouvernement pour l'équipement, l'environnement et l'urbanisme).

a précisé ensuite que les Monégasques souhaitaient pouvoir accéder, de manière plus effective, à la fonction publique française.

En effet, les mécanismes de la convention de 1930 et de ses textes d'application se sont révélés relativement dissuasifs, puisqu'ils ne proposaient que des emplois ne relevant pas, a priori, du domaine régalien et seulement pour certaines professions (professeurs des universités, chirurgiens).

Il a donc été établi, à l'instar de ce qui prévaut pour les ressortissants andorrans, que l'accès des Monégasques à la fonction publique française s'opèrerait « dans les mêmes conditions que pour les ressortissants des pays membres de l'Union européenne ».

Dans la pratique, si l'on se réfère à la loi du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique, les ressortissants monégasques, comme les ressortissants des autres Etats membres, n'auront pas accès aux « emplois dont les attributions soit ne sont pas séparables de l'exercice de la souveraineté, soit comportent une participation directe ou indirecte à l'exercice de prérogatives de puissance publique de l'Etat ou des autres collectivités publiques ».

Cela signifie, par exemple, que les citoyens monégasques ne pourront pas accéder à certaines fonctions, comme celle d'ambassadeur ou de préfet.

Cet accord inscrit donc dans le droit une pratique antérieure et une certaine asymétrie dans l'accès aux emplois publics respectifs.

a indiqué en conclusion que cet accord permet d'adapter et de moderniser les relations franco-monégasques en matière d'accès aux emplois publics, tout en assurant la sauvegarde des intérêts français.

Il participe donc à la refonte de nos relations politiques, administratives, juridiques et financières avec la principauté, engagée avec le traité de 2002.

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